Allemagne

Depuis plusieurs années, l’extrême droite en Allemagne connaît une montée inquiétante, notamment à travers le parti Alternative für Deutschland (AfD). Ce phénomène, amplifié par les derniers résultats électoraux, suscite des préoccupations tant au niveau national qu’international. En février 2025, lors des élections régionales, l’AfD a obtenu un score impressionnant de 22 % des voix en Thuringe et a consolidé sa position en tant que troisième force politique du pays, juste derrière les partis traditionnels, CDU et SPD. Ce résultat marque une accélération de la montée de l’AfD, qui devient un acteur incontournable du paysage politique allemand. Ce contexte politique, teinté de tensions sociales et économiques, nécessite une analyse approfondie pour comprendre les raisons de cette montée et les dangers qu’elle représente pour l’Allemagne, mais aussi pour l’Europe dans son ensemble.

Biographie de l’AfD : naissance et fondements d’une idéologie radicale

L’Alternative für Deutschland (AfD) a été fondée en 2013 par un groupe d’économistes et de politiciens mécontents de la gestion de la crise de la zone euro par la chancelière Angela Merkel.

À l’origine, l’AfD se positionnait comme un parti économique, axé sur la critique de l’euro et de l’intégration européenne. Son premier président, Bernd Lucke, un économiste respecté, avait pour ambition de créer un parti de droite modérée qui rejetait l’austérité imposée aux pays du sud de l’Europe et voulait réformer l’Union européenne, voire en sortir.

Cependant, le parti a rapidement évolué

En 2015, la crise migratoire a fait basculer l’AfD dans un virage plus radical. Lorsque Merkel a ouvert les portes de l’Allemagne aux réfugiés, l’AfD a adopté une position extrêmement hostile à l’immigration, exacerbant son discours nationaliste et populiste.

Ce changement a permis au parti de capter une base électorale plus large, notamment parmi les Allemands inquiets de l’impact de la migration sur leur culture et leur économie.

Avant l’AfD, plusieurs autres partis d’extrême droite ont marqué l’histoire politique allemande

Parmi eux, le NPD (Nationaldemokratische Partei Deutschlands), fondé en 1964, qui est l’un des plus anciens partis d’extrême droite en Allemagne. Bien que ce parti ait toujours eu des résultats marginaux, il a été un symbole de la résistance contre l’ordre démocratique de l’Allemagne post-Seconde Guerre mondiale.

À côté de cela, il faut mentionner les Républicains (Die Republikaner), fondés en 1983, un autre parti d’extrême droite qui a connu un certain succès dans les années 1990 avant de sombrer dans l’oubli.

Toutefois, c’est l’AfD, avec son discours plus modéré au départ, qui a réussi à s’imposer comme la première force d’extrême droite en Allemagne après des décennies de marginalisation. Cette montée en puissance a été alimentée par un rejet croissant des élites politiques traditionnelles et par des inquiétudes économiques liées à la mondialisation et à l’intégration européenne.

Les idéologies de l’AfD : un programme radical, mais stratégique

Le programme de l’AfD repose sur plusieurs axes idéologiques clairement définis qui en font un parti unique dans le paysage politique allemand. Au-delà de la simple opposition à l’euro et à l’immigration, l’AfD a défini des positions radicales sur de nombreux sujets.

Économie

L’AfD prône une politique économique ultralibérale, cherchant à réduire les impôts et à privatiser les services publics. Un exemple concret est sa proposition de réduire les impôts pour les classes moyennes et supérieures, en particulier les taxes sur les entreprises et les entreprises familiales.

Par ailleurs, l’AfD veut diminuer la pression fiscale sur les plus hauts revenus, estimant que cela encouragerait l’investissement et la création de richesse. Le parti est également farouchement opposé aux politiques économiques de solidarité au sein de l’UE, proposant notamment que l’Allemagne quitte l’euro et revienne au Deutsche Mark, une proposition qui divise profondément les analystes et les citoyens allemands.

Sa position sur la protection des industries nationales est également très claire : l’AfD se montre très critique envers les réglementations européennes jugées trop contraignantes pour les entreprises allemandes.

Immigration et identités nationales

L’AfD place la question de l’immigration au cœur de son discours. Le parti soutient une politique d’immigration zéro, cherchant à limiter drastiquement l’arrivée de migrants, notamment en provenance de pays musulmans. Leur programme inclut l’idée de la fermeture des mosquées et l’interdiction du port du voile dans l’espace public.

Selon la leader du parti, Alice Weidel, cette politique vise à « protéger l’identité allemande » et à « défendre les valeurs occidentales ». En outre, l’AfD plaide pour un contrôle strict des frontières et une réduction des aides sociales pour les réfugiés.

Écologie

L’AfD adopte une position climatosceptique. Le parti rejette les politiques climatiques européennes qu’il juge trop coûteuses et inefficaces, affirmant que les mesures prises au niveau européen sont une « perte d’argent public » pour une cause peu soutenue par la majorité des Allemands.

Par exemple, l’AfD s’oppose fermement à la taxe carbone et à la fermeture des centrales à charbon. Le parti défend également une position contre l’énergie éolienne et solaire, arguant que ces énergies « non fiables » nuisent à la compétitivité de l’industrie allemande.

L’AfD : un danger pour l’Allemagne et l’Europe ?

La montée de l’AfD représente un enjeu tangible pour l’Allemagne, mais également pour l’Europe. En 2025, l’AfD est devenu un acteur majeur dans plusieurs régions d’Allemagne, avec des résultats de plus de 20 % dans certains Landtag (parlements régionaux), notamment en Thuringe et en Saxe.

Ces résultats montrent qu’une grande partie de la population allemande adhère de plus en plus à un discours radical qui érode les fondements démocratiques du pays. La crainte est que l’AfD, en cas de succès aux prochaines élections législatives, puisse se rapprocher des autres partis populistes européens, comme le Rassemblement national en France, la Ligue en Italie, ou le Fidesz en Hongrie, créant ainsi une coalition de forces extrémistes.

L’AfD menace de fragiliser l’unité européenne, en promouvant un discours anti-européen qui pourrait conduire à un isolement de l’Allemagne sur la scène internationale. Sa position anti-UE, notamment la sortie de l’euro, met en péril l’intégration européenne. En outre, sa rhétorique violente à l’égard des immigrants et des minorités est susceptible d’envenimer les tensions sociales en Allemagne et dans toute l’Europe, où les populismes gagnent du terrain.

Le plus grand risque réside dans l’érosion progressive des valeurs démocratiques. L’AfD remet en question la gestion de la mémoire historique, notamment la façon dont l’Allemagne aborde son passé nazi et la Seconde Guerre mondiale. Le discours de certains membres du parti relativisant les crimes de guerre pourrait rouvrir des plaies anciennes, créant un climat de plus en plus toxique.

Quelles conséquences pour la France, l’Europe et l’Allemagne ?

Pour la France et les autres pays voisins de l’Allemagne, une Allemagne dominée par l’AfD serait un revers stratégique majeur. Les relations franco-allemandes, pilier de l’Union européenne, pourraient se tendre. Une Allemagne plus nationaliste et isolationniste signifierait moins de coopération en matière de défense, d’économie et d’immigration. Cela pourrait également entraîner des tensions sur des questions de sécurité, avec des politiques migratoires divergentes entre les deux pays.

Sur le plan européen, un renforcement de l’AfD pourrait raviver le clivage entre les pays de l’Est et de l’Ouest de l’Union européenne. L’AfD, allié avec des partis eurosceptiques comme celui du gouvernement hongrois, pourrait chercher à démanteler certaines des bases de l’UE, telles que la libre circulation des personnes ou la solidarité financière.

Du point de vue allemand, l’AfD représente une menace pour la cohésion sociale et l’équilibre interne du pays. En 2025, les régions d’Allemagne de l’Est, notamment la Saxe et la Thuringe, connaissent une forte progression de l’AfD, où les jeunes et les travailleurs précaires sont les principaux soutiens du parti. Cette montée peut provoquer un éclatement social, entre une Allemagne riche et prospère à l’Ouest, et une Allemagne de l’Est en proie aux inégalités et aux frustrations.

Les conséquences pourraient être dramatiques : division interne accrue, tensions internationales et une Allemagne plus radicale dans ses choix politiques, avec des répercussions pour la stabilité de l’UE.

Conclusion

La montée de l’extrême droite en Allemagne, incarnée par l’AfD, représente une menace évidente pour l’avenir du pays et de l’Europe. Ses idées radicales et son rejet de l’intégration européenne risquent de déstabiliser l’Allemagne et de nourrir les populismes dans toute l’Europe. Le défi pour les démocrates et les forces pro-européennes est de contrer cette montée en puissance avant qu’il ne soit trop tard.

 

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