Major Prépa > Ressource > Prépas littéraires : se rendre maître de l’idiome du khâgneux

La khâgne ce n’est pas que les livres et les concours, c’est aussi tout un lexique spécifique qui n’est pas sans laisser perplexe le novice. Des mots étranges, un peu pédants, avec des “k”, des “h” et des accents circonflexes partout… Qu’est ce que c’est que tout ce jargon ? Pas facile de s’y retrouver lorsque l’on n’est pas dans le milieu : une petite mise au clair s’impose.
Hypokhâgne, khâgne, khûbe, bikhâ
L’hypokhâgne (HK), très littéralement “la sous khâgne”, correspond à la première année de prépa et équivaut à une L1. Jusque-là tu suis à peu près, ça va. C’est une année qui te donne l’avant-goût de la khâgne, une mise en bouche, le petit bain avant le grand bain. C’est une année qui fait office de sas entre le lycée et la khâgne. Tu découvres les principales matières, le rythme de travail et la rigueur qu’exige la prépa. Cette année est encore indifférenciée entre khâgne classique et khâgne moderne – sur la différence entre les deux, nous y reviendrons un peu plus bas.
La deuxième année, la fameuse khâgne (KH) au cours de laquelle tu deviens “khâgneux” ou “khârré”, est une année au cours de laquelle tu devras te spécialiser dans une matière. En fonction des établissements tu auras plus ou moins le choix de spécialités – les classiques étant Histoire, Philosophie, Géographie, Lettres Modernes, Lettres Classiques. Tu peux avoir, dans certaines prépa, des choix plus variés : Anglais, voire théâtre, cinéma… Cette année est plus courte que la première en raison de l’échéance des concours (courant avril), elle passe donc très vite et le rythme y est plus soutenu qu’en hypokhâgne. Si en première année il n’y a pas de programme prédéfini, en khâgne les cours se font en fonction du programme imposé par l’ENS dans chaque matière.
La khûbe est une année supplémentaire que tu as la possibilité de faire si tu n’es pas satisfait(e) des résultats au concours après ta khâgne. Cette année, qui équivaut à une L3, est en général très profitable et épanouissante. A l’issue de cette troisième année, le “khûbe” peut postuler immédiatement en Master, elle ne fait donc pas perdre d’année universitaire (il est toutefois possible de repasser L3).
Enfin, la bikhâ. Le ou la bikhâ est un oiseau rare, mais ça existe. Il s’agit d’une quatrième année que tu peux faire si, en khûbe, tu n’as toujours pas eu les résultats attendus… Cependant cette option n’est pas vivement recommandée : trois ans de prépa suffisent et, surtout, elle te fait perdre une année universitaire (il n’y a pas moyen de passer directement en M2).
Pour info, ce sont les étudiants de prépa militaire qui nous ont donné, jadis, ce beau nom de “khâgneux”. Nos ancêtres littéraires, peu sportifs et trop occupés le nez dans les bouquins, auraient eu, dit-on, les genoux “cagneux”. C’est pourquoi leurs collègues plus sportifs leur ont donné ce joli sobriquet de “khâgneux”, avec cette orthographe sarcastique. Ou bien peut-être ce mot dérive-t-il du mot “cagne” synonyme de paresse ? Quoiqu’il en soit, les khâgneux ne sont pas des paresseux ; leur sport est intellectuel (et de haut niveau).
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Khâgne classique, khâgne moderne
En deuxième année la khâgne se divise en deux : la khâgne classique et la khâgne moderne. Et là, les choses se compliquent. L’une prépare à l’ENS Ulm, l’autre à l’ENS de Lyon. L’une fait dans l’ancien, l’autre dans le moderne (d’où le nom).
En khâgne classique tu dois obligatoirement faire une langue ancienne (PAS MORTE), latin ou grec ; la LVB n’est pas obligatoire et tu n’as pas de cours de géographie tronc commun, mais tu peux choisir la spécialité Géographie ou Histoire-Géographie (3h d’histoire couplées à 2h de géographie).
En khâgne moderne, pas de langue ancienne obligatoire, c’est une option. En revanche, la LVB et la géographie sont obligatoires.
Le piège étant que tu peux être en khâgne classique et suivre la spécialité Lettres Modernes (et là tu es perdu(e)). Cette spécialité est ce que l’on pourrait appeler vulgairement “spécialité Littérature”. On la nomme Lettres Modernes pour la différencier de la spécialité Lettres Classiques (latin et grec) que tu peux faire même si tu fais une khâgne moderne (oui ça fait tourner la tête). La spé Lettres Modernes (LM) étudie des textes modernes, la spé Lettres Classiques (LC) des textes anciens/antiques.
A lire : Témoignage : intégrer le master “Métiers de l’enseignement” à l’issue d’une khâgne
Admis, admissible, sous-admissible
En fin d’année de khâgne, tu passes les concours des ENS (Ulm et/ou Lyon). Début juin, les résultats d’admissibilité tombent. Trois possibilités : ou tu n’as rien, ou tu es sous-admissible, ou tu es admissible.
La sous-admissibilité t’est donnée par l’ENS si elle reconnaît que tu as un bon niveau même si tu ne fais pas partie des “meilleurs” candidats. C’est en quelque sorte un encouragement de la part du jury. Il s’agit des cent candidats qui suivent les admis, c’est donc le “Top 100”. Elle te permet de postuler en double licence à la fac et de valider automatiquement ta L2. Et, au passage, sur un CV, la sous-a ça fait toujours bien…
L’admissibilité… si tu l’as, tu fais partie des meilleurs candidats aux écrits. L’admissible passe ensuite les oraux des ENS en se rendant sur place, courant juin. Il y a peu de temps entre les résultats d’admissibilité et les oraux, d’où la nécessité de réviser toute l’année pour ces épreuves afin de ne pas se retrouver le bec dans l’eau.
Après l’épreuve des oraux, début juillet, ont lieu les résultats d’admission. Un nombre encore plus réduit de candidats sont déclarés “admis” à l’ENS. Cela veut tout simplement dire qu’ils sont acceptés dans le Saint des Saints. Ce seront des étudiants-salariés de l’ENS l’année prochaine.
Khôlle, Concours Blancs
Une khôlle est un exercice qui constitue l’essence même de la prépa. En effet, comment parler de la prépa sans évoquer ces fameuses khôlles qu’appréhendent tant les étudiant.es ? En AL tu auras une khôlle par matière à chaque trimestre. Ce sont des exercices oraux de 2 heures qui te préparent aux oraux des ENS mentionnés plus haut. Tu te présentes auprès de ton ou ta khôlleuse à l’heure et à la date fixées sur le “khôlloscope” pour tirer un sujet que tu prépares seul(e) pendant une heure trente. La dernière demi-heure, tu passes à l’action : tu présentes ton exposé pendant 20 minutes avant l’épreuve finale qui consiste à 10 minutes de questions/reprise. Conseil : prévois des mouchoirs pour la fin de ta khôlle.
Un Concours Blanc (CB) est une simulation des écrits de l’ENS. Durant l’année de khâgne, tu en auras généralement trois. Une épreuve par jour, toutes les matières y passent. Le but est de te mettre dans “l’ambiance” concours en enchaînant, sur une semaine, toutes les épreuves écrites. Exercice fatiguant, mais fort utile. A l’issue du CB, tu auras un classement avec tes notes. Cela te permettra de te situer dans la perspective des vrais concours qui arrivent plus rapidement qu’on ne le pense…
Et voilà ! tu connais les fondamentaux du jargon du khâgneux, tu es bon pour affronter la prépa AL à présent ! Bon khôurage khâmarade !