En cette période de révisions, il est très utile de s’entraîner un maximum à la méthodologie de la dissertation. Voici une proposition d’analyse du sujet ESCP 2012 : Les zones d’intégration régionale : étapes ou alternative du processus de mondialisation ?
L’analyse du sujet
Méthodologie
Tout d’abord, on a ici deux notions qui semblent s’opposer, ou qui pourraient être articulées. On peut penser à la première option puis à l’autre individuellement, avant de les lier dans le plan :
- L’intégration régionale pouvant être perçue comme un tremplin à la mondialisation
- Ou comme une autre manière d’exercer la mondialisation
- Une articulation entre les deux
De plus, ce sujet ne précise pas les bornes chronologiques, il convient de réfléchir à quand débuter notre analyse. Plusieurs points de départ sont possibles tant qu’ils couvrent l’histoire récente de la mondialisation. Par exemple, on peut commencer notre analyse à partir de l’après-Seconde Guerre mondiale, durant laquelle l’intégration régionale a fleuri.
La thématique
Le sujet abordé ici est l’intégration régionale, un thème central du programme, tant en première qu’en deuxième année. Par ailleurs, le thème de la mondialisation est bien entendu omniprésent dans le programme et nécessaire dans ce sujet.
Définition des termes du sujet
Intégration régionale : mise en place d’organisations, d’accords au sein d’une région pour intégrer différents pays, acteurs et territoires au sein d’un même système afin de développer les échanges dans un contexte de mondialisation
Étape : des phases ou des stades successifs dans un processus de développement, de progression ou de réalisation d’un objectif, en l’occurence la mondialisation
Alternative : une option ou une possibilité différente de celle qui est actuellement envisagée ou mise en œuvre. Il s’agit d’une solution de remplacement ou d’un choix différent qui offre une autre approche ou une autre perspective par rapport à la situation actuelle
Mondialisation : accroissement des flux qui mène à une mise en concurrence des territoires qui aboutit à une transformation des marchés ainsi qu’à un arbitrage et une convergence des prix
Une définition intéressante bien que non présente dans les termes du sujet est la définition de la régionalisation. Cette dernière est la mise en place d’une zone de libre-échange ou du moins d’une diminution des entraves commerciales et financières pour accroître les échanges économiques. Il s’agit aussi d’un lieu de discussion et de débats géopolitiques.
Problématique possible
Alors que l’intégration régionale semble favoriser l’essor de la mondialisation, peut-on la considérer comme une option de remplacement, au regard des arguments des antimondialistes qui plaident en faveur d’une régulation économique plus stricte et d’une orientation protectionniste ?
Proposition de plan détaillé
Introduction
Ici, il faut poser les premières interrogations sur l’intégration régionale et le régionalisme économique : sont-ils un marche-pied pour apprendre la mondialisation ou une nouvelle forme de mondialisation ?
Il est également intéressant de noter ce que préconisent les antimondialistes : pour résoudre les excès de la mondialisation libérale, le régionalisme permet d’éviter une trop forte dépendance et de mieux réguler la mondialisation. On peut notamment relier cela au protectionnisme.
I. Les zones d’intégration régionale ont d’abord été créées comme un marche-pied de la mondialisation
A. Les zones d’intégration régionale permettent l’accroissement économique et une première mise en concurrence des territoires
- ASEAN (1967) pour contrecarrer la montée en puissance de la Chine. Pour les “tigres asiatiques”, cette intégration régionale participe à une NDIPP (nouvelle division internationale du processus de production)
B. Une étape dans le libre-échange : apprendre le libéralisme de la mondialisation
- Le Mercosur est une étape de la mondialisation en qu’il crée un marché commun en Amérique latine pour diminuer les droits de douane et augmenter les échanges commerciaux, économiques et financiers
- D’autres exemples sont éloquents : l’Unasur, la CEDEAO ou l’UA
C. L’intégration régionale entre émergences et coopérations, des piliers de la mondialisation
- Par exemple, on peut évoquer le RCEP, un accord d’intégration type ancien (au niveau économique notamment, incluant peu d’environnement), ce qui permet de contrer les EtatUnis et le TPP
II. Mais parfois, certains projets, plus approfondis, aboutissent à une réelle alternative à la mondialisation libérale
A. L’intégration régionale pour aboutir à une “convergence des normes” (mais aussi imposer une vision de la mondialisation, reposant sur la démocratie et les droits des hommes)
Un des exemples les plus parlants pour cette partie est l’Union européenne. “Le monde a besoin de l’UE pour civiliser la mondialisation” : plutôt qu’une alternative ou une étape pour Pascal Lamy, l’UE est, par sa puissance normative (Zaki Laidi) une manière de diriger, de gouverner la mondialisation, de mettre en place une gouvernance juste, équitable avec des valeurs comme la liberté, l’égalité et la protection des consommateurs
Il s’agit également de l’intégration régionale la plus aboutie dans le monde avec la mise en place d’une Union économique et monétaire (l’euro depuis 1999).
B. Une volonté de s’écarter de la mondialisation pour sortir de la tutelle américaine
On peut parler ici de l’ALBA (2004), cette initiative anti-impérialiste du Venezuela et de Cuba. Néanmoins, par cette forme d’intégration régionale, ce sont les mêmes principes que la mondialisation qui régissent ce projet, autrement dit le développement du libre-échange et la coopération.
C. Les zones d’intégration régionale : le lieu de concurrences pour imposer sa vision de la mondialisation
L’exemple d’ALENA et de l’ACEUM avec la réforme de 2019 illustre ce phénomène. Il existe une forte concurrence entre le Canada / le Mexique – qui voulaient mieux protéger les droits intellectuels par exemple – et les États-Unis. Cependant, le poids de l’ACEUM est très inégalitaire pour les différentes parties prenantes : pour le Canada, l’absence d’ACEUM ferait perdre 2,6% du PIB alors que les Etats-Unis ne perdrait que 0,4%. Ces chiffres témoignent du rapport de force qui caractérise la mondialisation même.
III. Toutefois, ces projets plus ou moins altermondialistes ne peuvent être considérés sans les autres zones d’intégration régionale
A. L’insuffisance des zones d’intégration régionale qui ne peuvent être autonomes
L’interdépendance des zones d’intégration régionale est croissante, comme le montre l’exemple de l’ASEAN + 6 : il est nécessaire d’avoir des partenariats avec des puissances régionales et mondiales.
B. Des projets d’intégration régionale : des échecs qui n’ont pas permis d’apprendre la mondialisation
On peut penser à plusieurs exemples :
- SAARC : un échec car 90% des échanges s’effectuent en dehors de la zone pour les pays concernés
- Processus de Barcelone : échec en raison de la faible intégration
- Union du Maghreb Arabe : resté à l’état de projet. Plus de réunion depuis 1994. Blocage dû aux tensions géopolitiques dans le Sahara occidental.
C. La possibilité d’une nouvelle mondialisation qui repose sur le régionalisme prôné par les partisans d’une autre mondialisation
- Des motivations à la fois environnementales et sociales pour les anti mondialistes
- Les problèmes de la mondialisation et d’une trop forte dépendance ont pu être démontrés lors de la crise covid.
- La NDIPP, à travers l’intégration régionale, permettrait d’obtenir une plus faible dépendance et de fait les sorties de crise seraient plus aisées.
Conclusion
En définitive, l’analyse des zones d’intégration régionale dans le cadre du processus de mondialisation met en lumière une articulation complexe entre logiques régionales et logiques globales. Si ces zones peuvent constituer des étapes vers un monde plus intégré, elles peuvent également représenter des alternatives à la mondialisation, mettant en avant des logiques de protectionnisme ou d’affirmation d’identités régionales.
N’hésite pas à consulter toutes nos ressources géopolitiques