Finlande

La Finlande, ou « pays aux mille lacs » de son surnom, est devenue en avril 2023, le 31ᵉ et dernier pays en date à avoir rejoint l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord. Cette adhésion, motivée par le conflit en Ukraine, marque une rupture totale avec la célèbre tradition de neutralité du pays. Ce même pays, qui, pendant la guerre froide, souhaitait absolument avoir de bonnes relations avec la Russie. Comment en est-on alors arrivé là ?

Indépendance tardive et alliance avec l’Allemagne nazie

Du XIIᵉ siècle au XIXᵉ siècle, la Finlande était une province puis un grand-duché rattaché au Royaume de Suède. Dès 1809 et l’annexion de la province par Alexandre Ier, elle est devenue un grand-duché autonome de Russie. Ce n’est qu’en novembre 1919 qu’elle obtient son indépendance complète. En novembre 1939, les troupes de l’Armée rouge envahissent la Finlande, Staline redoutant une attaque allemande depuis le sol finlandais. C’est le début de la guerre d’Hiver.

À la suite de ce conflit, où la Finlande est contrainte de céder la Carélie, le pays, craignant pour sa souveraineté, se rapproche de l’Allemagne nazie. Mais la défaite de cette dernière à l’issue de la Seconde Guerre mondiale oblige alors la Finlande à user de pragmatisme. Elle doit ménager ses relations avec l’URSS et éviter toute confrontation directe. Ainsi, la Finlande refusera de prendre part au plan Marshall en 1947, garantissant de fait sa non-intégration au Pacte de Varsovie. C’est le début de la finlandisation.

Finlande au temps de la guerre froide : naissance du concept de finlandisation

Le terme finlandisation a donc été créé de toutes pièces au début de la guerre froide pour qualifier l’attitude de la Finlande à l’égard de l’URSS. Il s’agissait pour la Finlande de se laisser dicter sa politique étrangère par le voisin communiste, afin de ne pas se le mettre à dos.

Si, en Europe, le terme finlandisation est connoté de manière négative, synonyme de neutralité contrainte et de souveraineté limitée, cette situation était vue par les Finlandais comme un moyen de survivre, tout en profitant des bonnes relations économiques avec le voisin russe.

La Finlande avait ainsi la possibilité de diversifier ses approvisionnements en énergie et de bénéficier de pétrole soviétique à bas prix. En échange, l’espace soviétique représentait un marché où les entreprises finlandaises pouvaient écouler leurs marchandises.

Fin de la guerre froide et chute de l’URSS : rapprochement avec les pays occidentaux

La chute de l’URSS donne dès lors plus de liberté à la Finlande. Si le pays est attaché à sa neutralité, la perspective d’un rapprochement avec les pays occidentaux n’est pas écartée. Dès 1994, la Finlande intègre le programme Partenariat pour la paix de l’OTAN. Cela lui permet notamment de participer à des missions de l’Alliance, comme au Kosovo ou en Libye.

Il s’agissait à l’époque seulement d’une coopération militaire. Les Finlandais n’envisageaient pas une intégration à l’OTAN. L’année d’après, le rapprochement se poursuit avec l’adhésion à l’Union européenne. Mais très vite, le retour de la menace russe en Europe, avec l’annexion de la Crimée en 2014, n’est pas sans rappeler le passé d’envahisseur de la Russie à l’égard de la Finlande. De ce fait, c’est conjointement avec la Suède que la Finlande va autoriser la tenue d’exercices militaires de l’OTAN sur le sol finlandais.

La guerre en Ukraine a bouleversé la politique étrangère de la Finlande

L’invasion de l’Ukraine par la Russie déclenchée en février 2022, vécue avec beaucoup d’émotion dans la plupart des pays du monde, l’est particulièrement en Finlande. Le pays étant en première ligne d’une potentielle invasion avec ses 1 309 km de frontière partagée avec la Russie.

Déjà en 2007, le ministre finlandais de la Défense, Jyri Hakamies, identifiait les trois défis principaux pour la Finlande comme « Russie, Russie et Russie », et l’histoire semble alors se confirmer. C’est ainsi que le 15 mai 2022, la Première ministre finlandaise de l’époque, Sanna Marin, demande officiellement l’adhésion de son pays à l’OTAN. La Russie ne tarde dès lors pas à réagir, affirmant que l’élargissement de l’Alliance constitue une « nouvelle atteinte aux intérêts de la Russie » et annonçant que Moscou adopterait des « contre-mesures ».

Du côté des pays membres de l’OTAN, tous accueillent chaleureusement ce futur élargissement, à l’exception notable de la Turquie et de la Hongrie. Si le gouvernement de Viktor Orban utilise ce prétexte pour faire pression sur l’Union européenne, le président Erdogan accuse la Finlande (mais aussi la Suède, qui a demandé l’adhésion à l’OTAN au même moment que son voisin) d’accueillir sur son sol des militants kurdes membres du PKK, considéré comme une organisation terroriste en Turquie.

L’adhésion de la Finlande devra alors attendre

Ce n’est qu’après des mois d’atermoiements et de pourparlers que la Turquie lève son veto à l’adhésion du pays à l’OTAN le 18 mars 2023. La candidature de Stockholm, quant à elle, reste bloquée. Et le 4 mai 2023, la Finlande devient officiellement le 31ᵉ pays membre de l’Alliance.

Alors que l’OTAN était en 2019 « en état de mort cérébrale », selon les dires d’Emmanuel Macron, l’agression russe aura contribué à revivifier l’Organisation. Comme le déclare le président américain Joe Biden : « Vladimir Poutine voulait une finlandisation du continent. Au lieu de cela, il a eu une otanisation de l’Europe. »

Bien plus, c’est l’agression russe qui aura poussé les Finlandais dans les bras de l’OTAN. Rappelons que seulement 20 % de la population finlandaise était pour une intégration dans l’Alliance, contre plus de 80 % après le début du conflit.

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