Voir le monde pour l’analyser semble aller de soi pour la plupart d’entre nous. Pourtant, John Hull a vécu dans un monde qui s’arrêtait au bout de sa canne. Dans sa cécité, il ne pouvait plus voir, ni les formes ni même les couleurs. Nous allons donc te faire découvrir, dans cet article, le monde sans la vue dont nous parle John Hull dans son journal Vers la nuit.
John Hull : le jour où tout a basculé
Diplômé de l’Université de Melbourne, John Hull (1935-2015) était enseignant chercheur en théologie. Il a travaillé à la Caulfield Grammar School.
Après avoir lutté pendant des années, Hull est finalement déclaré aveugle à l’âge de 45 ans. Pour ne pas sombrer dans le désespoir, il raconte dans son journal le quotidien d’un aveugle, et la douleur d’oublier peu à peu les visages de ses proches.
Vers la nuit : un journal
Ce livre raconte comment Hull perdait progressivement la vue, sans pouvoir rien y faire. Il narre également sa nouvelle vie, notamment auprès de ses enfants et de sa femme, dont il commençait à oublier les visages. Il montre donc l’importance de voir le monde, et surtout l’exclusion du monde que peuvent ressentir la plupart des aveugles. Hull précise d’ailleurs qu’un voyant ne pourrait pas comprendre cela.
Son livre est aussi un encouragement pour ceux d’entre nous qui vivent des situations difficiles. Il nous raconte comment il a pu s’adapter à sa nouvelle vie, et comment il a réussi à trouver une certaine paix intérieure dans un monde obscur.
Voir le monde : un impératif
À la lecture de Hull, on relève au moins trois aspects qu’il convient de mentionner.
Le premier est la dépendance que nous avons vis-à-vis de nos yeux pour penser efficacement le monde. Il est particulièrement utopique de dire que le monde peut se donner à nous sans passer par notre sens de la vue : nous voyons le monde, d’abord et avant. Ensuite, seulement, nous le disons et le critiquons.
Deuxièmement, la perte de la vue est synonyme de « perte en monde ». Hull écrit en effet ceci :
Les voyants vivent dans le monde. L’aveugle vit dans la conscience.
Ainsi, notre vision du monde peut être modifiée, si l’on est en mesure de le percevoir ou non. À ce stade, l’aveugle développe davantage ses autres sens, pour saisir le monde avec plus de précision.
Enfin, ce livre est un double défi que nous lance Hull : d’une part, il s’agit de construire nous-mêmes notre monde ; car quand on est capable de voir, on est aussi capable de créer, d’influencer et de choisir notre monde.
D’autre part, il nous invite à faire plus attention aux personnes et aux choses qu’on exclut par choix ou par inadvertance du monde. Il peut s’agir d’une personne handicapée, mais aussi d’autres personnes qui vivent une vie difficile, parce qu’elles n’ont pas le choix. Autrement dit, John Hull n’incite pas à créer un monde parfait ; mais il nous invite à nous rappeler que nous ne vivons pas tous dans le même monde.
La peur de l’obscurité
À une époque où le monde va à toute vitesse, et où nous ne pensons souvent qu’au lendemain et à nos objectifs, Vers la nuit nous montre que le monde repose pourtant parfois sur un simple détail de nos vies. Il suffirait en effet que ce dernier change pour notre monde perde tout son sens.
Ce livre met aussi en évidence notre indifférence, et peut-être même notre peur vis-à-vis de ce l’inconnu. Le monde se limite non seulement à ce qui est connu, compris et assimilé, mais également à ce qui est quotidiennement vu ou observé.
L’idée de monde dépend ainsi de la temporalité – de l’état mental et physique de la personne qui tente d’analyser ce concept. En somme, le monde ne saurait en aucun cas se limiter à un concept ou à une liste de choses ou de lieux que l’on observe ; il se construit de façon subjective. C’est sans doute ce qui est remarquable et inspirant chez cet auteur : il nous montre qu’on peut s’en sortir, même au bord du désespoir.
Conclusion
Le monde à perte de vue, ou encore le monde sans la vue est un monde où l’individu n’est plus en mesure de percevoir les formes, les couleurs, ou encore les expressions de ceux qui l’entourent. Il s’agit donc là d’une cruelle perte en monde, qui pourrait conduire au désespoir le plus absolu.
Mais Vers la nuit montre également la formidable adaptabilité dont fait preuve l’Homme : si le monde ne peut plus être vu, il peut néanmoins encore être écouté. Entendre le monde est donc une belle réponse face à la perte du monde.
Nous espérons que cet article nourrira tes prochaines dissertations ! Consulte ici toutes nos fiches d’oeuvre sur le monde.