fin

Nous allons réaliser le plan détaillé du sujet « Fin du mois versus fin du monde ». C’est un sujet d’oral HEC assez atypique en ce qu’il est très large et permet de lier plusieurs chapitres du programme, qui sont assez peu fréquemment rapprochés.

Préambule

Avant de poursuivre, je te conseille de te poser 30 minutes pour réfléchir au sujet. Ce sera toujours plus utile avant de regarder le plan détaillé qui suit. Il est évident que ce dernier n’est qu’une proposition de corrigé et n’est en rien le seul plan possible.

Sur un sujet aussi large que celui-ci, il est possible d’obtenir une très bonne note en réalisant un plan différent, tout en sachant qu’une part importante de la note se joue sur la phase de questions-réponses à la suite de ce sujet.

Analyse préliminaire du sujet

On a ici un sujet qui articule deux notions autour du mot versus. En vertu des règles de méthodologie de la dissertation, on évitera de traiter dans une première partie « la fin du mois » et dans une deuxième partie « la fin du monde ». On essayera plus volontiers de traiter l’entièreté du sujet dans chacune des parties de notre exposé. Il conviendra donc de comprendre en profondeur les liens entre les deux notions, en quoi la notion de « fin du mois » influence-t-elle celle de « fin du monde », et inversement.

Encore faut-il comprendre ce que « fin du mois » et « fin du monde » signifient…

Définition des termes

Dans un tel sujet, c’est là que va se jouer tout l’exposé, car les termes sont très larges et il faut leur donner une acceptation précise et donc influencer le plan que tu proposeras.

Fin du mois : expression commune, souvent employée dans les médias renvoyant au fait que pour certains ménages, il est difficile de vivre en attendant la paye mensuelle suivante. Il est donc question des individus pauvres, le taux de pauvreté s’élevant à 14,5 % en France métropolitaine en 2022 d’après l’Observatoire des inégalités. Pour continuer de parler en termes médiatiques, il sera donc question de la préservation du pouvoir d’achat des ménages les plus fragiles et in fine des inégalités.

Fin du monde : peut renvoyer à la question des enjeux environnementaux. On peut considérer que si l’économie ne s’adapte pas aux enjeux environnementaux, un risque possible serait à terme « la fin du monde ». Il sera donc question dans notre exposé du développement d’objectifs climatiques ambitieux afin de préserver notre planète.

Attention, ne pas oublier d’analyser le mot versus qui peut sembler anodin, mais qui est le mot le plus important du sujet en ce qu’il articule les deux notions présentées précédemment.

Versus : mot peu habituel dans les sujets d’ESH ! Suggère qu’un seul et unique choix doit être fait entre deux possibilités et, plus encore, que ces deux possibilités sont strictement inconciliables.

Voilà le cœur de notre analyse : la notion de lutte contre la fin fin du mois et celle de lutte pour éviter la fin du monde sont-elles conciliables, ou alors est-ce que le fait de se pencher sur une implique nécessairement que l’autre se réalisera ?

Problématique possible

La justice sociale est-elle compatible avec des objectifs environnementaux ambitieux ?

Proposition de plan détaillé

Introduction

Amorce

Dans une tribune au Monde du 29 décembre 2023, Emmanuel Macron affirmait : « Nous devons accélérer en même temps sur le plan de la transition écologique et de la lutte contre la pauvreté. » Le Président rappelle ainsi la nécessité de conserver les deux politiques. Cet objectif se veut ambitieux, mais est-il concrètement réalisable ? Peut-on réellement concilier les deux luttes « en même temps » ?

Définitions

La notion de fin du mois est une expression commune, souvent employée dans les médias pour renvoyer au fait que pour certains ménages, il est difficile de vivre en attendant la paye mensuelle suivante. Il est donc question des individus pauvres, le taux de pauvreté s’élevant à 14,5 % en France métropolitaine en 2022 d’après l’Observatoire des inégalités, mais plus encore des politiques de préservation du pouvoir d’achat et de lutte contre les inégalités.

On peut également considérer que la « fin du monde » renvoie au fait que si l’économie ne s’adapte pas aux enjeux environnementaux, un risque possible serait à terme « la fin du monde ». Il sera donc question du développement d’objectifs climatiques ambitieux afin de préserver notre planète.

Problématisation et cadrage

S’il existe un consensus fort sur la nécessité et l’urgence d’agir pour lutter contre le changement climatique, il semble qu’il y ait des difficultés à articuler conjointement ces deux luttes. Quelles sont les actions, tant politiques que technologiques ou économiques, les plus efficaces ? Les politiques de justice sociale sont-elles simplement incompatibles avec la politique de transition écologique ? Plus précisément, la lutte contre la pauvreté influence-t-elle la conservation d’objectifs environnementaux ambitieux ? Cette question se pose également en termes réciproques : la conservation d’objectifs environnementaux ambitieux influence-t-elle la lutte contre la pauvreté ? Si tel est le cas, jusqu’où faut-il sacrifier le pouvoir d’achat des générations présentes pour assumer nos responsabilités envers les générations futures ?

Nous cadrerons notre analyse dans une période suffisamment large, depuis le XIXe siècle, puisqu’il était déjà question des politiques de lutte contre la pauvreté à cette époque, et dans l’ensemble des pays du monde, pour nous permettre d’apprécier plus globalement la notion de lutte contre la pauvreté. Même si notre analyse sera largement appuyée sur l’actualité et même l’avenir de la question.

Problématique

Ainsi, la justice sociale est-elle compatible avec des objectifs environnementaux ambitieux ?

Plan

Nous montrerons tout d’abord que la lutte contre la pauvreté influence la conservation d’objectifs environnementaux ambitieux (I) avant de souligner réciproquement que la conservation d’objectifs environnementaux ambitieux influence les politiques de justice sociale (II). Pourtant, ces deux notions seront plus liées que jamais à l’avenir, il convient donc de trouver dès maintenant un terrain de conciliation entre transition écologique et justice sociale (III).

Développement

I – La lutte contre la pauvreté influence la conservation d’objectifs environnementaux ambitieux
A. Les coûts relatifs aux politiques de lutte contre la pauvreté contraignent les financements nécessaires à la transition écologique
  •  Grand développement des politiques de lutte contre la pauvreté au XXe siècle qui implique de forts coûts au niveau de l’État : la part des dépenses publiques de protection sociale dans le PIB est passée de 14 % en 1960 à 31 % en 2023.
  • Rosanvallon parlait à cet égard de « siècle de la redistribution » (La Crise de l’État-providence, 1981).
  • Encore au XXIe siècle, cette préoccupation pour la redistribution subsiste. La France est ainsi le pays avec le plus fort taux d’imposition après le Danemark.
  • D’autant qu’encore 9,3 millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté en France, si bien que de telles politiques de lutte contre la pauvreté sont encore pertinentes.
B. La lutte contre la pauvreté implique par essence une baisse des objectifs environnementaux
  • Lors de chaque sommet de la Terre (depuis 1972), les pays du Sud expriment leur volonté de se développer malgré les recommandations des pays du Nord, donc aux objectifs environnementaux. Ce développement permettrait en effet de faire baisser à terme les inégalités entre les pays. Pour autant, ce développement passe par une hausse de la pollution et donc une baisse des objectifs environnementaux (cf. courbe de Kuznets).
  • Ainsi, il semble véritablement que la lutte contre la pauvreté soit incompatible avec le verdissement de l’économie, il y a donc bien un « versus », un choix, entre la « fin du mois » et la « fin du monde ».
II – La conservation d’objectifs environnementaux ambitieux influence les politiques de justice sociale
A. Les coûts relatifs à la politique de transition écologique contraignent les financements nécessaires aux politiques de justice sociale
  • Le coût de la transition écologique entre 2018 et 2036 est estimé à au moins 6 800 milliards de dollars (rapport du FMI de 2018). De telles politiques sont nécessairement ambitieuses et contraignent donc les fonds nécessaires aux politiques de justice sociale.
  • L’exemple des politiques aux États-Unis : Inflation Reduction Act (2022), 400 milliards de dollars dépensés dans le verdissement de l’industrie.
  • Ainsi, les forts coûts relatifs à la transition écologique viennent freiner les politiques de lutte contre la pauvreté en ce que ces dernières nécessitent également des politiques onéreuses. Il semble donc qu’il faille faire un choix entre fin du mois et fin du monde.
B. Par essence, on ne peut lutter contre le réchauffement climatique en se préoccupant des inégalités
  • Plus encore qu’une question de budget, la lutte contre le réchauffement climatique semble impliquer, dans une certaine mesure, que la préoccupation pour l’évolution des inégalités sera moindre.
  • Il s’agit ici de questionner la priorité des engagements de l’État, de privilégier ici une perspective de long terme parfois incompatible avec la lutte contre la pauvreté.
III – Vers un terrain de conciliation entre transition écologique et justice sociale à l’avenir ?
A. Pourtant, ces deux notions seront d’autant plus liées à l’avenir, il faut trouver un terrain de conciliation dès maintenant
  • Plus il y a d’inégalités, plus il y a de pollution : FMI (2022), 10 % les plus riches polluent à hauteur de 50 % des émissions de GES mondiales. Oxfam, entre 1990 et 2019, les 1 % plus riches au niveau mondial polluent deux fois plus que les 50 % les plus pauvres.
  • Rapport de 2022 du Laboratoire sur les inégalités mondiales : le réchauffement climatique touche plus durement les populations les moins favorisées, augmentant ainsi les inégalités.
  • Les deux notions sont donc liées, si bien que la lutte contre le réchauffement climatique semble indissociable de celle contre la pauvreté, et inversement.
B. Il existe en effet des moyens de concilier les deux luttes
  • Les recettes des taxes environnementales pour financer les politiques de lutte contre les inégalités : 56 milliards en France en 2018 (Insee). Pigou, Économie du bien commun (1920), la taxe pigouvienne a une double portée : réduire la pollution et financer d’autres projets de lutte contre celle-ci.
  • Thomas Grjebine (Greenflation : les enjeux de la première crise de la transition écologique) : la transition écologique entraîne une inflation qui peut créer des inégalités grandes dans l’accès aux biens de première nécessité. Lutter contre le réchauffement permet de prévenir les conséquences néfastes sur les inégalités.
  • Laurent, Le Bel avenir de l’État-providence (2014) : réhabilitation de l’État-providence par l’auteur qui suggère que « nos crises écologiques sont des questions sociales qui peuvent se comprendre à la lumière des inégalités de revenu et de pouvoir, et se résoudre à l’aide de principes de justice et de bonnes institutions ». Un nouvel État-providence pourrait alors permettre de concilier objectifs de développement durable et lutte contre la pauvreté.

Conclusion

En définitive, nous avons d’abord remarqué que les politiques de lutte contre la pauvreté rendent complexe la conservation d’objectifs environnementaux ambitieux. Réciproquement, il en est de même pour la politique de transition énergétique qui rend difficile celle de lutte contre la pauvreté. Pourtant, nous avons montré qu’à l’avenir, ces deux notions seront particulièrement liées et qu’il faut développer, et qu’il existe certains moyens d’articuler ces deux politiques.

Dans sa Lettre à nos petits-enfants (1930), Keynes imaginait ainsi le monde au XXIe siècle où pour la première fois, la principale activité de l’homme ne sera plus de chercher sa nourriture. Cette prévision de l’auteur semble aujourd’hui bien loin de la réalité, et sa réalisation sera sûrement conditionnée à cette capacité de l’homme à lutter contre les difficultés de fin du mois autant que la lutte contre la fin du monde.

 

C’est fini pour le plan détaillé. Encore une fois, ce n’est qu’une proposition de plan, d’autres sont évidemment possibles. Le sujet « Fin du mois versus fin du monde » est donc d’une grande actualité et permet de s’exercer sur un sujet large et très intéressant, car il est d’une grande actualité.

Tu peux cliquer ici si tu veux consulter toutes nos autres ressources d’ESH.