Que tu sois en khâgne A/L ou B/L, tu devras réaliser des commentaires de carte topographique ou des dissertations de géographie. Il te faudra notamment maîtriser la notion de « tourisme », fréquemment convoquée dans les sujets.
Nous te proposons aujourd’hui d’acquérir les connaissances fondamentales sur le sujet pour réussir tes épreuves de géographie !
Comment définir le tourisme ?
On peut s’appuyer sur la définition de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT). Le tourisme désigne les activités déployées par les personnes au cours de leurs voyages hors de leur environnement habituel. Une limite cependant, la durée de ces séjours ne doit pas dépasser une année (sinon, c’est un déménagement).
Le motif du déplacement peut autant relever du loisir que des affaires. Le plus important, comme l’explique le géographe Rémy Knafou, est qu’il y ait rupture avec le quotidien et un autre rapport au temps.
Enfin, garde en tête que le tourisme peut être estival, médical, sexuel, culturel, vert, de masse, d’affaires, religieux, etc. Il ne faut pas avoir une vision réduite et stéréotypée des activités des touristes.
De la mise en tourisme au post-tourisme
La mise en tourisme
On parle de lieu touristique pour désigner :
- le résultat de la transformation d’un endroit en lieu par le tourisme (processus d’invention) ;
- ou bien, le résultat de la transformation d’un lieu déjà constitué en un lieu d’une nouvelle qualité (processus de subversion ou de diversion).
Ce processus de transformation d’un lieu ou d’un endroit en lieu touristique est la mise en tourisme. Cette territorialisation est opérée par des acteurs qui développent une activité touristique. Ce processus a un caractère dynamique et humain.
Comme le rappelle le site Géoconfluences, une mine d’or pour la géographie, quels que soient les thèmes, la mise en tourisme peut être une invention, une diversion ou une subversion.
Retiens tout d’abord qu’on parle d’invention quand le lieu touristique est le résultat de la transformation d’un endroit (portion d’espace qui n’est pas constituée en lieu). En revanche, quand le lieu touristique est le résultat de la transformation d’un lieu déjà constitué, auquel on donne une nouvelle qualité touristique, on parle de diversion ou de subversion. Appuyons-nous sur les définitions de Géoconfluences :
- « Un lieu diverti est un lieu investi par le tourisme, mais où celui-ci n’est pas dominant. » Par exemple, au port du Guilvinec en Bretagne, qui reste principalement consacré à la pêche, on peut aussi développer des visites guidées des chalutiers pour les touristes ;
- « Un lieu subverti est au départ un lieu non touristique, puis investi par lui au point d’en dépendre largement ou totalement. »
Le système touristique
D’après Géoconfluences, le système touristique « synthétise un ensemble spécifique et historiquement daté de pratiques, d’acteurs et de lieux touristiques ». On peut décrire des systèmes touristiques à plusieurs échelles.
Par exemple, décrivons la ville de Paris comme un système touristique. Il regroupe des pratiques patrimoniales, sportives et de loisirs, qui impliquent autant d’acteurs et de lieux différents. Ainsi, les touristes peuvent visiter des musées, faire du vélo sur les quais de Seine et sortir dans les bars du Quartier latin. On a là trois pratiques, trois acteurs et trois lieux différents.
Après le tourisme
Certaines stations ou régions touristiques peuvent perdre leur activité touristique, que ce soit dans le cadre d’un abandon définitif ou du fait d’une reconversion. On observe alors une mutation des paysages, avec des équipements abandonnés ou leur disparition par renaturalisation.
Les conséquences du tourisme
Conséquences environnementales
L’activité touristique peut avoir des conséquences néfastes pour l’environnement, surtout quand elle est exponentielle. Tout d’abord, la surfréquentation peut endommager ou perturber la faune et la flore locales.
Le tourisme produit par ailleurs des déchets et peut participer d’une pollution atmosphérique (trajets en avion), des eaux (fioul de bateaux, eaux usées dans les hôtels) ou des sols.

L’exemple type est l’île de Koh Phi Phi, en Thaïlande. Rendue célèbre par le film La Plage (Danny Boyle, 2000), des milliers de touristes la visitent chaque année. Les allées et venues sur les plages ont conduit à une pollution de l’eau et à un endommagement des fonds marins.
Des associations écologistes locales ont par exemple révélé un net recul des coraux. Les autorités thaïlandaises ont cherché à limiter la pollution en interdisant les visites de la plage.

La trop grande artificialisation des espaces touristiques peut également avoir des conséquences environnementales. Sur la Costa Brava espagnole, on a par exemple parlé de bétonisation pour dénoncer l’artificialisation de la côte au profit d’un tourisme de masse.
Conséquences sociales
Mais au-delà de la pollution, la mise en tourisme d’un territoire peut aussi avoir de nombreuses autres conséquences sur le lieu.
Quand le tourisme donne à un lieu, généralement urbain, un caractère de musée, on parle de muséification. On peut aussi parler de « disneylandisation ». Certains élus municipaux ont par exemple dénoncé la touristification de quartiers de Venise. On peut notamment assister à une cartepostalisation ou à une mise sous cloche des paysages.
La chercheuse Sylvie Brunel va jusqu’à parler de disneylandisation. Elle désigne une facette de la « mondialisation touristique », qui transformerait le monde en gigantesque parc d’attractions pour les touristes. Selon elle, les sociétés adapteraient et fixeraient leurs pratiques sociales pour correspondre aux clichés et répondre aux attentes des touristes. C’est la folklorisation.
Enfin, le tourisme peut provoquer une clubbisation. Théorisé notamment par Éric Charmes, ce terme décrit un processus de sélection et de distinction sociale par lequel on exclut des groupes sociaux de certains territoires. Clubbisation et tourisme peuvent aller de paire. C’est le cas avec les country-clubs ou certains golfs ouverts uniquement sur cooptation.
De façon plus générale, le tourisme peut contribuer à la gentrification.
Limiter les conséquences du tourisme
On ne peut néanmoins pas résumer le tourisme à son impact négatif. Comme le rappelle l’Organisation mondiale du tourisme, certains acteurs touristiques prennent en compte les impacts économiques, sociaux et environnementaux actuels et futurs de leurs activités. L’objectif : répondre aux besoins des visiteurs, des professionnels, de l’environnement et des communautés d’accueil.
Cette prise en compte des injonctions du développement durable et la valorisation d’une idéologie de la conservation relèvent du tourisme durable. Comme le rappelle Géoconfluences, ce tourisme cherche à « minimiser les effets négatifs qu’il génère immanquablement sur les espaces naturels comme sur les communautés locales ».
Même s’il n’est pas géographe, on peut se pencher sur le livre récemment publié par l’essayiste Henri Mora. Dans Désastres touristiques, il estime que le tourisme, qu’il soit « vert » ou « de masse », détruit nécessairement les territoires et les rapports sociaux en transformant tout en produit à consommer et en marchandise. Il va jusqu’à défendre la ligne de l’antitourisme. Il faudrait sortir du tourisme pour sortir de la marchandisation du monde par le capitalisme.
Le tourisme sur les cartes topographiques
Le tourisme littoral
Le tourisme balnéaire s’est développé en France au XIXᵉ siècle. Il concerne avant tout la bourgeoisie. On peut repérer des traces de ce tourisme élitiste ou ancien à la présence de certaines infrastructures.

Parmi elles, les casinos, les hôtels de luxe, les hippodromes, les promenades, les thermes ou les ports de présence. On peut les trouver sur la côte normande (Cabourg, Deauville), atlantique (Biarritz, Arcachon) ou méditerranéenne (Nice, Saint-Raphaël). Le développement urbain est souvent radioconcentrique autour de la plage.

On trouve aussi des infrastructures de tourisme de masse. Il est repérable sur les cartes IGN à des barres d’immeubles qui rappellent celles des barres HLM. Il faut également avoir en tête l’existence d’immeubles et d’une côte bétonnisée dans le Languedoc. Le tourisme y a été développé dans les années 1960 dans le cadre de la mission Racine.
Le tourisme littoral est motivé par l’attirance pour la mer et les côtes (thalassotropisme) ou par une attirance pour les régions ensoleillées (héliotropisme).
Les autres formes de tourisme
Le littoral est la première destination touristique en France. 40 % des résidences secondaires françaises sont en situation littorale. Pour autant, le tourisme est également développé dans les terres.
À la campagne, tu peux identifier le tourisme grâce aux GR (sentiers de randonnées), aux campings et aux lieux de patrimoine. Attention cependant à ne pas surévaluer l’activité touristique à partir de la carte IGN.
Tourisme et montagne
Pendant longtemps, la montagne a été un territoire difficile à valoriser. Par la suite, le développement du tourisme l’hiver fait de cette faiblesse une force. On parle parfois de la neige comme d’un « or blanc ».
On dénombre plus de 300 stations de ski en France. Elles peuvent être distinguées en quatre générations.
- Première génération : à plus faible altitude, développées autour de villages préexistants et précurseuses du tourisme de montagne dès le début du XXᵉè siècle (Grand-Bornand, Megève, Chamonix).
- Deuxième génération : plus haute altitude (dès 1 600 mètres), qui sont construites « ex-nihilo » (Courchevel, Les Deux Alpes).
- Troisième génération : « stations intégrées », créées dans les années 1960 et 1970, dans le cadre du plan neige qui entend répondre à la demande du public. Construites par des promoteurs privés qui développent des buildings en hauteur, des parkings et des services de proximité (Avoriaz, Tignes, Isola 2000).
- Quatrième génération : « stations villages », créées à partir des années 1980 pour préserver les paysages et le charme de la montagne (Montchavin, Valmorel).
Mais les critiques contre les stations de ski se multiplient ces dernières années. Elles participent en effet d’une pollution visuelle et environnementale (déchets, allers-retours de voitures, perturbation de la faune et de la flore, etc.). Par conséquent, certains optent pour un tourisme vert.
D’autres ont une attirance pour les paysages glacés, enneigés et sauvages. C’est le cryotropisme (« attirance pour le froid »). Ces touristes partent parfois au sein de populations autochtones aux modes vie traditionnels. Ils peuvent aussi partir sur les traces des explorateurs du passé.
Zoom sur quelques formes spécifiques de tourisme
Nous l’avons évoqué plus haut, il existe des formes de tourisme très variées. Les touristes ne partent pas tous en vacances pour profiter de la plage. On peut aussi parler de tourisme d’affaires, de tourisme médical, etc.
Tourisme médical
On peut parler de tourisme médical, ou de tourisme de santé, ou de tourisme hospitalier. Il désigne le déplacement à l’étranger pour bénéficier d’un acte médical non disponible ou difficilement accessible dans son pays de résidence. L’acte médical en question peut être peu ou pas accessible à cause de la législation ou bien du fait de l’offre de soins (compétences, coûts) restreinte.
Par exemple, les Françaises qui partaient en Angleterre se faire avorter avant l’entrée en vigueur de la Loi Veil pratiquaient le tourisme médical. Récemment, ce type de tourisme s’est largement développé avec la démocratisation du transport aérien et de l’accès à Internet. Comme les normes sanitaires se sont internationalisées, la proximité entre les patients et les offres de soins s’en trouve augmentée.
Une fois l’acte médical réalisé, les voyageurs en profitent parfois pour faire du tourisme de loisir dans le pays. Des États comme la Thaïlande s’appuient sur leur offre de soins pour développer leurs activités touristiques. Le pays, spécialisé dans la chirurgie thérapeutique et esthétique, a triplé la durée des visas pour séjours médicaux en 2016. L’objectif : permettre aux touristes de pratiquer un tourisme de loisir après leur opération.
Dark tourism
Si tu veux éviter les anglicismes, tu peux aussi parler de tourisme macabre ou morbide. L’expression dénonce, d’après Géoconfluences, « un système touristique exploitant de façon indécente la notoriété négative de certains lieux ».
Il peut s’agir de lieux de catastrophe (centrale de Tchernobyl), des lieux de détention (bagne de Cayenne), des lieux liés à des crimes de masse (camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau), des lieux de grande pauvreté ou plus largement des lieux d’accidents ou de faits divers.
Attention cependant à ne pas tirer de conclusions hâtives ! Le tourisme macabre désigne une mise en tourisme peu respectueuse du lieu. Si les conditions de visite sont décentes et honorent la mémoire des victimes, on peut parler de tourisme mémoriel plutôt que de dark tourism pour le camp d’extermination d’Auschwitz.
Enfin, avec le changement climatique, on peut noter l’existence d’un tourisme de la dernière chance, une sous-catégorie de dark tourism. Il consiste en une observation des écosystèmes dont on sait qu’ils sont potentiellement condamnés à disparaître à court ou moyen terme sous l’effet des changements globaux. On pourrait par exemple imaginer des voyages sur les îles Tuvalu qui devraient être submergées d’ici la fin du siècle avec la montée des eaux.
Cybertourisme
On parle aussi parfois d’e-tourisme pour désigner la mise à profit croissante d’Internet en amont et en aval du voyage touristique. Internet est largement utilisé par les touristes pour préparer leur voyage. Il leur permet également de gagner du temps ou d’opérer des changements de dernière minute une fois sur place.
Le cybertourisme répond aux pratiques d’instantanéité répandues dans le monde contemporain. Il est plus facile de préparer un voyage qu’auparavant. C’est ce que reflète d’ailleurs le recul des agences de voyages. On dénonce parfois l’e-tourisme comme la fin des voyages spontanés avec une généralisation de la vérification. Les touristes ne vont par exemple que dans les hôtels, les restaurants ou les musées auxquels les internautes ont attribué de bonnes notes en ligne.
Enfin, le cybertourisme se manifeste aussi par la normalisation des pratiques touristiques via les réseaux sociaux comme Instagram.
Tu en sais à présent un peu plus sur le tourisme en géographie. Les définitions, les astuces et les exemples développés te seront précieux pour réussir tes dissertations ou tes commentaires de carte topographique.
Pour te préparer au mieux aux concours, n’hésite pas à consulter également nos articles sur le programme de l’épreuve de géographie à l’ENS de Lyon ou de Paris ! Tu peux également t’aider du formidable manuel Le Commentaire de carte topographique de Camille Tiano et Clara Loïzzo (Armand Colin), disponible gratuitement sur Cairn grâce à tes identifiants universitaires !