Le début de la guerre en Ukraine a tendu les relations entre l’Union européenne et la Russie, atteignant presque un point de non-retour. Alors qu’à la chute de l’URSS, la Russie se dressait comme un pays pleinement européen, le virage des années 2000, avec l’arrivée de Vladimir Poutine, voit la Russie se transformer pour devenir non plus un partenaire, mais une force alternative à l’Europe.
Une Russie tournée vers l’Europe
Période pré-soviétique
La Russie entretient des liens forts avec le continent européen, de par sa position géographique et son histoire culturelle. Du temps de l’Empire, cette idée d’une Russie européenne et d’adoption du mode de vie européen est amenée par Pierre Ier au XVIIIe siècle, au travers de diverses mesures et réformes (adoption d’une armée régulière, d’habits à l’européenne).
C’est ainsi que la nouvelle capitale, Saint-Pétersbourg, construite en 1703, se fait la « fenêtre sur l’Europe » en Russie. Ses successeurs perpétueront son héritage, notamment au travers du développement de la culture française à la Cour.
Pendant l’URSS : alliances et rivalités
Cette européanisation de la Russie est coupée court avec la chute de l’Empire et la naissance de l’URSS en 1922. Dès lors, l’idéologie soviétique prend le pas, l’homme soviétique devient le nouveau modèle à suivre. Il convient de remarquer que malgré ce changement du côté sociétal et culturel, au niveau des relations internationales, l’URSS continue d’entretenir ses alliances avec le reste de l’Europe. Lors de la Seconde Guerre mondiale, c’est au côté du Royaume-Uni et contre l’Allemagne nazie que l’URSS se bat.
La guerre froide vient cependant tendre les relations entre l’URSS et l’Europe, créant dès lors deux camps opposés, et une Europe déchirée.
Les années 2000 : la construction d’un partenariat
Alors qu’en 1991, l’URSS s’effondre, la CEE puis l’Union européenne viennent soutenir le processus de transition de la Russie et de l’Europe de l’Est. Le programme TACIS, mis en place en décembre 1991, a pour bénéficiaire principal la Russie et permet un développement du secteur privé et une réforme institutionnelle, juridique et administrative.
En 1994, l’Accord de partenariat et de coopération (APC) met en place deux sommets annuels entre l’Union européenne et la Russie, pour permettre à terme la mise en place d’une zone de libre-échange entre les deux entités. Au niveau économique, l’Union européenne devient le partenaire économique le plus important de la Russie, notamment au niveau de l’énergie (74 % des exportations de gaz naturel, à destination en particulier de l’Allemagne et des pays baltes).
Une rivalité Union européenne-Russie
Les ambitions russes
Depuis la guerre froide et malgré le rapprochement de la Russie et de l’Union européenne, des tensions demeurent. Notamment dans le jeu d’influence que ces deux entités entendent mener sur le continent.
Sur la sécurité européenne, l’OTAN prévaut, ce qui pour la Russie est vu comme une menace de son influence. Ainsi, cette dernière s’oppose à l’élargissement de l’OTAN dans sa sphère d’influence, notamment en Géorgie et en Ukraine. Les exercices menés en Pologne par l’organisation internationale, tout comme l’installation de systèmes américains antimissiles, viennent approfondir cette animosité.
Au niveau géopolitique, la Russie entend se poser comme une alternative à l’influence européenne. Que ce soit en Afrique ou en Asie, la Russie veut proposer un nouveau modèle, un modèle « anticolonialiste », jouant sur l’héritage controversé des colonisations européennes. On peut citer la création des BRICS, comme une force alternative, ou la récente politique russe de rapprochement avec le continent africain, au sein des sommets Russie-Afrique. Ces nouvelles initiatives ont comme origine avant tout la perte du monopole russe sur l’espace post-soviétique, qui s’est rapproché de l’Union européenne.
Le choc de la guerre en Ukraine et ses conséquences
Les tensions entre la Russie et l’Ukraine sont anciennes, provenant d’une histoire commune et de multiples crises entre les deux pays. Historiquement, l’Ukraine est le bassin de naissance de l’Empire russe, son territoire faisant partie de l’ancienne Russie. Sous l’URSS, elle est pleinement intégrée à la sphère d’influence soviétique et est considérée comme une chasse gardée.
C’est dans les années 2000 que les ambitions ukrainiennes vont commencer à aller à l’encontre de celles de la Russie. En 2014, les manifestations pro-européennes de la place Maïdan viennent déstabiliser le pouvoir, poussant le président pro-russe, Ianoukovitch, à fuir en Russie. Bien que l’opposition prenne le pouvoir avec le nouveau président pro-européen, Porochenko, la Russie intervient militairement en Crimée, résultant en son annexion en mars 2014.
Depuis l’annexion de la Crimée, les relations avec l’Union européenne sont fracturées : mise en place de sanctions diplomatiques (pas de reconnaissance de la Crimée russe), économiques (embargos sur importations et exportations d’armes), politiques (gel des avoirs de personnalités russes). Du côté russe, on trouve des sanctions similaires à l’encontre de l’Union européenne : embargo sur les produits agroalimentaires… La guerre enclenchée par la Russie en février 2022 porte un nouveau coup aux relations avec l’Europe. Alors que l’Union européenne prend la défense de l’Ukraine, notamment avec l’envoi d’armement et un financement massif, la Russie développe un axe anti-occidental. La rupture semble aujourd’hui définitive.
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