discipline

La construction européenne est marquée par la discipline budgétaire. Ce focus sur la discipline a impacté énormément les nouvelles politiques économiques mises en place en Union européenne, notamment au sein de la zone euro, à partir des années 2000.

Qui est responsable de la politique budgétaire en Union européenne ?

La répartition des compétences est la question clé de la construction européenne : quel niveau local, national ou supranational sera le plus apte à gérer telle ou telle compétence ? Dans l’Union européenne, la décentralisation est la règle et la centralisation l’exception, c’est le principe de subsidiarité. Il vise à privilégier le niveau inférieur d’un pouvoir de décision aussi longtemps que le niveau supérieur ne peut pas agir de manière plus efficace. Il consiste donc à réserver à l’échelon supérieur uniquement ce que l’échelon inférieur ne pourrait effectuer que de manière moins efficace.

Lors de la création de l’euro, les États membres ont considéré que la politique budgétaire devait demeurer une responsabilité nationale. Ceci s’est traduit par la création d’un budget européen de taille très modeste coexistant avec les budgets nationaux. Ce choix, correspondant à la volonté de concilier les avantages économiques d’une monnaie unique tout en préservant la souveraineté des États, singularise la zone euro vis-à-vis de la plupart des autres zones monétaires qui sont ancrées dans une structure fédérale.

Des règles de discipline budgétaire devaient garantir l’efficacité de cette configuration. L’interdiction du financement monétaire et la clause de non-solidarité devaient pousser les investisseurs à être attentifs à la soutenabilité des finances publiques de chacun des États membres et inciter ainsi à la vertu budgétaire sous peine de taux d’intérêt obligataires trop élevés.

Pourquoi la discipline budgétaire s’impose en tant que politique optimale ?

Le traité de Maastricht (1992) précise que « les États membres évitent les déficits publics excessifs ». La traduction concrète a été la fixation d’un seuil de déficit public maximal de 3 % du PIB, associé à un ratio de dette publique maximal de 60 % de PIB. La dette et le déficit publics renvoient à l’État central, aux collectivités locales et aux organismes de protection sociale. S’ajoute le refus de solidarité financière (no bail out) entre États (clause de non-renflouement).

Plusieurs explications peuvent être avancées face à ce choix en termes de politique budgétaire :

  • la domination croissante des thèses des nouveaux classiques lors des années 1980-1990, notamment à la suite des travaux de Kydland et Prescott. La critique de l’efficacité des politiques discrétionnaires keynésiennes conduit, en matière budgétaire comme en matière monétaire, à privilégier l’adoption de règles supposées renforcer la confiance des marchés ;
  • l’héritage ordo-libéral allemand qui promeut un encadrement strict de la dette et de déficits publics ;
  • les effets de la politique budgétaire d’un État se déversent aussi sur les économies des autres membres de la zone monétaire (un État de la zone euro se retrouvant en défaut de paiement met en péril la confiance dans sa monnaie et donc, par ricochet, dans les autres pays de la zone euro) ;
  • l’état des finances publiques d’un État peut contrarier les objectifs de la politique monétaire unique (la BCE ne doit pas être contrainte à monétiser les déficits publics).

Il a donc été vu comme nécessaire d’encadrer les finances publiques budgétaires. Les États européens ont fait le choix d’une discipline par la règle. Le budget européen reste minimaliste et témoigne de l’absence de projet fédéraliste.

Années 2000 : impact sur les politiques européennes de discipline budgétaire

Le ralentissement de l’activité mondiale et européenne, à partir de 2001, ouvre une période de remise en cause profonde du PSC. Ce sont les « grands pays » de la zone euro qui connaissent la plus forte dégradation de leurs finances publiques. Ainsi, de 2002 à 2005, l’Allemagne, la France et l’Italie connaissent des déficits supérieurs à 3 %, en contravention avec le PSC.

La crise devient manifeste lorsque le Conseil européen, en novembre 2005, refuse d’adopter les sanctions réclamées par la Commission à l’encontre de l’Allemagne, de la France et de l’Italie, dans le cadre de la procédure pour déficit excessif. La réforme de 2005, née de désaccords politiques majeurs, aboutit donc à une remise en cause de l’application automatique de la procédure pour déficit excessif. Elle souligne la nécessaire appréciation des choix de politique économique du pays en cause. Ce compromis est fortement désavoué par la Banque centrale européenne.

La crise de 2008 entraînant des plans de sauvetage des banques et des politiques de relance se traduit par une forte hausse de l’endettement public. Dès 2010, la volonté est affirmée de réduire cet endettement, d’autant plus avec l’apparition de la crise des dettes souveraines. Cette même année est créé le Semestre européen qui est un cycle de coordination des politiques économiques et budgétaires au sein de l’Union européenne.

Dans le cadre du Semestre européen, les États membres alignent leurs politiques économiques et budgétaires sur les règles et les objectifs arrêtés au niveau de l’Union européenne. Les gouvernements ont l’obligation de présenter leurs projets de budgets à la Commission européenne (qui peut les valider ou demander à ce qu’un nouveau projet de budget soit présenté), préalablement à leur adoption par les parlements nationaux.

Le Pacte budgétaire européen

Le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) signé en 2012, ou encore appelé Pacte budgétaire européen, a pour objectif principal de renforcer les règles destinées à favoriser la discipline budgétaire :

  • une « règle d’or » des finances publiques qui impose que le déficit public structurel (hors impact de la conjoncture économique) ne doit pas dépasser 0,5 % du PIB ;
  • un « mécanisme de correction automatique » qui, en cas de non-respect de la règle d’or, oblige l’État à adopter les mesures correctrices prévues ;
  • des sanctions quasi automatiques (avertissements de la Commission européenne, avant amendes infligées par la Cour de justice européenne) en cas de non-respect du ratio de 3 % du déficit public.

Le Pacte budgétaire affirme aussi que les pays doivent présenter une trajectoire de redressement des finances publiques si le seuil de 60 % de dette publique par rapport au PIB est dépassé. Celle-ci doit être réduite d’un vingtième par an. Afin d’introduire une certaine souplesse dans l’application du texte, la situation conjoncturelle des États membres est prise en compte, puisque le Pacte évoque la possibilité de déroger aux 3 % en cas de circonstances exceptionnelles.