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Et voici l’analyse du premier sujet.
Sujet 1 : Qu’est-ce qui a fait et qui fait du dollar une monnaie internationale ?
Ce sujet étant relativement classique, on peut s’attendre à ce qu’il soit majoritairement choisi par les candidats. Les bonnes copies seront celles qui utiliseront aussi bien les théories économiques que les faits historiques (à la manière des sujets de type HEC, qui demandent souvent aux candidats de se placer dans une perspective historique).
Phase de définitions et de contextualisation
La première chose à faire est de définir ce qu’est une monnaie internationale. On peut s’appuyer sur les trois fonctions aristotéliciennes de la monnaie et les appliquer à l’échelle mondiale (réserve de valeur, unité de compte, intermédiaire des échanges). Empiriquement, on constate que le dollar assure ces fonctions.
Il va donc falloir expliquer pour quelles raisons le dollar est devenue une monnaie internationale et comment il s’est maintenu à cette position dominante. On peut aussi se demander si le dollar est encore légitime comme monnaie internationale incontestée, s’il représente une solution d’avenir (troisième partie).
La notion de SMI (ensemble de règles qui régissent les relations monétaires entre les pays) est ici intéressante. Selon Kindleberger, la monnaie internationale permet la stabilité du SMI, et facilite les échanges internationaux en limitant l’incertitude. Si la Grande-Bretagne a assumé son rôle d’« hégémon » et a assuré la stabilité du SMI en modifiant ses taux d’escompte tout au long du XIXe siècle, permettant une certaine stabilité de la croissance, les États-Unis sont bien plus égoïstes (« notre monnaie, votre problème » selon les dires de John Connally, secrétaire d’État sous Nixon). Cette idée va nous permettre de remettre en cause l’efficacité du dollar comme monnaie internationale, pour mieux montrer qu’il n’a néanmoins pas de concurrents ou d’alternatives crédibles à court terme.
Contexte historique
Ici, on pourra retenir plusieurs « temps » historiques qui ont permis d’établir et de maintenir le dollar comme monnaie internationale (si les plans historiques sont souvent déconseillés par les professeurs, ils sont plutôt efficaces face à ce type de sujet).
Un premier temps au lendemain de la Première guerre mondiale, qui est celui de l’émergence du dollar comme potentielle monnaie internationale. L’Europe est affaiblie par la guerre, notamment la Grande-Bretagne qui était alors l’« hégémon » (selon le terme de Kindleberger) et qui connaît un taux d’inflation de l’ordre de 20 % sur la période 1918-1920, empêchant de maintenir la parité-or.
Les États-Unis, dont la force industrielle s’affirme depuis le début du siècle avec l’apparition du taylorisme et du fordisme, se font alors créanciers de l’Europe, et exigent des paiements sous forme métallique. Les exportations industrielles américaines augmentent également, augmentant ainsi l’utilisation du dollar. Le pays détient alors, dès 1920, 44 % du stock d’or mondial. Le dollar devient de plus en plus crédible comme monnaie internationale, notamment après être devenu une devise-clé dans le cadre du Gold Exchange Standard mis en place suite à la conférence de Gênes en 1922. On a donc ici une dialectique entre d’une part un affaiblissement de l’Europe et surtout de la Grande-Bretagne, et d’autre part une affirmation de la puissance économique américaine, justifiant le poids croissant du dollar dans le SMI.
Un deuxième temps à partir des accords de Bretton-Woods le 22 juillet 1944, qui affirment la position du dollar comme monnaie internationale. Le dollar devient la monnaie de référence dans ce nouveau SMI puisqu’elle est la seule monnaie convertible en or, et que chaque monnaie est convertible en dollars. Les États-Unis sont donc exonérés de tout ajustement de leur monnaie, tandis que les autres monnaies doivent s’ajuster face au dollar. Néanmoins, ce SMI apparaît alors comme un bien commun qui profite à tous, car ce système permet l’essor du commerce international et la forte croissance des Trente Glorieuses.
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Cependant, dès 1958, on constate que le dollar est de plus en plus abondant et donc que le taux de couverture des États-Unis par rapport à l’or est plus faible. Ils refusent pourtant de remonter leur taux d’intérêt pour assurer la stabilité du système afin de ne pas pénaliser leur économie. Ce système s’accompagne dès lors d’un privilège exorbitant pour les États-Unis, qui peuvent faire du déséquilibre commercial sans jamais devoir rééquilibrer car leur monnaie est demandée également comme réserve de valeur. La dévaluation Nixon de 1971 puis les accords de Kingston en 1976 entérinent finalement la fin du système de Bretton-Woods.
Enfin, on peut distinguer un troisième temps depuis 1976. On constate qu’on entre alors dans un « non-système international » selon l’expression de Henri Bourguinat, mais que le dollar reste la monnaie dominante. Il est encore largement utilisé comme intermédiaire des échanges et comme réserve de valeur. On peut l’expliquer par le fait que l’euro n’apparaît pas comme un concurrent crédible, notamment du fait de son manque de liquidité, mais aussi car les PED et notamment la Chine maintiennent artificiellement la valeur du dollar à un niveau élevé grâce à leurs réserves de change.
Les États-Unis conservent donc un privilège exorbitant qui leur permet de maintenir des déficits jumeaux. Cette situation apparaît sous-optimale, notamment du fait du manque de coordination entre les pays, qui a conduit G. Mantega à parler de guerre des monnaies après le quantitative easing mené notamment par les États-Unis après la crise de 2008, et face à la multiplication des crises de change, notamment dans les années 1990. Cependant, la difficulté de réformer le SMI à court terme implique le maintien du dollar comme monnaie internationale.
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