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La guerre en Ukraine a exposé le rôle clé de l’énergie en Russie, particulièrement dans l’exportation de gaz et pétrole à destination de l’Europe. Néanmoins, dans un monde de plus en plus concerné par le changement climatique, la dépendance de la Russie aux énergies fossiles pourrait devenir un fardeau plutôt qu’une chance.

L’énergie en Russie : une chance pour le pays

Contexte historique et géographique

La Russie s’appuie depuis longtemps sur son territoire et ses ressources, notamment énergétiques, pour trouver sa place au sein de l’échiquier géopolitique. Déjà à l’époque de l’URSS, le régime communiste s’appuyait sur ses riches ressources en gaz et charbon pour maintenir son économie et affirmer sa place.

Avant la guerre en Ukraine, la Russie se plaçait dès lors comme un géant énergétique. Elle était le premier pays fournisseur de gaz naturel pour l’Union européenne (40 % des importations), le deuxième fournisseur de pétrole (avec 20 % des importations). Ce taux de dépendance énergétique variait cependant entre les pays. Par exemple, des pays comme la Slovaquie ou les pays baltes étaient presque entièrement dépendants (80 %), tandis que les pays d’Europe occidentale gardaient une certaine indépendance (24 % en France).

De nouveaux partenariats

Si la Russie a réussi à faire de ses ressources énergétiques le pilier de son économie, elles sont aussi devenues un des piliers de la diplomatie russe, au travers d’accords passés avec de nouveaux alliés. Ainsi, la Russie se sert principalement de deux entreprises d’État, Gazprom (dirigée par Alexeï Miller) et Rosatom (développement du nucléaire civil), pour assurer ses nouveaux partenariats. Parmi ceux-ci, on peut citer :

  • Juin 2023 : Rosatom investit près de 600 millions de dollars dans les mines de lithium en Bolivie.
  • Partenariat avec la Chine : Gazprom, suite au quasi-arrêt de ses activités en Europe, se tourne vers la Chine. En septembre 2023, une première livraison de gaz a eu lieu via l’Arctique.
  • Octobre 2023 : Rosatom s’apprête à construire une centrale nucléaire au Burkina Faso et au Mali, après avoir conclu un autre accord avec l’Égypte. Aujourd’hui, sur le continent africain, seule l’Afrique du Sud possède une centrale nucléaire.

Mais qui se transforme aussi en malédiction

Un objet de conflits

La Russie, forte de ses ressources indispensables à ses nombreux voisins, n’hésite pas à les utiliser comme arme de chantage. Depuis 2000 se sont déroulées régulièrement entre la Russie et ses voisins des guerres du gaz, qui peuvent conduire à des interruptions d’approvisionnement en gaz. Par exemple, en 2005, peu après la révolution orange de 2004, l’Ukraine, qui bénéficie de prix avantageux du gaz du fait de son ancienne appartenance à l’URSS, se voit sommée par Moscou de payer son énergie au prix du marché européen.

La Russie a aussi eu recours à des cyberattaques massives sur les réseaux électriques ukrainiens (virus NotPetya en juin 2017). Tout ça grâce à l’entreprise Gazprom, bras armé du Kremlin. Après la révolution pro-européenne de la place Maïdan en 2014 en Ukraine, Poutine avait décidé d’isoler Kiev en lançant le projet Nord Stream 2.

La guerre en Ukraine

La guerre en Ukraine a permis de faire prendre conscience à l’Europe de son extrême dépendance au gaz russe, entraînant dès lors une crise énergétique sans précédent. Pour ce qui est de la Russie, qui a vu ses clients européens cesser toute collaboration, elle se tourne en particulier vers la Chine.

Elle annonce en 2022 la construction de Force de Sibérie 2 qui va venir se rajouter au Force de Sibérie 1 construit après « l’accord du siècle » en 2014 entre Gazprom et le pétrolier chinois CNPC à la suite des sanctions occidentales pour condamner la prise de la Crimée. Néanmoins, il demeure que l’entreprise Gazprom est en grande difficulté, avec un bénéfice quasi divisé par huit depuis le début de la guerre.

Un exemple à exploiter : les gazoducs Nord Stream 1 et 2

Un projet qui renforce la dépendance européenne au gaz russe

Ce gazoduc doit rallier les côtes russes aux côtes allemandes en passant par la mer Baltique et doubler ainsi les capacités de livraison du Nord Stream 1, effectif depuis 2012.

Il doit permettre de contourner les pipelines terrestres installés en Europe de l’Est.

Une Europe divisée

Le Danemark n’a autorisé que fin octobre que le gazoduc traverse ses eaux territoriales. La Pologne a infligé une amende à Gazprom pour avoir lancé la construction du gazoduc sans son accord.

Les relations entre l’Allemagne et la Russie se sont tendues après l’affaire Navalny en août 2020, et l’Allemagne a durci le ton et menacé de prendre des sanctions.

Un usage du droit d’extraterritorialité, nouvelle arme de guerre économique qui déstabilise les entreprises européennes

Les États-Unis, grands rivaux de la Russie et fournisseurs eux aussi de gaz, ont menacé de sanctionner les entreprises européennes qui participent à la construction du Nord Stream 2. Ce qui a déjà poussé quelques entreprises à quitter le projet.

Olaf Scholz a bloqué la procédure d’homologation du gazoduc après l’invasion russe en Ukraine

Le gazoduc, achevé à l’automne 2021, ne peut donc pas être mis en service et est finalement abandonné. Nord Stream 2 aurait fait passer la dépendance allemande au gaz russe de 55 à 70 %.

Fuites de gaz en septembre 2022

Des fuites de gaz sont repérées en mer Baltique et, rapidement, des sabotages sur Nord Stream 1 et 2 sont signalés. Même s’ils étaient fermés, il restait du gaz dans les conduites et cela va avoir des effets néfastes sur l’environnement.

Un rapport des États-Unis en 2023 suggère qu’il s’agissait sûrement des agissements d’un groupe pro-Ukraine, sans lien avec le gouvernement.

Aubaine pour le gaz de schiste américain

Ouverture à Wilhelmshaven du premier terminal flottant de GNL en décembre 2022. Six autres doivent ouvrir d’ici fin 2023, marquant ainsi une véritable volonté de prise d’indépendance de l’Allemagne vis-à-vis de la Russie. Les sept terminaux de gaz naturel devraient permettre d’assurer 1/3 des besoins annuels de l’Allemagne en gaz.

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