Pour tout khâgneux A/L ou B/L qui suit des cours de géographie, le commentaire de carte topographique est un passage obligé. Pour réussir l’épreuve, tu auras besoin de solides connaissances sur les régions françaises. Après notre article consacré à la Nouvelle-Aquitaine, nous te proposons aujourd’hui de découvrir la région Île-de-France. Nous nous appuierons notamment sur La France des 13 régions de Laurent Carroué (Armand Colin, 2017).
Une rapide présentation de l’Île-de-France
Pour commencer, quelques chiffres à connaître
- Superficie : 12 012 km².
- Densité : 1 025 habitants au km². Il s’agit de la région la plus dense de France. On y compte dix fois plus d’habitants au km² que dans le reste du territoire métropolitain.
- Population : 12 324 300 habitants en 2021. C’est la région la plus peuplée de France.
- PIB : avec 726 milliards d’euros, l’Île-de-France est la région qui produit le plus de richesses.
- Taux de chômage : 7,2 % au quatrième trimestre 2021, un chiffre proche de la moyenne de la France métropolitaine à 7,8 %.
On parle parfois de l’Île-de-France comme de la « région capitale ». D’abord parce que sa capitale régionale est aussi la capitale du pays. Ensuite parce qu’elle concentre un cinquième de la population et plus de 30 % du PIB français sur à peine 2 % du territoire national ! La région est une centralité administrative et politique (concentration des fonctions de commandement), mais aussi une centralité universitaire et dans le réseau de transports.
L’Île-de-France compte sept départements en plus de Paris. Extra-muros, mais collés aux frontières parisiennes, se trouvent les départements dits de la « petite couronne ». Il s’agit des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. À la suite de ces derniers, on trouve les départements de la « grande couronne » : les Yvelines, le Val-d’Oise, la Seine-et-Marne et l’Essonne.
L’Île-de-France, une région capitale centrée sur Paris
Paris, capitale historique et ville mondiale
Paris est désignée capitale de la France à la fin du Xᵉ siècle, sous le règne de Hugues Capet. Au fil de l’expansion du domaine royal, le territoire qui entoure la ville prend réellement de l’importance.
Au XIIᵉ siècle, alors que Philippe Auguste est roi, le Parlement et la Chambre des comptes, du trésor et de la monnaie y sont installés. En dépit de la parenthèse versaillaise sous Louis XIV, Louis XV et Louis XVI, Paris est toujours restée le cœur politique du pays.
L’importance de Paris dépasse le territoire francilien ou français. La ville rayonne à un niveau plus global. Si dans les années 1990, la sociologue Saskia Sassen n’a pas retenu Paris comme ville mondiale, elle est aujourd’hui considérée comme telle par la majorité des spécialistes. De fait, la capitale française exerce des fonctions stratégiques à l’échelle mondiale. Elle est un centre qui organise les flux internationaux et s’inscrit dans des réseaux comme pôle de commandement dans la mondialisation.
La ville de Paris concentre à elle seule un certain nombre de fonctions de commandement. Elle constitue une centralité politique, judiciaire, économique, intellectuelle et culturelle.
Paris, une centralité administrative, judiciaire et économique

Sur le plan politique et judiciaire, on retrouve à Paris :
- le quartier des Ambassades (en jaune sur le schéma),
- le quartier des Ministères (en rouge),
- des lieux centraux de la politique française avec 1) l’Élysée, 2) l’Assemblée nationale, 3) Matignon et 4) le Sénat,
- l’ancien et le nouveau palais de justice (triangles jaunes).
Paris est aussi une centralité économique, comme l’indiquent les éléments en vert sur le schéma. La ville concentre :
- le CBD (Central Business District) de La Défense, un projet lancé par De Gaulle dans les années 1960,
- le quartier Saint-Lazare, quartier d’affaires historique,
- la place de la Bourse, où étaient historiquement implantées les activités boursières aujourd’hui concentrées à La Défense. La Bourse de Paris représente à elle seule près de la moitié des emplois financiers français.
On parle parfois d’un « axe des affaires » (ligne verte sur le schéma) pour décrire l’alignement de ces centralités économiques dans l’ouest parisien.

Paris, une centralité intellectuelle et culturelle

Si nous avons décrit jusqu’à présent des éléments de hard power parisien, le soft power est également prégnant. Pour commencer, la prédominance culturelle de Paris à l’échelle régionale est flagrante. On tend parfois à réduire (à tort) l’identité culturelle francilienne à la seule capitale régionale.
L’Île-de-France, dans son ensemble, accueillait près de 47 millions de touristes par an, dont 42 % d’étrangers (chiffres avant la pandémie). D’aucuns argumenteront qu’il existe des centralités touristiques hors de Paris (Château de Versailles, Eurodisney, parc Astérix), mais en réalité, la majorité d’entre elles se trouvent intra-muros. Sur le schéma ci-dessus, on peut citer :
- (a) le Sacré-Cœur et plus largement le quartier de Montmartre (rendu populaire à l’étranger notamment grâce au film de Jean-Pierre Jeunet Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain),
- (b) l’Arc de Triomphe,
- (c) la tour Eiffel,
- (d) Le Louvre (le plus grand musée du monde),
- (e) Notre-Dame.
L’importance culturelle et symbolique de Paris est telle que de nombreux acteurs politiques ont cherché à marquer les mémoires par des aménagements ou des infrastructures dans la ville. Sur le schéma ci-dessus, c’est le cas :
- du musée du Quai Branly (1) inauguré par Jacques Chirac en 2006,
- de l’Opéra Bastille (2) et de la Grande Arche (3) dans le cadre des « grands travaux » de François Mitterrand,
- si on remonte plus loin, des places royales créées notamment par Louis XIV, mais aussi de l’Opéra Garnier voulu par Napoléon III (4).

Enfin, Paris s’impose comme une centralité intellectuelle grâce aux écoles et aux institutions qu’elle concentre. On peut citer le Collège de France, Sciences Po, la Sorbonne, l’ENS et plus récemment Paris-Sciences-Lettres (PSL) qui est la 26ᵉ université mondiale d’après le classement de Shanghai. Le symbole même de cette concentration d’intellectuels et de formations est le Quartier latin (voir sur le schéma).
Mais pour le moment, nous n’avons parlé presque que de Paris… Quelle place alors pour les départements extra-muros ?
Paris et le désert francilien ?
Une rivalité entre Paris et les autres départements ?
Avec ce titre, les fans de géographie auront saisi la référence à Jean-François Gravier. Dans Paris et le désert français, le géographe constate que la capitale concentre l’essentiel de la richesse et du dynamisme, laissant parfois à l’écart le reste du pays. Ce raisonnement ne pourrait-il pas être appliqué à l’échelle de l’Île-de-France ?
La dualité Paris-Île-de-France est importante depuis quelques années. Lors des élections régionales de 2021, la présidente sortante de la région, Valérie Pécresse (Les Républicains), a axé sa campagne sur le fait de prendre en compte la totalité de la population francilienne. Par exemple, sur la question des transports et notamment des embouteillages, elle n’a eu de cesse d’affirmer que la mairie de Paris était coupable de ces désagréments. Sa politique « parisiano-centrée » pénaliserait le reste de la région.
Son opposante socialiste, Audrey Pulvar, qui siège au Conseil municipal de Paris, a justement passé la campagne à prouver qu’elle ne défendrait pas que des intérêts parisiens, mais plus largement franciliens.
Des centralités extra-muros

En réalité, il serait abusif de dire que les départements extra-muros seraient des périphéries mal intégrées. Il existe aussi de nombreuses centralités extra-muros.
Pour commencer, sur le plan intellectuel, on peut observer des centres universitaires ou d’innovation, que cela soit en aéronautique, en informatique, en électronique ou en pharmacie. On peut citer :
- la Plaine Saint-Denis, qui concentre un pôle santé (agences du ministère de la Santé, laboratoires), un pôle image et son avec de nombreux plateaux de télévision, ainsi que l’Université Paris Nord,
- le pôle universitaire d’Évry au sud de Paris,
- la « Silicon Valley » francilienne à Orsay-Saclay-Versailles, avec l’Université Paris-Sud (classée 40ᵉ au classement de Shanghai en 2021).

Ensuite, l’industrie est également très développée en Île-de-France. D’abord avec des activités métallurgiques et mécaniques, mais aussi dans l’énergie, le luxe, l’agroalimentaire, l’automobile et l’armement.
Pour finir, comme nous l’avons évoqué précédemment, il existe malgré tout des centralités touristiques extra-muros. C’est le cas d’Eurodisney (premier parc à thème d’Europe), du parc Astérix ou du Château de Versailles.
L’Île-de-France, une terre de contrastes marquée par de fortes inégalités
En réalité, plus qu’une opposition de Paris et d’un « désert francilien », il faut comprendre l’Île-de-France dans ses contrastes comme une terre d’inégalités. Si la région est une des plus riches de France, c’est aussi une des plus inégalitaires.
La Seine-Saint-Denis est souvent citée comme exemple de ces contrastes. Le portrait très stéréotypé qu’on fait du “9-3” doit être significativement nuancé, puisqu’il connaît une forte gentrification et possède un pôle universitaire attractif. On peut néanmoins noter que le département possède le taux de pauvreté le plus élevé de métropole, à 27,9 %. Ce chiffre est radicalement opposé à celui des Yvelines, département situé à quelques kilomètres seulement et qui a le plus bas taux de pauvreté de France.
D’après l’Observatoire des inégalités, Paris et sa région battent des records. Les revenus des 10 % des ménages franciliens les plus aisés ont un écart avec les 10 % des ménages les plus pauvres plus important que dans le reste du pays.
De l’est à l’ouest, la banlieue parisienne est loin d’être monolithique. On gagne donc à parler des « banlieues parisiennes » plurielles qui se caractérisent par leur grande diversité.
Une opposition est/ouest

À l’ouest, on trouve les banlieues cossues (Saint-Germain-en-Laye, Versailles, Saint-Cloud), mais aussi des arrondissements « chics » de Paris comme le VIIᵉ, le XVᵉ ou le XVIᵉ. Les départements des Hauts-de-Seine et des Yvelines votent historiquement à droite (Les Républicains) ou centre-droit (En Marche !).
Au sud et à l’ouest de l’Île-de-France, on peut citer de nombreuses villes où le revenu moyen dépasse les 90 000 € par an. C’est le cas de Neuilly, Saint-Nom-la-Bretèche, Le Vésinet ou encore Marnes-la-Coquette. Les fans des Inconnus pensent peut-être à leur chanson Auteuil Neuilly Passy qui reflète bien l’image qu’on a souvent de l’ouest francilien plutôt bourgeois.
Au contraire, le nord et l’est de la boucle de la Seine correspondent à des territoires où se sont développés des ateliers, des usines et des entrepôts. Ils ont souvent concentré des populations ouvrières qui votaient davantage à gauche. On compte beaucoup de villes où le taux de pauvreté dépasse 40 %, à l’image d’Aubervilliers, de Clichy-sous-Bois ou encore de La Courneuve.
Tu en sais à présent un peu plus sur la région Île-de-France ! La lecture de cette fiche devrait t’avoir un peu aidé.e dans tes révisions pour les épreuves orales. N’oublie pas qu’il est indispensable de mobiliser tes connaissances théoriques dans ton commentaire de carte topographique. Attention cependant à ne pas tomber dans la récitation, ce qui pourrait te porter préjudice !
Pour trouver le juste équilibre, n’hésite pas à consulter nos conseils pour réussir l’épreuve orale de géographie à l’ENS !