Le libre-échange, anciennement mercantilisme, est un concept économique très ancien qui a connu plusieurs périodes de gloire. Dans le contexte économique que nous connaissons actuellement, il est un pilier central. Cela n’est pas nouveau : il s’agit d’un modèle sur pied depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, soit à partir de 1945 avec la mise en place du GATT. Aujourd’hui, cette notion est plus que jamais essentielle pour comprendre le monde qui nous entoure et les enjeux qui le composent. En effet, le libre-échange a créé des interdépendances entre les pays. Depuis peu, on observe un tournant dans l’ordre économique établi.
Définition et explication du concept
Le libre-échange est une politique commerciale visant à diminuer, voire supprimer, les obstacles aux échanges de biens et de services. Cette doctrine repose sur l’existence de gains à l’échange. Le gain à l’échange est un principe selon lequel on se procure davantage de biens et de services en se spécialisant dans une production particulière.
Le libre-échange est donc en opposition au protectionnisme. Voilà leur principale différence :
Libre-échange | Protectionnisme |
Forte croissance, accompagnée par la libéralisation du commerce international. | Souvent issu des crises économiques, il correspond à un repli des économies nationales sur elles-mêmes. |
Les théories sur le sujet
Selon Adam Smith, l’échange est favorable aux nations, car elles y trouvent chacune un avantage absolu qui serait limité par une politique visant à réduire les échanges. Selon lui, le libre-échange permet d’éviter le gaspillage du capital.
La théorie des avantages comparatifs de David Ricardo peut évidemment être utilisée dans une dissertation faisant intervenir le libre-échange. Selon lui, chaque pays doit se spécialiser dans la production de ce pour quoi il est le plus avantagé, ou le moins désavantagé. De cette façon, les pays peuvent commercer entre eux et ne manquer de rien.
Stuart Mill, avec la théorie des valeurs internationales, affirme qu’il existe un prix permettant d’optimiser les échanges de produits entre les nations. Ce prix serait un prix de marché, dépendant donc de l’offre et de la demande.
Le paradoxe de Leontief est également intéressant dans ce cadre. Ce paradoxe se produit lorsqu’un pays à fort capital financier exporte des biens qui ont un ratio travail/capital plus faible que ses importations. Cela signifie qu’il exporte des biens intensifs en travail et non en capital alors que, justement, il possède beaucoup de capital.
Krugman et Helpman développent la nouvelle théorie du commerce international. Voilà les points que cette dernière affirme :
- Le commerce international se développe davantage entre les pays dont le développement est semblable.
- La part du commerce international intrabranche est très forte.
- La place des entreprises internationales est toutefois, elle aussi, importante dans le commerce international.
Selon la théorie des dotations de facteurs de production, un facteur de production rare donnera un produit cher. À l’inverse, un facteur de production abondant permettra d’obtenir un produit bon marché.
Les limites du libre-échange
Selon la demande représentative de Linder, les productions sont dépendantes de la demande. Les producteurs, eux, produisent pour leur marché national en priorité. Cette théorie peut être utilisée pour montrer que le libre-échange connaît toutefois des limites.
List développe l’idée du protectionnisme éducateur. Son objectif est de protéger les entreprises nationales de la concurrence internationale ayant un niveau de productivité plus élevé. Ce développement suit une démarche en quatre étapes, correspondant au cycle de vie d’une entreprise. Le protectionnisme éducateur permet donc aux entreprises nationales de se renforcer et de devenir concurrentielles avant de devoir jouer dans le même marché que les grandes entreprises internationales. Cette stratégie ne peut être que temporaire et appliquée uniquement à certains domaines. Elle est dégressive et vouée à se terminer pour permettre une concurrence saine.
Mais le libre-échange connaît d’autres limites. Sa potentielle nuisance au développement à long terme en est une, son absence d’esprit de concurrence, en est une autre. Mais il crée également des privilèges en faveur de certains pays, de certaines entreprises, ce qui empêche une concurrence saine. Enfin, le libre-échange peut s’avérer nuisible au consommateur, car il peut potentiellement faire monter les prix des produits.
L’organisation des échanges internationaux
Pour mieux comprendre le libre-échange, il est important de saisir ces trois concepts :
- L’essor du multilatéralisme depuis 1940.
- La création du GATT pour le libre-échange en 1947. Ces accords ont pour principes : la négociation entre les pays, la non-discrimination, l’interdiction des restrictions quantitatives, l’interdiction du dumping (pratique qui consiste à vendre sur les marchés extérieurs à des prix inférieurs à ceux du marché national, ou même inférieurs au prix de revient, le but étant de créer une barrière de prix pour les entreprises ne disposant pas des mêmes ressources et ne pouvant donc pas se permettre de suivre la baisse des prix à leur charge), l’interdiction de la protection tarifaire, l’instauration de règles de transparence.
- La création de l’OMC en 1995. Elle a été dotée d’un véritable pouvoir d’arbitrage, mais ce n’est pas tout, elle accorde également une grande importance à la propriété intellectuelle. L’OMC admet également une clause sociale selon laquelle le libre-échange doit impérativement être subordonné au respect des droits de l’Homme.
Aujourd’hui, l’OMC est paralysée et son importance est donc minimisée. Le libre-échange connaît un grand revers, car les pays se concentrent davantage sur leur propre économie et tendent à favoriser le protectionnisme. C’est notamment le cas pour la Chine depuis plusieurs années. Elle exporte énormément, mais a mis en place une certaine lourdeur administrative afin de limiter les ventes de produits étrangers sur son territoire.
Plus récemment, c’est l’élection de Trump qui rebat les cartes. Avec son mantra America First, le libre-échange prend un énième coup au profit du protectionnisme. Hausse des droits de douane, restrictions d’importations et menaces envers les autres pays sont désormais des sujets centraux, bien éloignés du libre-échange sans frontières ni barrières entre les partenaires commerciaux.
Le libre-échange et l’actualité
Après 25 ans de négociations, l’Union européenne et le Mercosur ont conclu un accord de libre-échange en décembre 2024. À noter que le Mercosur est une alliance économique entre le Brésil, l’Argentine, le Paraguay, l’Uruguay et la Bolivie. Cet accord vise à supprimer la majorité des droits de douane entre les deux blocs. Il a ainsi créé un marché de plus de 700 millions de consommateurs. Cet accord avait par ailleurs précédemment fait un large débat avec, notamment, de nombreuses protestations de la part des agriculteurs français qui se disaient lassés par cet accord en raison des différences de normes entre les deux blocs.
Concernant les États-Unis, des rebonds sont aussi à noter au sujet du libre-échange. En effet, depuis son arrivée à la Maison-Blanche, Trump a fait couler beaucoup d’encre en parlant des droits de douane. En effet, en février 2025, le 47e président des États-Unis annonçait une hausse de 25 % de droits de douane sur les produits européens. Il justifie cette mesure en accusant l’Europe de pratiques commerciales injustes, faisant référence à la TVA de 20 %, mais surtout au déficit commercial des États-Unis vis-à-vis du Vieux Continent.
L’Europe a répliqué en annonçant à son tour une hausse sur les produits américains, ce à quoi Trump répond en menaçant de faire passer les droits de douane pour l’Europe à 200 %. Le libre-échange n’est pas au beau fixe avec le retour de toutes ces mesures protectionnistes…
Autre point essentiel de l’actualité sous le prisme du libre-échange : l’accord de libre-échange entre l’AELE (Association européenne de libre-échange, composée de l’Islande, du Liechtenstein, de la Norvège et de la Suisse) et la Moldavie, qui est entré en vigueur le 1er avril 2025. Cet accord vise à améliorer l’accès aux marchés et à renforcer les relations commerciales entre les parties. Dès son application, 98,5 % des exportations suisses vers la Moldavie bénéficieront d’une franchise douanière. Ici, pas de recul pour le libre-échange, au contraire !