LGBT

On se retrouve pour un nouvel article qui va traiter des nouvelles conditions de vie de la communauté LGBT+ aux États-Unis.

Un souffle d’avant-gardisme

C’est dans les années 1960 que naît le Gay Liberation Movement aux États-Unis. Le pays est alors perçu comme le véritable land of freedom, avec non seulement des opportunités économiques, mais également sociales, avec ici, pour la première fois, la création d’un mouvement défendant les droits des personnes homosexuelles.

La première action significative a lieu en 1962, avec la décriminalisation des activités sexuelles avec un partenaire du même sexe dans l’État de l’Illinois. Toutefois, le mouvement prend réellement de l’ampleur et commence à se faire entendre en 1969 lors des Stonewall riots à New York, où des milliers de personnes ont manifesté contre les agressions des personnes ouvertement homosexuelles. Cet événement est en fait une réaction vive des citoyens après que la police new-yorkaise a brutalisé les patrons du bar gay The Stonewall Inn.

Cependant, il faut attendre patiemment 2003 pour que l’État fédéral des États-Unis invalide l’intégralité des lois contre l’homosexualité ainsi que les pratiques sexuelles autrefois considérées « non conventionnelles ». C’est l’arrêt Lawrence v. Texas de la Cour suprême qui fait entrer cette régulation novatrice en vigueur.

De nouvelles régulations et de nouvelles libertés

Lawrence v. Texas (2003)

Cet arrêt juridique, sous le nom officiel de John Geddes Lawrence et Tyron Garner v. Texas, est promulgué par la Cour suprême des États-Unis le 26 juin 2003. Il pose alors la question si l’interdiction de la sodomie entre adultes de même sexe consentants est légale, dans un contexte politique délicat entre volonté d’émancipation de la communauté LGBT+ et criminalisation des « comportements sexuels déviants » définis par une moralité conservatrice.

Au départ initié par une plainte d’un amant jaloux accusant (sûrement à tort) John G. Lawrence et Tyron Garner d‘avoir des relations sexuelles, ce cas juridique prend ensuite de plus amples proportions lorsque l’association de défense des droits homosexuels, Lambda Legal, se propose d’accompagner les deux hommes. Le procès est alors médiatisé et leur ligne de défense devient celle de couples homosexuels.

Après plusieurs procédures en remise en cause du jugement, le cas comparaît devant la Cour suprême en 2002. Lawrence et Garner sont alors représentés par l’avocat Paul Smith, reconnu ouvertement homosexuel « sans être trop gay », qui accuse la législation texane d’inconstitutionnalité pour discrimination entre les couples hétérosexuels et homosexuels. Ce qui est contraire aux cinquième et quatorzième amendements qui défendent la vie privée et les libertés personnelles.

À compter de ce jugement, les États-Unis invalident l’intégralité des lois contre l’homosexualité et toute autre forme de discrimination basée sur l’orientation ou les pratiques sexuelles.

En 2004, l’État du Massachusetts est le premier État à promulguer une loi autorisant les mariages homosexuels sur le sol américain.

Obergefell v. Hodges (2015)

Cet arrêt, sous Obama, impose à tous les États des États-Unis de légaliser les mariages homosexuels et d’en reconnaître la légitimité.

C’est pourtant en décembre 2022 que le mariage gay entre dans la Constitution et devient alors une liberté fondamentale incontestable et intouchable.

Le grand retour conservateur

Malgré ces grandes avancées dans la juridiction et la mentalité américaine au début des années 2000, on assiste aujourd’hui à un retour d’une moralité conservatrice traditionnelle. En effet, certaines figures politiques s’en sont prises ouvertement à la communauté LGBT+, comme Ron DeSantis (gouverneur de Floride) ou encore Donald Trump, en sa qualité présente de Président des États-Unis.

Aussi, de nombreux mouvements et actes de haine se sont multipliés, attisant d’autant plus le sentiment d’insécurité des personnes LGBT+. En novembre 2022, par exemple, cinq personnes ont été abattues dans un night-club de Colorado Springs pour seul motif de leur orientation sexuelle.

DeSantis est l’une des personnes les plus activement impliquées dans la lutte contre les droits LGBT+

En juillet 2022, il ratifie le Don’t Say Gay Act, qui interdit n’importe quelle forme de mention de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre dans l’éducation en Floride. Le Stop Woke Act passe également à la même période et complète le premier. En reprenant l’interdiction de toute mention sexuelle dans les écoles, il intègre aussi la mention de la « race » et incite les parents à poursuivre en justice tout professeur qui dérogera à cette loi. En mars 2023, l’enseignante Jenna Barbee est alors mise en examen pour avoir montré le film d’animation Disney Strange World, dont le personnage principal est gay.

DeSantis continue dans sa lutte avec l’introduction de nouveaux bills interdisant aux professeurs d’université de présenter des études sur les genres à leurs élèves et limitant des pronoms neutres, tels que they qui correspond au « iel » français. En mai 2023, le gouverneur de Floride s’engage également à retirer les fonds des Diversity, Equity and Inclusion programs, qu’il considère comme des « distractions de la mission principale [de l’éducation] ».

D’autres États suivent l’exemple de DeSantis

L’Arkansas interdit aux étudiants transgenres d’utiliser les toilettes correspondant à leur gender identity (genre auquel ils s’identifient) et non à leur natural gender (genre physique déterminé à la naissance).

À l’inverse, d’autres États d’orientation politique historique libérale donnent plus de voix aux personnes issues de la communauté LGBT+. En novembre 2022, le Massachusetts est le premier État à élire une représentante publiquement lesbienne, Maura Healey ; tandis qu’Olivia Hill devient la première figure politique transgenre de l’histoire des États-Unis en étant élue gouverneur du Tennessee.

Le tournant Trump

Si ces divergences d’opinions n’avaient jusqu’alors lieu qu’à l’échelle des États, la communauté LGBT+ était tout de même assurée par l’État fédéral depuis 2003. Cependant, la réélection de Donald Trump et sa prise de fonction en janvier 2025 semblent marquer un tournant.

En effet, depuis le 10 janvier 2025 et le début effectif de son second mandat, Donald Trump semble décidé à imposer son opinion à l’entièreté du territoire américain sur une multitude de polémiques et questions sociétales, dont la question des genres et de l’orientation sexuelle.

Peu après son investiture, le Président américain a d’abord critiqué devant les médias la messe donnée par l’évêque Mariann Budde durant laquelle elle a demandé la clémence de ce dernier envers les membres de la communauté LBGT+ et les migrants. Donald Trump a alors dit avoir assisté à un « mauvais service » et a réclamé des excuses de la part de cette évêque « méchante ». Donald Trump a par ailleurs déclaré que l’État ne « reconnaîtrait que deux genres : le masculin et le féminin ». Cette déclaration a suscité de nombreuses vagues sur les réseaux sociaux.

Pour autant, personne ne pouvait s’attendre à une mise en application concrète de cette déclaration. Et, pourtant, le 27 février 2025, Hunter Schafer, la célèbre actrice transgenre de la série Euphoria, en a été la première victime. Dans une vidéo sur TikTok, l’actrice explique qu’elle a été mégenrée sur son passeport. La star a rempli son dossier avec la mention « femme » (genre qu’elle possède légalement depuis une dizaine d’années), avant l’investiture de Trump, et a découvert lors de la délivrance de son passeport la mention « homme », qui correspond à son genre naturel.

Aujourd’hui, le second mandat de Trump laisse place au doute sur l’irréversibilité des droits et de la reconnaissance légale de la communauté LGBT+ si durement acquis.