Tu es en prépa B/L, en CPGE ENS D1 ou D2 et tu cherches une fiche sur le transport aérien ? Alors ce compte-rendu de lecture est fait pour toi !
Introduction
Avec plus de 3 milliards de passagers transportés en 2022, l’aviation commerciale constitue aujourd’hui un moyen de transport largement répandu dans les pays développés et émergents. Pourtant, son essor apparaît relativement récent, porté par plusieurs révolutions depuis ses débuts il y a 120 ans. Au commencement, une révolution technologique avec l’introduction du moteur à réaction à partir des années 1950. Puis, une révolution réglementaire avec l’ouverture à la concurrence à partir des années 1980. L’essor du modèle low cost dans les années 1990 a également constitué une étape marquante dans le monde de l’aérien. Enfin, une révolution géopolitique avec la montée en puissance de nouveaux hubs, notamment au Moyen-Orient, depuis les années 2000. L’étude contemporaine de l’aérien apparaît donc aujourd’hui aussi complexe qu’essentielle.
Analyser, comprendre et expliquer le transport aérien : c’est la mission que se donne cet ouvrage particulièrement réussi d’Emmanuel Combe et de Paul Chiambaretto. Paru mi-août 2023, dans un contexte de reprise du trafic aérien commercial – les compagnies aériennes dans le monde ayant connu une forte activité cet été, leur période de pointe dans l’hémisphère Nord atteignant 95,6% des niveaux du même mois de 2019 d’après le rapport mensuel de l’Association internationale du transport aérien – cette étude complète et synthétique délivre au lecteur un panorama du fonctionnement, des évolutions et des défis auxquels est confronté le transport aérien. C’est la raison pour laquelle nous te proposons aujourd’hui une fiche de lecture reprenant les points clé de cet ouvrage qui te serons le plus utile aux concours. Tu pourras mobiliser les nombreux chiffres, théories, exemples et citations au sein de tes copies d’ESH. Bonne lecture !
L’évolution du transport aérien et ses différents impacts
Au début du XXème siècle, l’émergence du transport aérien moderne
1903-1944 : le temps des pionniers. L’année 1903 a profondément marqué le monde de l’aviation puisqu’elle aura vu les deux frères américains Orville et Wilbur Wright voler pour la première fois. Et la course fut lancée. La réussite des deux frères entraînait un sillage de nouveaux pilotes et concepteurs d’avions cherchant à aller toujours plus vite, toujours plus loin et toujours plus haut. Et les premiers résultats ne se font pas attendre : Louis Blériot traverse la Manche en 1909, Roland Garros traverse la Méditerranée en 1913, et Charles Lindbergh traverse l’Atlantique en 1927. L’ensemble de ces prouesses techniques mènera progressivement à l’apparition de vols internationaux et à la création de compagnies aériennes (KLM en 1919, Air France en 1933 ou encore Delta Airlines en 1925). Toutefois, l’avion restant un produit de luxe à cette époque, le transport aérien se développe principalement grâce au fret.
1944-1978 : l’émergence du transport aérien moderne. Il faut attendre la fin des années 1940 pour voir le transport aérien se développer. Le moteur à réaction a été l’une des principales innovations, adapté sur des avions civils, notamment sur les Boeing 737 et 747, ce qui aura un impact considérable sur l’expérience passagère. Comme l’expliquent les auteurs, ce développement important n’aurait pas pu voir le jour sans la constitution d’un véritable cadre légal international. La célèbre « Convention de Chicago » de 1944 posait ainsi les fondements des règles relatives au développement du transport aérien international (sécurité, droit de survol, etc.). Cette même convention a également permis la naissance de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), dépendante de l’ONU. L’ensemble de ces facteurs conduisent naturellement à un fort essor du trafic aérien, qui connaît une croissance annuelle de 10 % jusqu’à la fin des années 1970.
Depuis la fin des années 1970, libéralisation et concurrence bouleversent le secteur
1978-1997 : les prémices de la libéralisation du transport aérien. Dans la fin des années 1970, la libéralisation du transport aérien bouleverse le secteur. Signé par Jimmy Carter en 1978, l’Airline Deregulation Act conduit à l’ouverture à la concurrence de plusieurs routes sur le marché domestique. Concrètement, les compagnies aériennes américaines peuvent désormais desservir toutes les routes des États-Unis, en fixant librement leurs prix. Et la tendance ne tarde pas à suivre en Europe. Inspirés du même modèle, plusieurs paquets de règlements sont instaurés à partir de 1987, ouvrant progressivement le marché à la concurrence. Conséquence positive attendue de cette ouverture : le prix du billet d’avion chute, pour le plaisir des consommateurs. Ainsi, entre 1978 et le début des années 2000, le mouvement de libéralisation entraîne une division par plus de 2 du prix réel moyen d’un billet d’avion.
1997-2020 : le temps de la démocratisation du transport aérien. Afin de pouvoir survivre à la suite de l’arrivée de nouveaux acteurs, certaines compagnies aériennes, historiquement protégées par le cadre légal, nouent des alliances ou fusionnent. En Europe, sur les routes court/moyen-courriers (4h de vol maximum), les compagnies aériennes historiques subissent la concurrence des compagnies à bas coûts (Ryanair, Easyjet). Ces dernières voient d’ailleurs leurs parts de marché augmenter d’année en année, celles-ci représentant en 2019 près de 40 % du marché européen. Sur les vols long-courrier, la concurrence vient majoritairement de l’arrivée des compagnies du Golfe proposant des prix plus faibles que ceux proposés par les compagnies aériennes européennes, mais une prestation de supérieure ou égale. Ainsi, à la veille de la crise de la Covid-19, c’est près de 4,5 milliards de passagers qui avaient pris l’avion en 2019.

2020 : crise sanitaire, panique à bord
Rien ne semblait pouvoir arrêter la croissance du trafic aérien. Et pourtant, la pandémie de Covid-19, commençant en 2020, a marqué un véritable coup de frein brutal et inédit au sein du secteur. L’activité aérienne se contracte alors de plus de 95 % pendant plusieurs mois, et le nombre de passagers transportés dans le monde en 2020 diminue de près de 60 % en un an. C’est le plus gros choc qu’a subi le secteur aérien depuis la Seconde Guerre mondiale.
Contraintes de ne plus voler pendant les confinements, les compagnies aériennes voient leur santé financière fragilisée. Mais certaines compagnies sont plus impactées que d’autres. Les compagnies à bas coût sont même parvenues à résister à la crise. Certaines d’entre elles ont une structure de coût comprenant de faibles coûts fixes comparativement aux coûts variables, ce qui leur à permis de réduire plus fortement leurs dépenses pendant les mois de confinement, tout en profitant de la reprise du trafic, car leur réseau est essentiellement intra-européen, et que les premiers vols à avoir repris sont ceux de moins de 4 heures. Grandes gagnantes de la crise, les compagnies à bas coûts pourraient même voir leurs parts de marché croître encore plus fortement dans les prochaines années.
Les déterminants de l’évolution du transport aérien
Le niveau de vie
Dans cette partie, Emmanuel Combe et Paul Chiambaretto se posent la question des facteurs influant sur l’évolution du trafic aérien. D’une part, ils mettent en évidence l’importance de la croissance économique et du PIB par habitant. En effet, le volume de passagers transportés dépend d’abord de la richesse du pays. En ce sens, on suppose que plus un pays est riche plus ses habitants prennent l’avion, le transport aérien étant considéré comme un bien supérieur. Et les chiffres ne trompent pas : à Singapour, le nombre de voyage par habitant est de 4,6 par an, contre seulement 0,03 par an au Togo.
Ainsi, pour les auteurs, deux effets se distinguent quant au rôle de la richesse du pays sur la croissance du trafic aérien :
- Un effet volume, induisant que le PIB peut augmenter parce que la population du pays augmente. Gillen et al. (2008) ont ainsi démontré que l’élasticité du trafic aérien à la population varie entre 0,5 et 1,8, aux USA.
- Un effet de richesse, induisant que si la production du pays augmente plus vite que sa population, la richesse par habitant augmente, ce qui peut conduire la population à voyager plus. Et cela s’observe en particulier dans des pays émergents, comme la Chine. Le PIB/Habitant a fortement augmenté avec le temps : il était de 1 050 $ en 2001 et a atteint 12 500 $ vingt ans plus tard, soit une multiplication par 12. Cette hausse du niveau de vie des Chinois a conduit à une croissance de 8 % du trafic aérien sur le marché domestique.
Lire aussi : CPGE ENS D1/D2 : symptômes et remèdes de la maladie hollandaise en économie
Le prix du billet
Le prix du billet est le second facteur économique influant sur l’évolution du trafic aérien. C’est assez prévisible, mais lorsque le prix moyen du billet diminue, le nombre de passagers transportés devrait augmenter, et inversement. Les auteurs démontrent que la croissance du transport aérien dépend fortement et positivement du PIB (+1,30) et négativement du prix du billet (– 0,67). Cela signifie que, dans un modèle à deux variables, le PIB explique les deux tiers de l’évolution du trafic aérien dans le monde, et le prix du billet le tiers restant.
Le véritable enjeu demeure celui de savoir quelle est l’élasticité-prix de la demande, autrement dit la sensibilité de la demande à une évolution du prix du billet. De nombreuses études se sont donné pour mission de calculer cette élasticité-prix de la demande. Et trois conclusions apparaissent en priorité :
- L’élasticité-prix est toujours plus forte pour la clientèle de loisirs que pour la clientèle d’affaires, quelle que soit la longueur du vol. Elle est de 1,52 pour la clientèle loisirs sur le moyen-courrier, ce qui signifie qu’une baisse de 1 % du prix du billet entraîne une hausse de la demande de 1,52 %. Pour la clientèle d’affaires, l’élasticité-prix est de 0,7, ce qui signifie qu’une baisse des prix de 1 % n’entraînera qu’une hausse de la demande de 0,7 %.
- L’élasticité-prix est plus forte sur le moyen-courrier que sur le long-courrier, quel que soit le motif de voyage. Cela est dû au fait qu’il existe d’autres alternatives à l’avion sur les vols nationaux (tels que le train).
- L’élasticité-prix varie selon les régions du monde. À ce titre, elle est de 1,96 en Europe du fait de la forte concurrence entre compagnies low cost et compagnies historiques, contre seulement 0,9 en Afrique subsaharienne.
Le rôle des substituts au transport aérien
Au sein de cette partie, les auteurs démontrent que la demande de transport aérien est aussi influencée par l’existence de substituts au transport aérien. Et il en existe deux principaux : le TGV… et la visioconférence.
Proposant des trajets pour des prix équivalents ou parfois moins élevés que ceux de l’avion, le TGV est devenu un vrai concurrent pour les compagnies aériennes sur les trajets domestiques ou certains trajets internationaux. Le TGV domine la demande, au détriment de l’avion, à partir du moment où le temps de trajet en train est inférieur à 2h30. Le train et l’avion s’affrontent sur les trajets fluctuants entre deux heures trente et quatre heures en train (Ex : Paris-Marseille). Enfin, lorsque le temps de trajet dépasse 4h, c’est l’avion qui gagne en compétitivité (ex : Paris-Nice – 6h de train contre 1h d’avion).
Cette substituabilité entre l’avion et le train se mesure via l’élasticité-prix croisée, qui met en exergue l’impact de la variation de prix d’un produit A (ici, le train) sur la demande d’un produit B (ici, l’avion). Quand l’élasticité-prix croisée est positive, ont dit que les deux produits sont substituables, de manière à ce que lorsque le prix de l’un augmente, il y a un report de la demande vers l’autre produit. Par exemple, Hortelano et al. [2016] ont montré que, sur le marché espagnol, une augmentation de 1 % du prix du TGV augmente de 0,69 % la probabilité de choisir l’avion sur une route équivalente.
Conclusion
C’est sur ce point que s’achève la première partie de cette fiche de lecture. Nous espérons qu’elle t’aura permis de cerner les grands enjeux du transport aérien en économie et d’appréhender sereinement ce sujet complexe et d’actualité. Tu pourras ainsi utiliser cet exemple afin d’illustrer les effets et enjeux de l’aérien sur l’économie, mais également afin d’illustrer les différentes stratégies de tarification. Pour lire la seconde partie de la fiche de lecture, c’est juste ici !
N’hésite pas à consulter les articles d’économie des prépas ECG ainsi que ceux du pôle littéraire. Nous continuerons à te proposer des articles en lien avec les prépas ENS D1 et D2, alors reste connecté(e) !