mondialisation

La mondialisation, en transformant radicalement les échanges économiques, sociaux et culturels à l’échelle mondiale, a suscité un vif intérêt quant à ses implications sur les États et la société civile.

Une certaine remise en cause de la souveraineté des États

La souveraineté a d’abord un fondement interne. Elle est liée à la constitution et à l’organisation de l’autorité sur un territoire donné. La souveraineté caractérise donc un pouvoir politique qui n’est soumis juridiquement à aucun pouvoir compétent pour décider à sa place ou donner des ordres.

La souveraineté n’est nullement contradictoire avec l’existence du droit international. Elle n’implique en aucune manière que l’État puisse s’affranchir des règles du droit international. Si la souveraineté semble impliquer l’existence d’un « domaine réservé » de l’État, celui-ci n’est nullement intangible et a évolué de façon sensible au fil des dernières décennies. Par exemple, les traités successifs qui, depuis le Traité de Rome en 1957, ont mis en place les institutions européennes attribuent à l’Union européenne un certain nombre de compétences.

La répartition des compétences est une question clé de la construction européenne : quel niveau, national ou supranational, est le plus apte à avoir telle ou telle compétence ? Dans l’Union européenne, c’est le principe de subsidiarité qui a été adopté. Il vise à privilégier le niveau inférieur (l’État) aussi longtemps que le niveau supérieur ne peut pas agir de manière plus efficace pour prendre une décision.

Les organisations internationales peuvent avoir un pouvoir sur les États

Par exemple, le FMI et la Banque mondiale peuvent exiger certaines politiques économiques comme conditionnalité à leur aide financière (plans d’ajustement structurel). Ou encore la Troïka (Commission européenne, BCE et FMI) avec les pays européens ayant demandé des aides financières.

Une politique monétaire unique dans la zone euro menée par la BCE et des politiques budgétaires contraintes par des règles à respecter limitent le pouvoir des États de la zone euro à mener certaines politiques. Peut se poser à cet égard la question de la légitimité démocratique mise en avant par Jean-Paul Fitoussi.

Le pouvoir des FMN peut fragiliser la souveraineté des États

Charles-Albert Michalet, dans Mondialisation, la grande rupture (2007), affirme que les États-nations n’existent plus sur le plan économique, face à des entreprises dont la nationalité n’est plus qu’anecdotique. Les firmes-réseaux se sont engagées dans des stratégies globales basées sur une attitude extrêmement flexible vis-à-vis de la localisation territoriale des activités.

Les nouveaux travaux sur ce phénomène parlent d’exterritorialisation des entreprises, qui correspond au fait que le lien qui rattachait la firme à un territoire se trouve rompu. Dans la phase appelée globalisation, l’État-nation perd son statut de référence et se transforme en un simple territoire économique, une plate-forme, pour des activités dont la nature est déterminée de l’extérieur. C’est-à-dire par des investisseurs obéissant à une stratégie globale.

Les entreprises multinationales peuvent exercer un rôle politique international significatif

Elles peuvent être à même d’influencer les règles de la mondialisation économique par de nombreux canaux. Certaines entreprises ont ainsi un rôle important dans la détermination de l’environnement de la mondialisation : comptabilité, environnement juridique, assurance… Par exemple, les grands cabinets d’audits internationaux, Deloitte, Ernst & Young, KPMG et PricewaterhouseCoopers, ont joué un rôle crucial dans la définition des nouvelles règles comptables internationales qui s’imposent à toutes les sociétés cotées européennes depuis le 1er janvier 2005.

La forme la plus extrême d’influence des acteurs économiques privés se lit dans leurs capacités à inscrire dans le droit international public les règles destinées à servir leurs intérêts particuliers. Des études ont ainsi montré comment une douzaine de dirigeants de multinationales américaines opérant dans les secteurs de la pharmacie, de l’informatique et du divertissement ont écrit ce qui deviendra plus tard les accords internationaux sur la propriété intellectuelle, instaurant une protection exclusive des brevets sur une durée de vingt ans. Jamais la loi internationale n’avait été aussi favorable aux multinationales.

Les États ont cependant une place essentielle dans la mondialisation

Les institutions jouent un rôle majeur

Douglass North (Institutions, Institutional Change and Economic Performance, 1990), chef de file de la nouvelle économie institutionnelle, définit les institutions comme l’ensemble des règles formelles et informelles qui régissent les interactions humaines.

Les institutions formelles comportent les règles fondamentales, comme le système juridique qui définit la place respective de l’État, des individus et des organisations, ainsi que la structure du système politique, mais qui définit aussi les droits de propriété, toutes choses fondamentales pour l’existence et le bon fonctionnement des marchés.

Les institutions informelles représentent les systèmes de valeurs et croyances, les normes et représentations sociales, les traditions, les coutumes, la religion, la morale. Elles connaissent des changements beaucoup moins rapides que les institutions formelles, mais pour que les changements de ces dernières, changements impulsés par les décideurs politiques, soient acceptés, il faut tenir compte de ces règles informelles.

Les analyses sur le rôle des institutions rappellent que la mondialisation ne doit pas être perçue comme une force anonyme qui imposerait depuis l’extérieur des changements dans les économies nationales. Ce sont les gouvernements qui choisissent de s’ouvrir au commerce international et aux capitaux étrangers.

Alors que les recherches se multiplient concernant le rôle des institutions dans la croissance économique et la régulation internationale des économies, se pose le problème de l’efficacité des institutions. Les analyses récentes du FMI ou de la Banque mondiale montrent ainsi que l’efficacité de l’investissement national ou étranger dépend de la qualité de l’environnement institutionnel et réglementaire.

Le rôle de la société civile

La société civile est extérieure au secteur public de la gouvernance officielle. Font partie des activités de la société civile les efforts délibérés d’associations, d’organisations non lucratives et non officielles pour peser sur les décisions politiques, les politiques menées, les normes adoptées.

La société civile mondiale existe lorsque les groupes civiques s’occupent de questions transfrontalières et/ou utilisent des modes de communication transnationaux et/ou disposent d’une organisation mondiale. Elle s’est en partie développée avec les tentatives de citoyens d’obtenir plus de poids dans la gouvernance mondiale.

La société civile mondiale offre d’importantes possibilités pour améliorer la gouvernance mondiale

Elle peut contribuer à un développement plus humain de la mondialisation, en améliorant le bien-être matériel et la cohésion sociale. La société civile constitue aussi un canal privilégié d’éducation du public sur la mondialisation. Elle peut alimenter le débat, approfondir la transparence et la responsabilité dans la gouvernance mondiale, faire pression sur les multinationales pour qu’elles adoptent des comportements responsables.

Plus de 2 000 organisations non gouvernementales, d’origine privée et à caractère non lucratif, peuvent ainsi être de véritables contre-pouvoirs dans la mobilisation d’une « opinion mondiale » sur des grandes causes internationales (droits de l’homme, droits sociaux, environnement, pollution…).

Mais il faut aussi reconnaître des effets potentiellement négatifs de la société civile

Certains éléments d’une société sont mal attentionnés. Certaines associations cherchent activement à diminuer le bien-être humain et la justice sociale. Les réseaux criminels transnationaux, racistes, ultranationalistes ou fondamentalistes utilisent les réseaux mondiaux de communication pour promouvoir l’intolérance et la violence. La société civile mondiale n’est pas vertueuse par nature.