BRICS

L’émergence des Suds, notion incontournable en géopolitique, fait référence à l’essor économique et politique des pays en développement, principalement situés dans l’hémisphère sud. Pour comprendre si cette émergence est une réalité tangible ou un simple fantasme, tu retrouveras dans cet article les données économiques, les défis politiques et sociaux, ainsi que les enjeux environnementaux essentiels à la compréhension de ce phénomène. Voici une carte qui récapitule les éléments principaux à retenir sur ce sujet.

Carte

Émergence des Suds

Légende émergence des Suds

Introduction

Depuis plusieurs décennies, le monde assiste à un bouleversement des équilibres géopolitiques. On parle toujours plus de « l’émergence des Suds », une expression qui englobe à la fois l’ascension économique, mais aussi stratégique, des pays en développement.

À ce titre, tu peux citer Carl Oglesby lorsque tu évoques le « Sud Global » puisqu’il a été le premier à évoquer ce terme en 1969 dans le journal catholique Commonweal pour caractériser un ensemble de pays en proie à la « domination » du Nord Global par l’exploitation politique et économique.

À travers cette carte et cet article, nous allons voir ce que cache réellement ce terme. S’il s’agit d’une véritable redistribution des cartes sur l’échiquier mondial ou plutôt d’un fantasme entretenu par les espoirs d’une revanche économique et sociale.

La réalité de l’émergence des Suds

Certains chiffres attestent incontestablement d’une émergence du Sud Global.

La Chine est récemment devenue la seconde économie mondiale avec un PIB de 18 300 milliards de dollars en 2023. Elle dépasse ainsi son rival nippon en 2010 et projette même de dépasser les États-Unis d’ici quelques décennies afin de se hisser au rang de première puissance mondiale. Le pays est d’ailleurs aujourd’hui le premier exportateur mondial et constitue un marché incontournable pour les industries du monde entier.

L’Inde, avec un taux de croissance de 7,2 % en 2022, a dépassé le Royaume-Uni et devient désormais la cinquième puissance économique (PIB de 3 500 milliards de dollars). Tu peux également citer le PIB indonésien qui prévoit d’atteindre 1 300 milliards de dollars d’ici 2025, consolidant davantage sa position de géant économique en Asie du Sud-Est.

Mais ces pays ne se contentent pas de croître économiquement, tant ils prennent de plus en plus de place sur la scène politique et diplomatique. Les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique, Asie du Sud et désormais Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Égypte, Iran et Éthiopie), représentant 42 % de la population mondiale pour près du quart du PIB mondial, ont établi la Nouvelle banque de développement en 2014 avec un capital initial de 100 milliards de dollars. Ce qui signe leur volonté de s’affranchir définitivement de la domination des institutions financières occidentales telles que le FMI et la Banque mondiale.

Les limites et les défis de l’émergence des Suds

Mais derrière ces succès se cachent en réalité des défis considérables.

L’économie du Brésil a souffert d’une grosse récession en 2015, avec une contraction du PIB d’environ 7 % sur deux ans, majoritairement à cause de la chute des prix des matières premières sur lesquelles le pays reste considérablement dépendant. La Chine, qui a pourtant longtemps affiché des taux de croissance annuels de l’ordre de 10 %, voit aujourd’hui son ascension ralentir, avec des prévisions pour les années à venir davantage autour de 5 % de croissance. Cela est dû en partie à l’endettement croissant et au vieillissement de la population. Tu peux citer la célèbre phrase d’Isabelle Attané : « La Chine sera devenue vieille avant d’être devenue riche. »

Les inégalités persistent également de manière flagrante entre les littoraux ultra-développés et les campagnes. Quant à l’Inde, plus de 200 millions de personnes vivent encore sous le seuil de pauvreté, malgré une classe moyenne en expansion. Au Nigeria (première économie d’Afrique), cela représente même plus de 40 % de la population.

À côté de ces obstacles économiques, la question de la corruption et de la mauvaise gouvernance continue d’être un frein au développement. À ce titre, la Transparency International classe le Brésil, l’Inde et le Nigeria parmi les pays les plus corrompus au monde. Ce qui nuit à la stabilité politique et aux efforts de croissance durable du Sud Global.

L’environnement représente un autre défi non négligeable. L’Indonésie, le Brésil et l’Inde figurent parmi les pays les plus polluants du monde, avec des taux de déforestation et d’émissions de carbone encore très élevés. La Chine est responsable de près du tiers des émissions mondiales de CO2. Cela pose la question de la durabilité du modèle de développement actuel des Suds, tant les effets du changement climatique sont déjà très présents.

Alors, émergence ou illusion ?

Les faits montrent qu’il y a une part de vérité dans cette émergence : les pays du Sud Global gagnent en importance sur la scène internationale, ainsi que sur le plan économique et politique. Néanmoins, cette émergence est loin d’être homogène ou sans défaut. Les succès économiques sont très inégaux d’un pays à l’autre et sont souvent fragiles, puisqu’ils reposent sur des bases comme la dépendance à la rente des matières premières, ou encore sur des systèmes politiques corrompus.

Ainsi, la Chine, avec son économie socialiste unique, connaît une trajectoire bien différente de celle de l’Inde, avec son modèle démocratique et son économie plus libérale. Quant au Brésil, il oscille entre périodes de forte croissance et de récession. De quoi illustrer la volatilité de ces économies.

Conclusion

L’émergence des Suds reste complexe à déchiffrer. Oui, il y a des signes d’une montée en puissance des pays, mais ces signes sont composés de défis et d’incertitudes. Alors, la réalité de cette émergence dépendra surtout de la capacité de ces pays à surmonter des obstacles structurels, à réduire les inégalités internes ou encore à adopter des modèles de développement plus durables. En somme, l’émergence du Sud Global est autant une promesse qu’un défi.