Dans cet article, nous analysons la place de l’image dans quatre oeuvres de Stefan Zweig : Le Joueur d’échecs, La Confusion des sentiments, Les Deux soeurs, et Marie-Antoinette.

Introduction : Stefan Zweig et l’utilisation de références

Zweig est un auteur autrichien du vingtième siècle. Il était profondément humaniste, et a grandement souffert des horreurs des deux guerres mondiales : ainsi, il mettra fin à ses jours en 1944, ne supportant plus le nazisme. Mais pourquoi est-il intéressant sur le thème de l’image ?

Comme tu le sais, les références utilisées dans une copie de culture générales sont d’une importance majeure. Autant par leur choix que par la qualité et la finesse de leur analyse, elles peuvent t’amener à faire sortir ta copie du lot. Afin de te démarquer grâce à tes références, il est primordial que tu n’utilises pas uniquement des oeuvres directement couvertes par ton programme de Culture Générale. 

En effet, afin de prétendre à une excellente note, il faut apporter à ta copie des références qui te sont propres et qui ne sont parfois pas directement en lien avec le thème. Il s’agit avant tout de bien exploiter ta référence pour y piocher ce qu’elle peut apporter au sujet, souhaites afin que l’on suive ton raisonnement, même si cette dernière n’a pas de lien direct avec « l’image » . Nous te proposons ainsi quatre références qui peuvent être utilisées à l’écrit. Rappelons que pour bien se familiariser avec une oeuvre, il est toujours plus efficace de la lire intégralement !

Première oeuvre : l’image dans Le Joueur d’échec

L’oeuvre et son utilisation

Le Joueur d’échec est sans doute la nouvelle la plus célèbre de Zweig. L’histoire prend place sur un paquebot, où se déroule une partie d’échecs entre deux personnages : un champion du monde d’échecs, Mirko Czentovic, et un mystérieux passager, le Dr B. 

Tu pourras utiliser cette oeuvre pour évoquer la puissance et les dangers de l’image mentale. Cette référence illustre parfaitement le pouvoir de l’imagination, qui n’est rien d’autre que la faculté de former des images d’objets, ou de faire des combinaisons nouvelles d’images ou d’idées, de se représenter des situations possibles.

La place de l’image dans Le Joueur d’Échecs

Le Dr B. est en fait un ancien prisonnier de la Gestapo. Il n’a pas été emmené dans un camp de concentration, mais sa torture consistait à le laisser enfermé dans une chambre d’hôtel sans aucune distraction. Il n’avait qu’une chambre très rudimentaire avec un lit, une table et une cuvette ; pas même une horloge pour lui donner la notion du temps. Ainsi, il subissait un face-à-face avec le néant. Alors que les interrogatoires avaient lieu à n’importe quel moment de la journée ou de la nuit, il se sentait devenir fou. 

Mais un jour, lors d’un interrogatoire, il parvient à dérober un livre dans la poche d’un manteau. Il s’apprête à le lire avec grand plaisir : quelle ne fut pas sa déception lorsqu’il s’aperçut qu’il s’agissait d’un manuel d’échecs. Il se plonge néanmoins dedans, et tente de reproduire les parties avec son drap quadrillé et des morceaux de mie de pain en guise de pions.

Or, au bout de quelques jours, il n’a plus besoin de se représenter les parties, il parvient à les visualiser. Au bout de trois mois, il commence à jouer contre lui-même. Cela l’obsède peu à peu, il ne dort plus la nuit, il ne pense qu’à jouer contre lui même :

À peine une partie était-elle terminée qu’une moitié de moi-même recommençait à défier l’autre, car je portais toujours en moi un vaincu qui réclamait sa revanche.

Il frôle alors la schizophrénie, jusqu’à devenir bel et bien fou, et à être évacué par des médecins. Privé de toute interaction avec l’extérieur et de toute distraction, l’image mentale est pour le Dr B. le seul moyen d’évasion. Il se fabrique un échiquier mental afin de jouer et rejouer des parties dans sa tête.

Ainsi, cette capacité à visualiser les mouvements sur un échiquier imaginaire devient à la fois son salut et sa malédiction. C’est en visualisant et en répétant ces parties qu’il parvient à occuper son esprit pour ne pas sombrer dans la folie, mais cela devient aussi une obsession, illustrant comment l’imaginaire peut se retourner contre soi dans un contexte d’isolement extrême. 

La Confusion des Sentiments 

L’oeuvre

Ce récit est construit autour de la relation complexe entre un professeur de littérature et son élève. Ce dernier est en perpétuelle quête d’approbation de son professeur, qu’il assimile à une figure paternelle. Cette adulation rend l’élève extrêmement nerveux et sensible, d’autant plus que celui qui fait l’objet d’une telle adoration est assez versatile, tour à tour chaleureux et encourageant, puis ironique et cruel. Si la confusion des sentiments semble cibler l’élève, le récit ne laisse finalement pas le professeur en reste. 

Utilisation de la référence

Tu peux ainsi te servir de cet oeuvre pour parler du contraste entre l’image qu’une personne se donne en société et la réalité intime de son vécu et de ses émotions. 

La place de l’image dans La Confusion des Sentiments

Dans La Confusion des Sentiments, si l’ambiguïté semble se porter sur l’élève, le professeur est en fait assez mystérieux. Ce dernier apparait d’abord comme un professeur dévoué et passionné, pourtant il s’éclipse parfois pendant plusieurs jours sans dire où il va. Il a parfois un comportement très dur avec son élève avec lequel il a pourtant nouer une relation particulière puisqu’il est devenu un véritablement assistant dans son travail littéraire. En effet, il y a également, et surtout, comme l’élève s’en apercevra plus tard, une confusion des sentiments de son professeur lui-même. 

L’élève s’aperçoit que derrière ses supposées humeurs, c’est en réalité un homme très tourmenté. Néanmoins, profondément naïf, le jeune homme n’en saisit pas les raisons, alors même que la femme du professeur lui fait de lourds sous-entendus et que le lecteur a également deviné assez rapidement. La vérité ne lui sera dévoilée qu’à la toute fin du récit.

Le professeur apparaît d’abord comme une figure austère et respectable, symbole de l’érudition et de l’autorité intellectuelle. En réalité, la description fine de son apparence physique, sa silhouette, ses gestes, deviennent autant de symboles de la dualité entre l’image publique d’un homme de savoir et ses désirs inavoués.

On apprendra que le professeur se rend parfois pendant plusieurs jours dans des endroits de déprave profonde, il y épanoui ainsi ses désirs les plus saugrenus. À la fin du roman, le professeur, avoue non sans difficultés, ses sentiments amoureux à son élève. Il lui arrache un baiser et lui dit adieu. Ainsi, dans La Confusion des Sentiments, l’image est particulièrement importante pour illustrer les contrastes entre les perceptions sociales et la réalité intime des personnages.

Les Deux Soeurs 

L’oeuvre

Les Deux Soeurs est une courte nouvelle de Zweig, souvent moins connue que ses œuvres phares mais cela peut te permettre de te différencier des autres candidats. A travers cette oeuvre, Zweig met en scène le contraste entre deux sœurs jumelles aux vies radicalement différentes, et aux caractères qui semblent d’abord s’opposer. 

Utilisation de la référence

Tu peux ainsi exploiter cette nouvelle pour évoquer l’image en tant que représentation symbolique. En effet, les deux soeurs incarnent chacune une morale différente et les images qu’elles constituent pour la contrée dépassent leurs simples modes de vie. 

La place de l’image dans Les Deux Soeurs

L’une des soeurs représente la pureté et le respect de la morale divine. Elle est adulée et convoitée pour son innocence et le fait qu’elle ait toujours gardé sa virginité. Tous les courtisans du pays rêvent ne serait-ce que d’un regard de sa part, ce qu’elle ne cédera a priori jamais. Ainsi, elle est l’incarnation même de la sainteté.

L’autre soeur, quant à elle, vie une vie d’opulence et de luxure. Son comportement dépravé avec les hommes lui sert à très bien gagner sa vie. Elle ne connait que les palais, les serviteurs et les mets de qualité. Contrairement à sa soeur, elle est impulsive et éprise de liberté, elle refuse de se plier aux normes sociales et choisit la voie de l’indépendance. Elle symbolise pour tout le pays les plaisirs de la vie de la vie terrestre. 

Ainsi, chacune des soeurs est l’image d’une morale différente en tant qu’elles illustrent leurs valeurs par leur conduite. Une image a une portée qui dépasse l’expérience personnelle et tend à servir de référence pour un public plus général, c’est exactement l’objet des Deux Soeurs. L’image devient un reflet direct des choix de vie : la stabilité versus la liberté, la conformité versus l’individualité.

Marie-Antoinette 

L’oeuvre

Stefan Zweig a rédigé un grand nombre de biographies (Nietzsche, Freud, Fouché…), et celle de Marie-Antoinette est sans doute la plus célèbre. Il y décrit avec précision et finesse les sentiments de celle qu’il considère comme une grande reine de France poussée à l’échafaud. 

Utilisation de la référence

Avant tout, tu dois savoir que faire usage d’une référence qui se situe entre littérature et histoire de France ne peut que plaire au jury. En effet, c’est original, et témoigne de ta capacité à faire des liens entre ce que tu étudies en cours et ton argumentation.

Tu peux donc utiliser cette référence si tu veux évoquer le lien entre l’image qu’un personnage choisi de renvoyer et la maitrise de soi. En effet, dans les heures les plus sombres de la Révolution, Marie-Antoinette reste pour Zweig une image de la droiture et de l’intégrité. 

La place de l’image dans Marie-Antoinette

Lorsqu’elle grandit en Autriche et lorsqu’elle arrive à Versailles pour épouser le roi Louis XIV, Marie-Antoinette et frivole et insouciante. Les nombreuses remontrances de sa mère, avec qui elle communique très régulièrement par courrier, témoignent d’une certaine immaturité. D’abord plus intéressée par la vie mondaine et les plaisirs de la cour que par les affaires d’État, elle est très dépensière et se fait même construire « le Petit Trianon ». 

Au fil des événements, la situation en France se détériore, et Marie-Antoinette prend peu à peu ses responsabilités. Face aux troubles révolutionnaires et à la mort par guillotine du roi, elle révèle un courage inattendu, s’affirmant comme une figure combative. Zweig souligne sa transformation en une femme résolue, prête à affronter son destin tragique avec dignité. Marie-Antoinette est dépeinte comme une femme prise au piège de son rôle et de son époque, dont les erreurs de jeunesse lui sont impitoyablement reprochées.

Malgré sa figure controversée et les circonstances plus que difficiles, Zweig en fait l’incarnation de la droiture royale. Alors que tout dans sa personnalité aurait fait dire le contraire, c’est dans la situation tragique de la Révolution qu’elle agit finalement comme le voulait son devoir :

Ce n’est qu’en montant vers l’échafaud qu’elle devint enfin une reine.

Ainsi, alors qu’elle est prisonnière et condamnée à mourir, elle sauve son image et sa dignité, car ce n’est plus que grâce à elles qu’elle est reine. Alors que tous ses privilèges ont été abolis, elle refuse de s’abandonner à une soumission craintive et lâche mais fait preuve d’une grande maîtrise d’elle-même. Jusqu’à la fin, elle s’efforce de maintenir une apparence digne et royale, par exemple en refusant de fléchir devant les révolutionnaires lors de son emprisonnement et de son procès. En allant à l’échafaud, elle sauvegarde une forme de noblesse, même dans la chute.

Conclusion 

Voici donc quatre oeuvres de Zweig dont tu peux te servir pour étayer un de tes arguments en dissertation de culture générale. Tu peux même utiliser plusieurs de ces références dans une même copie afin de montrer une appétence particulière pour les oeuvres de Zweig, un auteur qui met très souvent tout le monde d’accord. 

Mais, si tu souhaites utiliser une de ces références à l’oral HEC, je te conseille très vivement d’avoir lu l’oeuvre intégrale en amont !