Dans cet article, nous allons voir une méthodologie claire et efficace pour tous types de sujets, en prenant un exemple : « Conflits et ressources stratégiques dans le monde. »
Pour commencer
Tout d’abord, au brouillon, tu dois prendre quelques minutes pour bien analyser le sujet, les connecteurs logiques, les conjonctions de coordination (qui peuvent avoir plusieurs sens), les définitions de chaque terme, le pluriel ou le singulier. Tu dois te demander pourquoi ce sujet a été donné, afin d’en sortir les enjeux.
Ce travail est primordial pour ton introduction, une étape clé de la dissertation qui influence énormément ta note. En effet, c’est la première impression que tu donnes au correcteur. Dans ton introduction, doivent apparaître une accroche, qui peut être une citation ou un fait d’actualité, la définition de chaque terme du sujet, éventuellement des bornes chronologiques et des limites spatiales, si cela est nécessaire (plus particulièrement pour les sujets dans lesquels figurent des dates ou des régions/continents/pays), une problématisation du sujet et une annonce de plan. Je te conseille de consacrer deux, voire deux pages et demie à l’introduction, afin de dégager tous les éléments clés du sujet, sans trop les détailler.
Pour le sujet en question
Pour ce sujet sur les conflits et les ressources stratégiques, il faut mettre en avant le lien entre ces deux termes. C’est pour cela que le « et » a été utilisé. Ici, on peut argumenter que c’est l’inégale répartition des ressources stratégiques qui font d’elles une source de conflits.
Ainsi, un plan semble assez simple. On constate que les ressources sont inégalement réparties, de ce fait, le climat est favorable aux conflits.
Pour la troisième partie, tu es un peu plus libre, tu dois creuser le sujet, aller plus loin sans sortir du cadre du sujet. Quant aux accroches, elles peuvent être nombreuses. Ici, j’ai pris l’exemple de la guerre en Ukraine.
Exemple d’introduction
L’opération spéciale lancée par la Russie en Ukraine en février 2022 constitue un enjeu majeur en matière de sécurité alimentaire. En effet, la Russie et l’Ukraine représentent à elles seules 30 % des exportations de céréales dans le monde. Le blocage des exportations provenant d’Ukraine a plongé les pays les plus vulnérables dans une sérieuse crise alimentaire. Ce qui a rendu nécessaire la mise en place d’un accord pour débloquer les exploitations durant l’été 2022. Néanmoins, Moscou n’hésite pas à mettre en avant sa position de force afin d’en tirer des avantages.
En effet, la Russie a annoncé son retrait de l’accord, accusant l’Ukraine de ne pas avoir respecté ses engagements. En l’absence d’accord, l’Ukraine devra trouver d’autres voies pour exporter ses céréales. Les voies terrestres et fluviales sont des options possibles, mais elles sont moins efficaces que les voies maritimes. La capacité de l’Ukraine à exporter ses céréales par ces voies sera limitée, ce qui pourrait entraîner une hausse des prix des denrées alimentaires. Ainsi, Moscou fait des céréales russes et ukrainiennes des ressources stratégiques au cœur du conflit.
On entend par ressources stratégiques les produits agricoles, les minerais, l’eau et l’énergie. Elles ont comme point commun d’être d’importantes sources de revenus pour les exportateurs, mais aussi des leviers d’indépendance. Peu de pays dans le monde en sont totalement indépendants ; or, ces ressources sont indispensables à la population, ce qui alimente les tensions d’autant plus que les pénuries se multiplient, c’est pour cela qu’on les qualifie de stratégiques. Liddle Hart définit la stratégie comme « la coordination des ressources d’une nation en vue de l’atteinte d’un objectif ». En effet, à cause de leur inégale répartition, les pays cherchent à sécuriser leurs approvisionnements et ces ressources sont finalement au cœur des conflits, c’est-à-dire « un affrontement qui met en jeu une position économique politique et sociale, impliquant compétition, concurrence et pouvoir » (Stéphane Rosière).
Dans ces conditions, Michael Klare fait des ressources l’enjeu des conflits du futur (Resource Wars: The New Landscape of Global Conflict). Nous nous demanderons si posséder des ressources stratégiques confère un instrument de puissance sur la scène internationale, ou si cela expose les pays exportateurs à un fort risque de conflits et d’ingérences extérieures, faisant ainsi des ressources une « malédiction » (Philippe Chalmin).
Pour cela, nous verrons tout d’abord que de par leur nécessité, les ressources représentent un enjeu stratégique dans le monde (I), mais leur inégale répartition offre un climat favorable aux conflits (II), impliquant des rapports de force à toutes les échelles et l’apparition de multiples acteurs (III).
Remarque
En ce qui concerne la rédaction qui suit l’introduction, je te conseille pour chaque grande partie d’annoncer tes trois sous-parties (cf. exemple de la dissertation), afin de rendre ta copie plus lisible.
Dans cet exemple, j’ai commencé par une sous-partie historique pour mettre en contexte le sujet. Tu remarqueras que je n’hésite pas à introduire des concepts, en citant l’auteur bien sûr. Cependant, l’idéal est de citer l’auteur et l’ouvrage dans lequel ce terme ou ce concept est apparu.
Exemple de première partie
Les ressources ont été un facteur de richesse et de puissance majeur au cours de l’histoire (A). Elles ont également été un levier d’indépendance (B) mais, finalement, elles semblent davantage représenter une malédiction pour les pays qui en dépendent économiquement (C).
Les ressources énergétiques ont indéniablement été au cœur de la « domination occidentale » (Kenneth Pomeranz). Le charbon fut au cœur de la première révolution industrielle à la fin du XVIIIe siècle. L’Europe et l’Angleterre ont vu leurs industries prospérer grâce à l’abondance de leurs ressources. Un siècle plus tard, c’est le pétrole qui fut au cœur de la deuxième révolution industrielle, principalement dominée par les États-Unis.
Dès lors, l’Occident s’est intégré dans la première mondialisation et a pris une importante avance économique sur le reste du monde. Plus tard, la concentration de pétrole au Moyen-Orient a changé la donne, notamment lorsque les principaux exportateurs de pétrole ont créé l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) en 1960, afin de reprendre le contrôle sur leurs ressources qui ont longtemps été contrôlées par des firmes occidentales (Anglo-Iranian Oil Company [aujourd’hui BP], Gulf Oil, Royal Dutch Shell…). Dès lors, les pays du Sud réclament plus de droits sur leurs ressources et, en 1962, le G77 (groupe de 77 pays du Sud) obtient le « droit de souveraineté des nations et des peuples sur les ressources de leur territoire ».
Ce réveil du Sud est un véritable affront jeté aux puissances du Nord, majoritairement dépendantes du Sud pour leurs approvisionnements. Les ressources du sous-sol africain ont permis aux nouveaux États après les indépendances (seconde moitié du XXe siècle) de fonder leurs économies sur l’exportation de matières premières et ont fait de leurs colonisateurs leurs premiers partenaires en matière d’échanges. Toutefois, ces exportations nécessitent peu de transformations et une main-d’œuvre peu qualifiée, alors que les pays africains importent des produits transformés par une main-d’œuvre qualifiée et ils subissent alors les termes de l’échange défavorables que Samir Amin évoque dans Le Développement inégal en 1973. De plus les pays exportateurs de matières premières sont exposés à la forte volatilité du marché des « commodities » qui subit la loi de King. Ainsi l’émergence et la croissance ne peuvent être durables, notamment en Afrique où, dans un pays sur cinq, un ou deux produits représentent 75 % des exportations. Au Nigeria, par exemple, le pétrole constitue 90 % des exportations.
Remarque
Dans chaque sous-partie, il est nécessaire d’illustrer ses propos avec des exemples précis et quelques données chiffrées. Tu peux utiliser les phrases de transition entre les différentes parties pour annoncer tes trois sous-parties, comme je vais le faire ci-dessous. Mais libre à toi de faire autrement. N’hésite pas à lire cet article, qui t’aidera à améliorer tes transitions.
Dans la partie suivante, j’étudie un cas précis. Je fais une étude de cas, que j’explicite clairement dans ma phrase de transition : celle du Botswana. Il est très important de consacrer une sous-partie de la dissertation à une étude de cas qui illustrera tes propos. Si tu veux en savoir plus sur la méthode utilisée pour une étude de cas, lis cet article.
Exemple de deuxième partie (avec transition)
Dans ces conditions, la croissance n’implique pas forcément le développement (A). Au contraire, les pays qui détiennent des ressources stratégiques sont les premiers exposés aux risques de conflit (B). Toutefois, il existe des États qui ont réussi à faire de leurs ressources un levier de développement. Nous étudierons le cas du Botswana qui peut être un modèle à suivre pour les pays africains (C).
Alors que le supercycle des matières premières (2000 à 2014) a entraîné une forte croissance, « hausse de long terme de la capacité d’offrir à une population une gamme sans cesse élargie de produits » (Simon Kuznets), dans les pays d’Amérique du Sud et l’Afrique, l’essoufflement du cours des matières premières met en avant la « désindustrialisation prématurée » (Dani Rodrik) de ce pays. De plus, la forte croissance du PIB (plus 5 % de taux de croissance par an chez les pays africains) au cours des années 2000 ne s’est pas transformée en développement, c’est-à-dire « la combinaison des changements mentaux et sociaux d’une population qui la rendent apte à faire croître durablement le produit réel global » (François Perroux).
En effet, la captation de rente par des élites corrompues empêche la juste redistribution des richesses dans le pays, on parle de kleptocratie. Jean-François Bayard qualifie la corruption en Afrique de « politique du ventre » avec une élite restreinte qui capte tous les bénéfices. En effet, alors que l’Afrique a connu une forte croissance de son PIB, les indicateurs de développement, bien qu’ils aient évolué, restent très faibles. L’Afrique présente un IDH (indicateur de développement humain qui se base sur l’espérance de vie, la scolarisation et le revenu par habitant) de 0,570, contre 0,740 pour la moyenne mondiale. Sur les 48 PMA mondiaux (pays moins avancés), 33 sont localisés en Afrique.
Le Lesotho est un bon exemple de cette situation. Alors qu’il produit les plus gros diamants du monde, un quart de sa population vit sous le seuil de pauvreté (moins de 1,9 dollar par jour, selon la Banque mondiale). Dans ces conditions, les pays exportateurs de ressources stratégiques, essentiellement corrompus, peinent à stabiliser leur pays et font face à la multiplication de revendications et de groupes armés dans un contexte de grande pauvreté.
En République démocratique du Congo, les ressources sont au cœur du conflit qui touche le Kivu, au nord du pays. En effet, la faiblesse de l’État laisse place aux ingérences des pays voisins et des firmes transnationales. Les groupes armés pillent les ressources et les exportent illégalement aux pays voisins (Rwanda, Ouganda), ces dernières étant en même temps exploitées par des FTN asiatiques et occidentales. Massaër Diallo qualifie l’enchevêtrement des acteurs dans un conflit comme étant « un système de conflit ».
Au Soudan, la présence de pétrole au sud du pays est une des causes majeures de la volonté d’indépendance de la région. Finalement, la richesse du sous-sol alimente indéniablement les « conflits distributionnels » (François Gemenne, conflit dont l’enjeu est l’approvisionnement des ressources). Un pays détenteur de pétrole à neuf fois plus de risques d’entrer en conflit.
Toutefois, certains États ont été capables de tirer profit de cette rente pour favoriser le développement. C’est le cas du Botswana, pays africain ayant obtenu son indépendance en 1996, dont l’économie est basée sur l’exploitation de minerais. Les revenus tirés de ses exportations ont permis au pays de diviser par deux en 20 ans son taux de pauvreté et ont surtout fait du Botswana un des seuls pays ayant réussi à sortir du statut de PMA. Le pays a également été remarqué pour l’amélioration de la gouvernance et de la transparence de son gouvernement.
Ces pays sont ainsi au cœur des stratégies de sécurisation des approvisionnements des États, au risque de devenir des proies…
Exemple de troisième partie (avec transition)
L’enjeu des ressources stratégiques a obligé les puissances à sécuriser leurs approvisionnements et à défendre leurs intérêts sur la scène internationale (A). Or, aujourd’hui, la guerre en Ukraine a mis en évidence la dépendance accrue des pays aux importations en ressources stratégiques (B). De plus, la transition énergétique et l’essor croissant des NTIC risquent de nous exposer à une nouvelle dépendance : celle aux terres rares (C).
La sécurisation des approvisionnements a toujours été cruciale, elle a parfois tissé des alliances ou mis en place des coopérations. En 1945, le pacte du Quincy lie les États-Unis à l’Arabie saoudite. Les États-Unis s’assurent une sécurité d’approvisionnement en pétrole en échange du maintien de la sécurité garantie par les Américains sur le territoire saoudien. Les stratégies d’approvisionnement sont donc au cœur des rapports de force entre États et jouent un rôle géopolitique crucial au regard de certains pays qui favorisent les intérêts économiques aux valeurs qu’ils défendent, comme l’illustre le soutien de la France à la candidature du Qatar.
Ces stratégies se font au détriment des plus vulnérables, le plus souvent. La Chine a tracé un « collier de perles » (Booz A. Hamilton) en investissant dans le déport tout au long du chemin emprunté par ses importations d’hydrocarbures pour sortir du « dilemme de Malacca ». Ainsi elle expose de nombreux pays au surendettement, car ils n’ont pas d’autres choix économiques que d’accepter les propositions attrayantes de la Chine. La Chine n’hésite pas non plus à pratiquer ce qu’on appelle le « land grabbing » dans des pays qui regorgent de ressources qu’elle importe. Le land grabbing consiste à louer par l’intermédiaire d’entreprises des espaces disposant de ressources exploitables en échange de revenus dans des pays qui paradoxalement sont touchés par l’insécurité alimentaire. Cet accaparement des terres nourrit la logique prédatrice des grandes puissances et appuie la corruption des États détenteurs de ressources qui deviennent les premières victimes.
L’Afrique, « le dernier continent fertile » (Lester Thurow), avec 60 % des terres cultivables non exploitées dans le monde, souffre particulièrement de ce phénomène. Cette volonté de pouvoir sur les ressources se traduit également par les tensions engendrées par les revendications territoriales. En Méditerranée orientale, la découverte de gisements au début des années 2000, comme le Leviathan, Zhor ou Aphrodite, a fait de cet espace un espace crisogène et disputé par la Turquie, Israël, la Grèce et Chypre. Face au néo-ottomanisme turc et à la revendication de la doctrine de « Patrie bleue », les différents acteurs se sont rapprochés et ont monté un projet commun, l’East Med, pour contrer les ambitions turques.
La sécurisation d’approvisionnement a été renforcée par la guerre en Ukraine. Les pays européens ont pris conscience de leur dépendance envers la Russie en matière d’hydrocarbures au fur et à mesure des sanctions, dont des embargos sur les importations. Cette dépendance a mis en évidence la fragilité, mais aussi le besoin de diversification vers des pays plus respectueux de nos valeurs. C’est un des souhaits formulés par Ursula von der Leyen dans son discours sur l’État de l’Union en octobre 2022. Une autre dépendance a été mise en avant, celle des denrées agricoles sur lesquelles la Russie et l’Ukraine détiennent un quasi-monopole. De ce fait, la guerre a plongé de nombreux pays dans une crise alimentaire. Certains pays comme l’Égypte ont demandé l’aide du FMI (Fonds monétaire international).
Alors que dans le monde les ressources stratégiques n’ont jamais été aussi discutées du fait de leur raréfaction, les pays du monde entier et en particulier ceux du nord, au cœur des activités du C4ISR, risquent de tomber dans une nouvelle dépendance : celle des métaux rares. On entend par métaux rares ou terres rares un ensemble de 17 éléments indispensables à la révolution verte que les pays doivent soutenir, mais aussi indispensables pour le progrès des NTIC. Ils constituent donc un enjeu majeur pour le futur. C’est la Chine qui exerce une domination quasi totale sur ces terres rares, car elle représente 90 % de l’exploitation, selon Guillaume Pitron dans La Guerre des métaux rares (2018), qui établit une typologie des conséquences que cette guerre aura.
La première est géopolitique, car elle va entraîner une compétition accrue entre les puissances et risque de rendre l’Occident vulnérable à la Chine. La deuxième est économique, car les terres rares représentent un enjeu majeur pour demain. La dernière est écologique car, paradoxalement, cette compétition risque d’intensifier la pression exercée sur les sols. Dans ces conditions, la Chine peut faire de cette ressource stratégique un instrument de puissance face à l’Occident.
Remarque
Pour finir, tu dois également prêter une attention particulière à la conclusion, car elle est la dernière impression laissée au correcteur. Elle permet de résumer tes trois parties ainsi que de répondre à la problématique rapidement. Si tu veux plus de détails sur la méthodologie de la dissertation, jette un œil à cet article.
Exemple de conclusion
Les ressources stratégiques dans le monde sont au cœur des rapports de force entre les États, car elles sont garantes de la prospérité et du bon développement d’un pays. Pourtant, les pays qui détiennent ces ressources stratégiques ne présentent pas, en général, d’indicateurs favorables de développement. Cela s’explique notamment par la mauvaise gestion de la rente de ces ressources par des gouvernements corrompus et par leur forte exposition au conflit qui les maintient dans une situation d’instabilité.
De ce fait, les ressources stratégiques ont un rôle géopolitique majeur. Elles ont souvent été des facteurs de conflit, mais il ne faut pas oublier qu’elles sont parfois source de coopération, comme c’est le cas de l’Europe marquée par le « retour de la guerre » (François Heisbourg, 2021). La raréfaction des ressources stratégiques due à la pression exercée sur la terre risque d’accroître les tensions, mais aussi de faire basculer les rapports de force. Le « dernier continent fertile » pourrait-il utiliser l’abondance de ses ressources pour passer du statut de mondialisé à celui de mondialisateur ?
Remarque
Dans cette conclusion, je reprends mes grandes parties, je réponds une nouvelle fois à ma problématique, tout en donnant une dimension nouvelle au sujet. En effet, l’intitulé du sujet nous restreint aux conflits liés aux ressources stratégiques, ce qui nous empêche de parler des éventuelles coopérations qu’elles peuvent créer. Cependant, il est intéressant de le faire remarquer dans la conclusion, comme on aurait pu le faire dans l’introduction. Tu peux terminer ta conclusion par une question qui ouvre le sujet, comme je l’ai fait sur l’Afrique.
Pour t’améliorer, n’hésite pas à t’entraîner sur différents sujets : problématique, introduction et conclusion entièrement rédigées, grandes parties de la dissertation…