Depuis son arrivée sur la scène politique, Donald Trump a fait du protectionnisme économique l’un de ses chevaux de bataille. Fidèle à sa promesse de campagne, il a mis en place une série de mesures visant à protéger l’industrie américaine contre ce qu’il considère comme une concurrence déloyale. Parmi ces mesures, l’augmentation spectaculaire des droits de douane sur certains produits importés, notamment dans l’industrie automobile et les vins et spiritueux européens, suscite de vives inquiétudes. Ces décisions pourraient bien déclencher une guerre commerciale aux conséquences imprévisibles, tant pour les États-Unis que pour leurs partenaires commerciaux.
Contexte
La base de l’élection de Donald Trump reposait sur une politique commerciale protectionniste visant à rééquilibrer la balance commerciale des États-Unis. En effet, désireux de protéger l’industrie américaine et de réduire le déficit commercial, Donald Trump a adopté une stratégie agressive en menaçant d’augmenter les tarifs douaniers sur de nombreux secteurs. De ce fait, à l’annonce de taxes supplémentaires sur les bourbons importés des États-Unis par l’Europe, le président américain a réagi et a décidé lui aussi de sévir.
Ainsi, il a annoncé l’augmentation de 25 % des tarifs douaniers sur les importations d’automobiles, soit un total de 27,5 % (ce tarif douanier était de 2,5 % auparavant). Nous verrons plus tard dans cette analyse l’impact d’un tel changement pour les Américains et pour nous, Européens.
Cependant, le président américain ne s’arrête pas là et menace aussi le secteur des vins et des spiritueux d’une augmentation des tarifs douaniers de 200 %. Autant dire qu’il menace la fin des importations de vins et de spiritueux venant d’Europe. Un problème majeur pour la France et l’Italie, deux pays qui figurent parmi les principaux exportateurs de ces produits vers les États-Unis.
Qui seront les principales victimes ?
Tout d’abord, contrairement à ce qu’on pourrait penser, les entreprises américaines sont les premières touchées par cette mesure. En effet, General Motors a perdu plus de 7 % en Bourse le 27 mars 2025 (soit le surlendemain de l’annonce officielle par Washington). L’entreprise américaine fait venir plus de 750 000 véhicules du Mexique et du Canada (elle n’a en réalité que la moitié de sa production basée sur le sol américain). Le célèbre cabinet J. P. Morgan a estimé à 13 milliards de dollars le coût pour General Motors ainsi qu’à 4,5 milliards pour Ford. En clair, toutes les entreprises américaines qui ne produisent pas totalement aux États-Unis ou qui importent des pièces sont touchées.
Une autre victime, dans une moindre mesure, est l’entreprise française Stellantis, qui a perdu 4 % en Bourse le 27 mars également. Cette dernière réalise certes la majorité de ses ventes en Europe, mais tire l’essentiel de ses profits des États-Unis (avec des marques comme Jeep, Dodge, etc.).
Bien sûr, c’est aussi le cas pour les entreprises européennes, notamment les entreprises allemandes, gravement touchées. En effet, deux véhicules sur trois européens exportés vers les États-Unis sont allemands. Le marché asiatique est également fortement affecté. Goldman Sachs prévoit une baisse de 40 % des profits de Nissan et Hyundai à cause de ces tarifs douaniers.
Finalement, la seule entreprise très peu touchée reste le géant Ferrari. L’entreprise italienne, proposant un produit de luxe, possède ce qu’on appelle un « pricing power ». En d’autres termes, si tu veux une Ferrari, il faudra payer. Ainsi, les ventes ne semblent pas diminuer. Au contraire, l’entreprise annonce une augmentation des prix de 10 % sans réelles conséquences sur ses ventes aux États-Unis.
Voici donc un premier aperçu des victimes du point de vue des entreprises. Ce ne sont évidemment pas les seules victimes. On estime également que plus de 25 000 emplois pourraient disparaître pour compenser les surcoûts subis par les entreprises. De surcroît, les victimes oubliées sont tout simplement les ménages américains eux-mêmes. Ces derniers, très friands de voitures européennes, vont devoir garder leurs véhicules plus longtemps, faute de pouvoir en acheter de nouveaux.
Quelles conséquences ?
La stratégie de Donald Trump est simple : en agissant ainsi, il espère une forte relocalisation des entreprises touchées aux États-Unis. Le but ? Augmenter la production automobile et les emplois sur le sol américain.
Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il ne s’est pas trompé, puisque, un jour avant la signature du décret, la société sud-coréenne Hyundai a annoncé qu’elle investirait 21 milliards de dollars aux États-Unis et qu’elle construirait une nouvelle aciérie en Louisiane.
Bien sûr, la conséquence majeure qui s’annonce et qui peut nous inquiéter, c’est la future guerre commerciale en approche. En effet, le Premier ministre du Japon, deuxième exportateur mondial de voitures, a déclaré que son pays mettrait « toutes les options sur la table » en réponse aux droits de douane. Tandis que le Premier ministre canadien, Mark Carney, a qualifié l’annonce de Trump « d’attaque directe » contre son pays et son industrie automobile. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a déclaré que l’Union européenne examinerait les mesures avant de réagir. Au début de la journée du jeudi 27 mars, Trump a menacé d’imposer des droits de douane « bien plus importants » si l’Union européenne et le Canada collaboraient pour causer ce qu’il a décrit comme un « préjudice économique » aux États-Unis.
Concernant l’éventuelle augmentation de 200 % des tarifs douaniers sur les vins et spiritueux (ce qui impacterait ici beaucoup plus la France que le marché automobile), il semble encore assez difficile à croire que Trump et Washington puissent effectuer une telle manœuvre. Cette mesure tuerait toute exportation possible évidemment et elle dépend principalement de la confirmation ou non de l’Europe concernant sa taxe sur les bourbons importés des États-Unis.
Toutefois, si cette taxe venait à voir le jour, ce sont surtout le cognac et ses producteurs qui seraient impactés négativement. En effet, 98 % de la production de cognac française est exportée et la moitié de ces exportations partent vers les États-Unis. Au total, on estime les excédents commerciaux des vins et spiritueux à 3,8 milliards d’euros sur une année, sachant qu’un milliard provient des exportations de cognac.
Malgré donc les menaces d’une augmentation de 25 % (et plus encore) sur toutes les importations européennes, la France serait l’un des pays d’Europe les moins touchés. En effet, les exportations vers les États-Unis ne concernent « que » 1,6 % de son PIB (la moyenne européenne étant de 2,8 %). Nous sommes donc bien en dessous. L’Allemagne et l’Italie se situent autour de 3 %, ce qui est plus inquiétant.
Conclusion
La politique protectionniste de Donald Trump bouleverse l’échiquier économique mondial. Si elle vise à redynamiser l’industrie américaine, elle entraîne des répercussions majeures pour les entreprises, les emplois et les consommateurs. Une guerre commerciale semble inévitable, avec des tensions diplomatiques croissantes.
Reste à voir si cette stratégie portera ses fruits ou si elle nuira davantage à l’économie américaine, mais surtout à l’économie mondiale. Réponse à venir très prochainement. Ce qui est certain, c’est que les premières victimes seront les Américains eux-mêmes.