Chine

Nucléarisation nord-coréenne, incidents en mer de Chine du Sud, tensions dans le détroit de Taïwan : les occasions de crise sont nombreuses en Asie de l’Est. La Chine est souvent au centre de ses litiges et semble susciter la défiance de ses voisins orientaux et méridionaux. Elle a pourtant beaucoup à apporter à son voisinage.

N’hésite pas avant toute chose à consulter cet article sur Taïwan, expression de la rivalité entre la Chine et les États-Unis !

La Chine et son voisinage : le passage « d’un tiers-mondialisme chinois militant à la quête de légitimité de grand pays en développement » (Jean-Pierre Cabestan)

Des relations historiquement tendues avec le Japon

Depuis la fin du XIXᵉ siècle, la Chine et le Japon entretiennent des relations tendues. En plein « siècle de la honte », la Chine perd la première guerre sino-japonaise qui s’achève sur le traité de Shimonoseki en avril 1895. Elle cède alors l’île de Formose, l’archipel des Pescadores et une partie de la Mandchourie au Japon.

Dans les années 1930, le Japon envahit la Mandchourie (guerre de 15 ans). La violence du Sac de Nankin en 1937 participe encore aujourd’hui de tensions entre les deux pays. Le nombre de victimes fait toujours débat.

La Chine dans les années 1970 : leader du tiers-monde ?

En revanche, les relations chinoises avec ses autres voisins n’ont pas toujours été ainsi. En 1954, la Chine participe à la conférence de Genève aux côtés des deux Corées, du Laos, du Cambodge, du Vietnam et du Viet-Minh.

Un an plus tard, lors de la conférence de Bandung, elle s’affiche comme un leader du tiers-monde avec Nehru (Inde) et Sukarno (Indonésie). Après la révolution culturelle, l’Empire du Milieu développe ses relations avec le tiers-monde (terme aujourd’hui désuet) et soutient les mouvements de décolonisation.

À partir des années 1990, la Chine adopte une posture plus ambiguë avec ses voisins et s’affiche comme la puissance régionale

Dans les années 1990 et après 2002, la Chine met en place la « diplomatie du pourtour » ou zhoubian waijiao. Elle encourage ainsi l’approfondissement de ses liens avec ses voisins, tout en organisant l’Asie autour d’elle et en s’affichant comme puissance régionale centrale. Véritable « puissance polarisante » (La Chine dans le monde, Alice Ekman, 2018), la Chine règle ses litiges frontaliers et développe ses relations commerciales. Les collaborations avec ses voisins sont ensuite échelonnées sur huit niveaux allant du « partenariat constructif » au « partenariat stratégique ».

La Chine est partagée entre logique d’intégration et logique de puissance. On observe alors les prémisses des tensions avec son voisinage oriental.

Aujourd’hui, la Chine n’hésite pas à s’appuyer sur son voisinage pour servir ses intérêts, quitte à verser dans l’unilatéralisme

Un poids économique sans pareil

Championne du développement, la Chine a aujourd’hui un PIB (PPA) de 25 000 milliards de dollars, cinq fois celui du Japon. Elle possède huit des dix premiers ports mondiaux. Cette prépondérance économique lui permet de peser sur son voisinage pour servir ses intérêts.

C’est notamment observable dans sa gestion des eaux du Mékong. Fleuve limitrophe du Cambodge, du Vietnam, de la Thaïlande et de la Chine, le Mékong revêt une importance économique cruciale pour ces pays. Pourtant, la Chine gère unilatéralement les eaux du fleuve en construisant des barrages en amont. La création de la Mekong River Association en 1995 peine à améliorer la coopération. (Plus de détails sur la gestion du Mékong ici).

La Chine s’associe pour appuyer sa puissance géopolitique

La RPC s’associe donc souvent avec ses voisins lorsqu’elle peut y gagner quelque chose. L’aphorisme « considérez vos voisins à la fois comme des amis et comme des ennemis » (Les 36 stratagèmes, rédigé sous les Ming) résume bien sa doctrine.

Elle crée la BAII en 2015, notamment pour concurrencer le FMI. À l’exception du Japon, tous les pays d’Asie de l’Est en font partie. L’instance cherche à répondre aux besoins d’un continent sous-équipé. C’est aussi l’occasion pour la Chine d’appuyer son poids géopolitique, d’autant plus qu’elle finance pour moitié la BAII (en savoir plus sur la BAII ici).

La Chine, impérialiste malgré elle ?

Dans l’article de 2018 intitulé « EU/Chine : qui sera le premier ? », Pascal Gauchon soutient que cet impérialisme et cet unilatéralisme chinois seraient dus à son ascension économique rapide. Elle serait amenée malgré elle à s’imposer comme la puissance dominante, en Asie orientale notamment.

Cela suscite ainsi la défiance des pays voisins (notamment au sujet des nouvelles routes de la soie).

Mais la Chine représente aussi de véritables aubaines pour son voisinage et, a contrario, elle gagne à entretenir de bonnes relations avec celui-ci

Un paravent face aux crises ?

Les accords commerciaux régionaux ne sont pas que le spectre de l’unilatéralisme chinois. Durant la crise asiatique de 1997-1998, la Chine refuse la dévaluation du yuan. L’Empire du Milieu permet ainsi une stabilisation des économies régionales. Elle retrouve ce rôle dans une moindre mesure lors de la crise des subprimes.

La Chine fait aussi office de soupape de sûreté migratoire, notamment pour la Corée du Nord. De nombreux touristes chinois se rendent en Asie de l’Est, ce qui contribue au dynamisme de la région. Le Japon, la Corée et la Thaïlande en bénéficient.

Un rôle clé dans la coopération régionale

Son influence au sein de l’ASEAN s’exprime par des réalisations techniques. Le projet du canal de Kra, au sud de la Thaïlande (2002), cherche ainsi à créer une alternative au détroit de Malacca.

La Chine a également largement contribué au maillage du transport du Laos. Enfin, avec la « zone de coopération économique pan-régionale du golfe du Tonkin », la Chine vise aussi à connecter l’Asie du Sud-Est aux provinces méridionales du Yunnan, du Guizhou et du Guangxi.

Les bienfaits d’une bonne entente

La Chine a tout intérêt à entretenir de bonnes relations avec son voisinage. Depuis les années 2000, les échanges commerciaux de part et d’autre du Pacifique ont surpassé les échanges transatlantiques.

Michel Foucher évoque un « circuit économique intégré » en Asie orientale. La Chine est la première partenaire du Vietnam, du Japon ou encore des Philippines. Ces interconnexions économiques incitent donc à des relations apaisées.

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