Si les vagues de démocratisation des années 1980 ont suscité l’espoir d’une démocratie plus stable et participative en Amérique latine, les dernières années ont révélé une inquiétante marche arrière démocratique. Dans toute la région, des gouvernements de plus en plus populistes, la polarisation politique croissante et la fragilité des institutions ébranlent les fondements démocratiques. À cela s’ajoute la résurgence de pratiques autocratiques qui menacent les acquis démocratiques durement obtenus. Comment en sommes-nous arrivés là et, surtout, quelles en sont les implications pour l’avenir de la région ?
La santé de la démocratie se dégrade
Les principales causes de cette marche arrière
La violence criminelle est la cause majeure du recul démocratique en Amérique latine. En effet, la violence engendre l’insécurité et l’instabilité sociale, ce qui provoque ensuite de l’instabilité politique. Face aux échecs des différents gouvernements pour combattre la violence par le dialogue sur le long terme (voir los acuerdos de paz en Colombia en 2016), les acteurs politiques se laissent séduire par la « méthode Bukele », c’est-à-dire une politique ferme contre le crime organisé. Ce phénomène s’appelle « la bukelización de la política ».
Un exemple : au Honduras, la présidente Xiomara Castro a l’intention de construire une grande prison aux îles Swan (islas des Cisne) pour emprisonner 2 000 membres de gangs. L’objectif est de mettre un terme à la corruption dans les prisons. Cependant, ce genre de pratique peut porter atteinte aux droits de l’homme, avec de possibles arrestations arbitraires, comme cela se produit à El Salvador.
Le deuxième facteur est la militarisation de la politique dans de nombreux pays, qui consiste à donner carte blanche à la police et aux militaires. Cela peut être la porte ouverte à tous types d’abus.
Un exemple : en 2022, au Mexique, AMLO avait prononcé un décret pour que la garde nationale (Guardia nacional) dépende de l’armée (el Ejército). Cette décision avait renforcé le pouvoir des forces militaires.
Enfin, la montée au pouvoir de leaders d’extrême droite constitue une menace pour la démocratie, car s’ensuit régulièrement une détérioration des droits humains et sociaux.
Un exemple : en 2024 en Argentine, la « ley Ómnibus » de Javier Milei rend plus difficile le fait de faire grève.
Les conséquences
La dégradation de la démocratie a des conséquences à la fois sur la population et les pays.
En ce qui concerne la population, la dégradation de la démocratie se traduit souvent par une détérioration des libertés individuelles et de la qualité de vie.
Un exemple : en Argentine, la multiplication des discours de haine envers la communauté LGBTQ+ et l’assassinat de trois femmes lesbiennes le 6 mai 2024 sont des exemples marquants de cette tendance.
À l’échelle d’un pays, une démocratie déclinante peut avoir de lourdes conséquences économiques. Dans un premier temps, les partenaires commerciaux du pays en question peuvent rejeter les pratiques antidémocratiques et alors sanctionner le pays.
Un exemple : en 2024, les États-Unis ont réimposé des sanctions commerciales au Venezuela, car Nicolás Maduro ne respectait pas l’Accord de la Barbade (los Acuerdos de Barbados).
À long terme, les politiques antidémocratiques peuvent aussi représenter en elles-mêmes des dépenses importantes qui creusent la dette des pays.
Un exemple : c’est notamment le cas à El Salvador. Pour maintenir sa haute popularité, Nayib Bukele refuse toute restriction budgétaire et continue à alimenter l’endettement du pays. Pour financer sa politique de répression contre le crime organisé, le gouvernement émet toujours plus d’obligations pour obtenir de nouveaux fonds.
Vocabulaire utile sur la démocratie et la politique
| El retroceso democrático | Le recul démocratique |
| La llegada al poder | La montée au pouvoir |
| Una política de mano dura (contra…) | Une politique ferme |
| Una alta popularidad | Une forte popularité |
| El endeudamiento público | L’endettement public |
| Emitir bonos | Émettre des obligations |
| Los mandatarios | Les dirigeants politiques |
| Una figura icónica en | Une figure emblématique de |
