monnaie

Le 15 août dernier, la Banque centrale russe a lancé les premiers essais de son rouble numérique avec comme objectif de lutter contre les sanctions internationales. La Russie devient alors le 21e pays dans le monde à avoir une monnaie numérique. Mais alors, qu’est-ce qu’une monnaie numérique de Banque centrale (MNBC) et quels sont ses enjeux ?

Définition

C’est à la fin des années 2010 que les premières MNBC sont apparues, afin de contrer l’influence des cryptomonnaies telles que le Bitcoin ou encore l’Ethereum.

Une MNBC est, comme son nom l’indique, émise par une Banque centrale. La majeure partie de ces MNBC fonctionne sur le système de la blockchain (système qui traite les transactions de manière décentralisée avec une sécurité quasiment inviolable).

Cependant, une MNBC n’est pas une cryptomonnaie. En effet, elle est beaucoup plus stable et n’est pas un instrument spéculatif comme les cryptomonnaies actuelles. Elle ne représente presque aucun risque pour la stabilité financière.

Qu’en est-il de la situation en Russie ?

Cette nouveauté est majoritairement incomprise par les habitants russes (6 sur 10 ne comprennent que peu, voire pas l’intérêt d’une telle monnaie). Cela ne corrèle pas avec l’ambition de la Banque centrale russe, qui souhaite étendre cette nouvelle monnaie à l’ensemble des citoyens d’ici 2025-2027.

Comme dit plus haut, la volonté du Kremlin est de limiter l’impact des sanctions internationales sur son économie, alors que le rouble est à un niveau historiquement bas (1 $ pour 95 roubles russes au 19 septembre 2023). Néanmoins, cette avancée est fortement décriée, car elle permettrait en réalité d’accroître le contrôle du gouvernement sur son peuple.

De plus, en Russie, l’indépendance de la Banque centrale russe (BCR) n’est pas assurée comme c’est le cas en Europe avec la BCE. Par exemple, la BCR a récemment augmenté ses taux d’intérêt directeurs (passant de 8,5 % à 12 % au 15 août), après des critiques venant du Kremlin concernant le haut niveau d’inflation dans le pays (environ 4 % sur un an au 7 août).

Quelle est la place des MNBC dans le monde ?

 En réalité, cette nouvelle forme de monnaie est particulièrement ciblée par les pays émergents. Parmi les 21 pays qui utilisent déjà cette innovation, on retrouve le Nigeria, les Bahamas ou encore la Jamaïque. Ces pays y voient un moyen d’accélérer leur développement économique, en donnant la possibilité à tous les individus d’avoir accès à une monnaie numérique sans condition.

C’est également le cas de la Chine qui ambitionne de faire passer le yuan comme monnaie de réserve mondiale devant le dollar américain, par le biais d’une MNBC. Cela démontre bien l’espoir que revêt le monde dans cette technologie, sachant que le dollar représentait 59 % des réserves de change mondiales au troisième trimestre 2021, comme le montre le graphique ci-dessous.

La composition des réserves mondiales de change | Statista

La BCE, elle aussi, envisage de lancer sa MNBC d’ici 2026. L’Eurosystème a ouvert une phase de test en 2021 qui est censée durer deux ans, afin d’étudier la faisabilité d’un euro numérique. Ces essais vont concerner cinq entreprises, comme l’a annoncé la BCE en septembre 2022. Parmi ces dernières, on retrouve le géant Amazon pour le secteur du e-commerce.

La BCE devrait donner une réponse en octobre 2023 concernant le possible lancement d’un euro numérique. Tu peux aller consulter directement les explications fournies par la BCE en cliquant sur le lien ici.

Objectifs d’une MNBC

Il est important de connaître les objectifs d’une MNBC pour être en mesure d’argumenter en faveur ou en défaveur de cette nouveauté dans une QRA d’économie, par exemple. D’ailleurs, si tu souhaites développer une autre notion d’économie fondamentale, voici un fabuleux article qui traite de la croissance juste ici.

Voici les principaux objectifs d’une MNBC

  • Numériser davantage les paiements en réponse au développement du e-commerce à l’échelle mondiale ainsi qu’aux moyens de paiements dématérialisés. On peut également y voir une volonté de réduire encore plus la présence de la monnaie fiduciaire dans nos sociétés.
  • Réduire les frais que subissent les commerçants de la part des banques privées, qui gèrent une grande partie des paiements dématérialisés à l’heure actuelle. Cette réduction des coûts de transaction permettrait une meilleure efficience des paiements, bénéfique à l’allocation des ressources.
  • Accroître l’inclusion bancaire, car une MNBC est accessible à tous, y compris aux personnes avec qui les banques refusent de traiter. Ou même les populations dont l’accès au système bancaire est restreint, à l’image des populations insulaires.
  • Enfin, l’enjeu concerne également la souveraineté des différentes monnaies mondiales. Les banques centrales qui ne prendraient pas ce nouveau virage verraient l’influence de leur monnaie réduite par rapport à celles qui le prendraient.

Principales controverses

  • Risque concernant les cyberattaques. Effectivement, cette nouvelle forme de monnaie, étant numérique, peut être la cible d’attaques informatiques. Avant un lancement, les banques centrales doivent donc s’assurer d’être suffisamment préparées à les repousser.
  • Risque pour la stabilité financière en cas de retrait massif de la part des individus. Bien qu’une MNBC soit moins dangereuse que les cryptoactifs concernant la stabilité financière, le fait que les barrières soient quasiment inexistantes crée un risque en cas de mouvement de panique, par exemple.

Pour conclure, l’arrivée d’une MNBC accélérerait la numérisation de l’économie, ce qui ouvre des débats sur le respect de la vie privée des individus, ou encore sur la traçabilité des paiements. Doit-on aller vers une économie toujours plus dirigée par les entreprises privées ? Ou bien le pouvoir doit-il être rendu aux institutions telles que les banques centrales par le biais d’innovation comme les MNBC ?