Cet article aborde la croissance zéro et la décroissance, deux concepts voisins qu’il convient de maîtriser en économie.
La croissance zéro
La croissance zéro, ou stagnation économique, est une théorie économique selon laquelle toutes les activités économiques devraient être à un état stable, être en équilibre. Dans cette théorie, le PIB n’évolue et ne baisse pas. L’économie ne connaît ni expansion ni contraction.
Ce terme est évoqué pour la première fois en 1973 par Alfred Sauvy. Ce modèle se différencie de la simple croissance qui est vouée à subir des cycles économiques (récession…). Dans le contexte de ressources naturelles limitées qui est le nôtre, cette théorie est plus qu’intéressante.
La croissance zéro mise plus sur la qualité que sur la quantité. De ce point de vue, on peut l’assimiler à du développement. Le rapport « Halte à la croissance » (ou rapport de Meadows), publié par le Club de Rome, est le premier écrit qui préconise le concept de croissance nulle. Ce rapport affirme que la croissance perpétuelle épuise les ressources. Il est écrit pendant les Trente Glorieuses et veut donc montrer que la croissance effrénée de cette époque est néfaste à terme. Il propose, entre autres, un PIB stable pour préserver l’environnement.
Les moyens de parvenir à la croissance zéro :
- relocaliser (cf. souveraineté) ;
- travailler moins (« obsession du travail ») ;
- développer les communautés ;
- arrêter de se référer au PIB.
La croissance zéro vise à être durable. Elle peut être considérée comme étant une étape pour accéder à une économie plus durable. Une économie qui utilise les ressources à bon escient, de façon à minimiser les impacts environnementaux.
Les mécanismes de la croissance zéro
Mais comment parvenir à mettre en place un tel système ? Dans un premier temps, il faudrait mettre en place la redistribution des richesses. Alors, oui, la France dispose déjà d’un système de redistribution. Il diminue d’ailleurs très largement les écarts de revenus disponibles entre les premiers et les derniers déciles. Mais l’idée est ici de le rendre plus efficace.
Le second mécanisme pour mettre en place une croissance zéro, c’est de se concentrer sur l’innovation et l’efficacité. Créer de nouveaux modèles, de nouvelles techniques, et les rendre efficaces. Car, quelle est l’utilité d’une innovation si personne ne peut vraiment l’utiliser à 100 % ? Pour cela, les États devraient se concentrer sur des innovations technologiques et sur l’amélioration des processus économiques existants. Soit, par exemple, revoir le système administratif chronophage qui caractérise la France.
Exemple
De 1990 à 2000, le Japon a connu la croissance zéro, on parle même de « décennie perdue » qui survient après une forte croissance (1980). Le vieillissement de la population en est l’un des principaux facteurs, car il entraîne avec lui une baisse de la consommation. Dans ce cas, la croissance zéro correspond à une période de stagnation. Les conséquences ont été multiples : baisse des taux d’intérêt pour relancer la croissance, déflation et stagnation prolongée.
Aujourd’hui, le Japon ne fait plus face à la croissance zéro. Cependant, sa croissance reste limitée.
Point actu (août 2024) : la Banque du Japon a augmenté son taux pour la première fois depuis des années. Comme de nombreux composants essentiels viennent du Japon, la potentielle hausse des coûts a affolé les marchés et les entreprises.
Toutefois, la croissance zéro ne signifie pas la décroissance.
La décroissance
La décroissance est un concept politique, économique et social prônant une réduction du productivisme et rejetant la poursuite de la croissance économique comme objectif des politiques publiques. Elle correspond à une situation économique où la richesse économique produite, mesurée par le PIB, n’augmente pas, voire diminue de manière planifiée.
Ce concept repose sur l’idée selon laquelle nous vivons dans un monde fini, aux ressources limitées, et sur l’idée que seule une réduction de la production et de la consommation globale pourra assurer l’avenir de l’humanité et la préservation de la planète.
Les objectifs de la décroissance sont de parvenir à la justice sociale et à la durabilité environnementale. Cela signifie qu’elle se concentre sur la réduction de l’empreinte carbone, des émissions de CO2 et des gaz à effet de serre. Un objectif que nous connaissons déjà bien. Par ailleurs, il faudrait aussi promouvoir une répartition plus équitable des ressources et pas des richesses, cette fois. Cela dans le but de diminuer les inégalités à la fois sociales et économiques.
Pour certains économistes, comme Antonin Pottier, la décroissance va avec la transition écologique. Ce n’est un secret pour personne : le monde est face à l’urgence climatique. Il faut changer nos habitudes de production, de consommation et de vie si nous voulons sauvegarder ce que nous connaissons. Or, dans le système actuel, tout est basé sur la croissance et, visiblement, ça ne permet pas de réel changement. C’est pourquoi il serait intéressant de repenser le système et d’aborder la croissance zéro et la décroissance comme des solutions plutôt que comme des dangers qu’il faut impérativement éviter.
Quels mécanismes pour la décroissance ?
Pour arriver à une situation de décroissance, il faut, d’une part, réduire délibérément la consommation. Cela peut être fait par le biais de politiques limitatives. Ensuite, il faut revoir les modes de vie. En effet, le recyclage, la réutilisation ou encore l’underconsumption sont des éléments qui permettent de passer à la décroissance.
Enfin, la création de réformes structurelles est inévitable. Un changement des systèmes politique, économique et social serait attendu, car ceux que nous connaissons actuellement ne permettent pas la passation.
Exemple
La crise vécue par la Grèce de 2008 à 2013 illustre parfaitement cette situation. En effet, le surendettement et les mesures d’austérité prises par le pays l’ont plongé dans une récession qui a duré plusieurs années. Cela a aussi généré un chômage élevé et un appauvrissement de la population. En effet, le chômage était de 27 % et de plus de 60 % chez les jeunes. À plus long terme, la Grèce a connu un exode massif des jeunes et une croissance très faible.
Cet exemple est celui d’une décroissance subie. Mais il est possible de la choisir.
On peut envisager qu’une ville choisisse de privilégier certaines actions, comme la réduction de la production industrielle, au profit du commerce local et des circuits courts. La transition énergétique pourrait également être promue. En conséquence, la ville connaîtrait une baisse du PIB liée à la baisse de la consommation. Mais ses habitants verraient leur qualité de vie s’améliorer et leur empreinte carbone drastiquement réduite.
Bien différencier les deux concepts
La croissance zéro et la décroissance ont évidemment de nombreux points communs, mais ce sont bien deux concepts distincts.
Concernant les approches, la croissance zéro veut stabiliser le PIB, pas le faire augmenter ou diminuer. Dans une autre dimension, la décroissance, comme son nom l’indique, prône la réduction volontaire de la consommation.
Au niveau économique, la croissance zéro maintient le niveau actuel, alors que la décroissance le fait diminuer pour réduire l’économie de façon générale.
La croissance zéro inclut généralement des mesures pour limiter l’impact de l’économie sur l’environnement, tout en maintenant cette économie à son niveau actuel. Dans une autre perspective, la décroissance, elle, se concentre vraiment sur la réduction de la pollution : c’est pour cette raison qu’elle veut réduire la consommation. Les deux approches diffèrent donc selon leur implication au niveau environnemental.
Enfin, la mise en place de la croissance zéro ne nécessite pas énormément de changements, mis à part des mécanismes de stabilisation de l’économie. Alors que la décroissance demande, comme expliqué précédemment, des changements structurels qui sont plus compliqués à mettre en place.