Les aéroports constituent un moteur de la mondialisation. Véritable porte d’entrée des territoires, ils polarisent les flux et permettent d’accéder du proche au lointain, donc d’opérer une articulation à plusieurs échelles. Devenus un enjeu de pouvoir géopolitique non négligeable, il convient alors de les étudier en détail !
Introduction
Avant de débuter, petit mode d’emploi pour les préparationnaires. Cet article sera fortement utile pour tout sujet en rapport avec les transports, les communications ou même, plus généralement, la mondialisation. Il constitue une étude de cas originale à utiliser dans un grand nombre de situations.
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Définition
Si l’on suit la définition classique, un aéroport désigne l’organisme qui gère l’ensemble des installations (aérodrome, aérogare, atelier) nécessaires au trafic aérien. De taille variable, un aéroport peut être privé (particulier, armée) ou public.
Ce qui nous intéresse ici, ce sont davantage les hubs (noyau pivot d’un système de transport), c’est-à-dire ces aéroports de taille mondiale qui ont un rôle non négligeable dans le processus de mondialisation.
Pourquoi sont-ils si importants ?
Un rôle majeur dans les mobilités
Selon le géographe Jean-Baptiste Frétigny, l’aéroport est « le vecteur par excellence de la circulation humaine à l’échelle planétaire, témoignant de l’importance de “l’aéromobilité” dans les pratiques, mais aussi dans les normes et dans l’imaginaire des mobilités mondialisées ». Ainsi, on l’a compris, les aéroports ont un impact non négligeable dans les mobilités, particulièrement à l’échelle supranationale.
Davantage que les ports, ils constituent de véritables portes d’entrée (Gateway) et de sortie des territoires. Ce rôle leur donne le statut d’être un point frontière des pays. Par conséquent, il incombe aux aéroports de mettre en place une surveillance étroite et un contrôle accru afin de détecter les entrées irrégulières, les trafics illicites ou bien même prévenir la diffusion de risques sanitaires.
Enfin, les aéroports ne sont finalement que le reflet du cosmopolitisme des populations. Grâce à la rapidité du transport aérien, ces derniers rendent pratiquement n’importe quelle partie du monde accessible en un temps réduit. Ils remettent alors en cause la distinction géographique du proche et du lointain, et favorisent le voyage, l’échange.
Une composante importante du soft power
Pour les nations, les aéroports internationaux sont également un marqueur de puissance. Ils sont en général la première image que se fait chaque étranger en arrivant dans le pays. Ainsi, les grands terminaux aéroportuaires font partie des gestes architecturaux contemporains les plus convoités au monde, au même titre que les tours des centres d’affaires. C’est par exemple le cas du terminal de Barcelone, signé par le starchitecte Ricardo Bofill.
Par ailleurs, le gigantisme des installations aéroportuaires conduit à une multiplication des fonctions hébergées. Entre les centres médicaux, les espaces de congrès et/ou d’hôtellerie, les espaces de bureaux, les lieux de culte ou bien les musées comme à Amsterdam, les hubs sont en concurrence croissante pour attirer toujours plus de voyageurs (particulièrement en transit).
D’un point de vue plus économique, les aéroports ne se limitent pas seulement au transport de passagers, mais également à l’acheminement de marchandises. Il est en effet estimé que le fret aérien ne représente que 2 à 3 % du trafic international de marchandises en volume, mais près de 30 à 40 % en valeur.
L’aéroport et la métropolisation
Un concept clé : « l’aérotropolis »
Développé par John Kasarda dans les années 2000, l’aérotropolis désigne une vaste région cosmopolite et ouverte sur le monde concentrée autour d’un grand aéroport. Ces villes sont en quelque sorte des « edge cities » (c’est-à-dire des villes lisières), dont l’influence et l’importance sont mises en exergue par les flux aériens. Pour le citer, ce dernier estimait que : « Les aéroports dessineront le développement urbain et l’implantation des entreprises au XXIe siècle comme l’ont fait les autoroutes au XXe, les chemins de fer au XIXe et les ports au XVIIIe siècle. » On pourrait citer à cet égard l’exemple les villes de Memphis, Chicago, Dubaï, Bangkok.
Toutefois, ce concept a des limites. Effectivement, les effets d’entraînement des infrastructures aéroportuaires n’ont rien de systématique. Certaines collectivités – notamment européennes – ont en effet massivement investi dans ces infrastructures, sans qu’advienne pour autant le développement espéré.
Ainsi, il paraît donc assez clair que les aéroports constituent « une tête de pont de la métropolisation », pour paraphraser J.-B. Frétigny. Ces derniers, grâce aux flux qu’ils polarisent, aident les villes et les métropoles à s’inscrire dans l’AMM (archipel métropolitain mondial) d’Olivier Dollfus et, par extension, à s’intégrer dans la mondialisation. Néanmoins, les aéroports restent un outil nécessaire, mais pas suffisant pour qu’une ville rayonne à l’échelle mondiale.
Des problèmes qui persistent aux échelles locales
Bien que vecteur d’un grand nombre d’externalités positives pour les pays et pour les territoires, les aéroports peuvent également être source de nombreux inconvénients. Particulièrement pour les collectivités locales.
La première difficulté provoquée de manière directe par les aéroports concerne le bruit. En effet, le décollage, l’atterrissage et le passage à basse altitude des avions provoquent une nuisance sonore importante. Cela vient donc directement impacter les populations locales dans leur qualité de vie quotidienne, mais a aussi des conséquences économiques. Les actifs (maisons, appartements…) des ménages à proximité des routes aériennes se retrouvent en effet fortement dépréciés. La France a toutefois essayé de pallier ce problème par l’intermédiaire d’un Plan d’exposition au bruit (PEB) ou d’un Plan de gêne sonore (PGS).
En outre, la volonté des acteurs nationaux et mondiaux (États, FTN), motivés par un arrimage à l’AMM et une intégration accrue à la mondialisation, peut s’opposer à celle des populations locales. Ce fut par exemple le cas du projet de construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, à proximité de Nantes. Ce dernier a provoqué des manifestations de grande envergure et le projet a été contraint d’être mis à l’arrêt.
Enfin, le transport aérien est de plus en plus soumis à un phénomène de saturation des routes aériennes. Il est en effet estimé que 6 % des 9 000 routes supportent la moitié du trafic et que 25 aéroports polarisent ¾ des flux. Par ailleurs, il convient également de pointer du doigt la dépendance de l’industrie aérienne à la consommation de pétrole, sans oblitérer son coût environnemental très important.
Conclusion
Il paraît donc indéniable que les aéroports apparaissent comme un véritable symbole de la mondialisation. Ce « lieu qui concentre de l’étendue », selon Jean-Claude Gray en 1992, a néanmoins bien plus que le rôle purement fonctionnel de polariser les flux mondiaux.
Les aéroports ont par ailleurs une dimension symbolique : rendre accessible à partir d’un point fixe n’importe quelle partie du monde en un temps réduit. Ils facilitent alors l’entrée vers d’autres cultures et expériences, et reflètent finalement l’étendue et la complexité des relations humaines dans un monde fortement mondialisé.
Prospective
Selon l’OACI (Organisation de l’aviation civile internationale), les transports aériens ont représenté, en 2023, 2 à 3 % des émissions mondiales de CO2 et 5 % du réchauffement climatique. Alors que les alternatives aux énergies fossiles ne semblent pas encore voir le jour et qu’un changement des habitudes de transport commence à se faire sentir (surtout depuis la crise de la Covid-19), ces chiffres interrogent la place des aéroports dans les décennies à venir.
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