cash

Le monde évolue à une vitesse fulgurante et, avec lui, nos habitudes de consommation et de paiement. Depuis plusieurs années, la digitalisation des transactions financières ne cesse de croître, poussant certains à prédire la disparition imminente des pièces et des billets. La pandémie de Covid-19 a encore accéléré cette transition, favorisant les paiements sans contact et les transactions en ligne. Mais sommes-nous réellement à l’aube d’un monde sans argent liquide ? Quels en sont les enjeux, les avantages et les inconvénients ?

L’essor des paiements dématérialisés

Une adoption croissante des paiements électroniques

Les paiements numériques ont explosé, ces dernières années. En 2024, selon une étude de la Banque centrale européenne, plus de 75 % des transactions en Europe se faisaient sans espèces. Aux États-Unis, ce chiffre atteignait 80 %, tandis que la Chine, précurseur dans ce domaine, enregistrait un taux de 95 %.

Le développement de technologies comme les cartes bancaires sans contact, les applications mobiles de paiement (Apple Pay, Google Pay) et les cryptomonnaies ont considérablement facilité cette transition.

Un phénomène accéléré par la pandémie

La crise sanitaire de 2020 a marqué un tournant décisif. Pour éviter les contacts physiques et limiter la propagation du virus, de nombreux commerces ont privilégié les paiements sans espèces. En France, la limite des paiements sans contact est passée de 30 à 50 euros en avril 2020, facilitant ainsi leur adoption.

Cette tendance ne s’est pas inversée après la pandémie : les consommateurs ont pris l’habitude de régler leurs achats avec leur carte ou leur smartphone.

Les raisons derrière la disparition progressive du cash

Une question de sécurité et de traçabilité

L’un des principaux arguments en faveur de la disparition de l’argent liquide est la sécurité. Les billets et les pièces sont anonymes et peuvent être volés, perdus ou utilisés dans des transactions illégales.

Les gouvernements et les institutions financières plaident pour une société sans cash afin de lutter contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et l’évasion fiscale. Selon Europol, 70 % des transactions liées au crime organisé en Europe se font encore en espèces.

Une réduction des coûts pour les États et les banques

Produire, stocker, transporter et sécuriser des billets et des pièces représente un coût colossal pour les banques centrales.

Par exemple, en 2023, la Banque de France a dépensé plus de 400 millions d’euros pour l’impression et la distribution des billets. En Suède, pays en pointe sur la question, la part des paiements en cash ne représentait plus que 6 % des transactions en 2024, poussant la Riksbank à réduire drastiquement la production de monnaie physique.

L’essor des monnaies numériques des banques centrales (MNBC)

Face à la montée en puissance des cryptomonnaies et des plateformes privées de paiement, de nombreuses banques centrales envisagent d’émettre leurs propres monnaies numériques. La Chine teste déjà son e-yuan, tandis que la Banque centrale européenne prévoit le lancement de l’euro numérique d’ici 2027.

Ces nouvelles monnaies permettraient aux États de garder un contrôle sur les flux financiers tout en offrant une alternative sécurisée aux espèces.

Les résistances et les défis d’un monde sans cash

L’exclusion des populations les plus vulnérables

Si les paiements dématérialisés sont une avancée pour beaucoup, ils posent aussi des problèmes d’accessibilité. Une étude menée par la Banque mondiale en 2024 révèle que 1,4 milliard de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à un compte bancaire.

Les personnes âgées, les sans-abri et certaines populations rurales restent dépendantes du cash. En Suède, où le cash a presque disparu, des voix s’élèvent pour protéger son usage, notamment pour les seniors, peu familiers avec les nouvelles technologies.

Le risque de cybercriminalité et de surveillance accrue

Avec la digitalisation des paiements, le risque de cyberattaques devient une préoccupation majeure. En 2023, une attaque massive contre une banque numérique aux États-Unis a causé la perte de plusieurs milliards de dollars.

De plus, la disparition du cash signifierait que chaque transaction serait enregistrée, ce qui inquiète les défenseurs des libertés individuelles. Un monde sans espèces pourrait donner aux gouvernements et aux grandes entreprises un pouvoir de surveillance inédit sur les citoyens.

La dépendance technologique et les pannes

Une société entièrement numérique est vulnérable aux pannes et aux défaillances technologiques. En octobre 2024, une panne mondiale d’un grand réseau de paiement a paralysé des millions de transactions pendant plusieurs heures, prouvant que le système n’est pas infaillible.

En cas de catastrophe naturelle ou de crise économique majeure, le cash reste un moyen de paiement fiable et universellement accepté.

Conclusion : vers un monde hybride ?

La disparition totale du cash n’est pas pour demain, mais son usage se réduit inévitablement. Les paiements électroniques dominent de plus en plus les transactions, portés par la technologie et la volonté des États de mieux contrôler les flux financiers.

Cependant, des résistances persistent, notamment pour des raisons d’inclusion sociale et de sécurité. Il est probable que nous nous dirigions vers un modèle hybride, où le cash coexistera encore avec les monnaies numériques pendant plusieurs décennies. L’enjeu sera alors de garantir un accès équitable à tous les moyens de paiement, tout en assurant la sécurité et la protection des libertés individuelles.