Dans cet article, tu as accès à une dissertation complète sur une thématique de première année. Cela va te permettre de te rendre compte de la manière dont tu peux traiter des éléments historiques dans une copie HGGMC. Cette copie a ses qualités, tout comme ses défauts, et c’est en cela qu’elle est intéressante, elle n’est pas à lire comme une bible, mais bien à analyser avec lucidité. Cela représente ce que j’ai pu faire durant ma première année de classe prépa. J’ai obtenu la note de 16/20 pour cette dissertation. C’est le point de départ vers ce qui m’a amenée à d’excellentes notes au concours.
Le sujet traité ici est « Les enjeux géopolitiques de l’émergence du tiers-monde ». C’est une dissertation qui met en exergue la dialectique entre la volonté d’affirmation autonome de certains pays en développement (économique et géopolitique) et l’influence tangible des deux Grands, car ces pays restent des enjeux de puissance.
Tu peux retrouver nos articles sur la méthodologie de la dissertation en HGGMC ici.
Pourquoi est-il intéressant de lire des dissertations complètes ?
Analyser les méthodes rédactionnelles
Lire et étudier les copies d’autres élèves permet de se familiariser avec la méthode de la dissertation en HGGMC. Disserter en géopolitique, ce n’est pas seulement réaliser mécaniquement la logique intro-plan-trois parties-conclusion.
Il s’agit aussi de comprendre comment les parties et les idées se lient entre elles et s’enchaînent avec une forme de fluidité permise par la description approfondie des exemples et des concepts utilisés. Il faut apprendre à réellement « ficeler » sa dissertation dans un but démonstratif.
Par exemple, soigner ses transitions est primordial, mais il est difficile de savoir le faire sans avoir de modèle.
Apprendre à rédiger certes, mais aussi à corriger
Relire les copies d’autres préparationnaires permet d’avoir une vue d’ensemble et d’offrir une nouvelle perspective sur le travail fourni.
Tu pourras ainsi repérer ce qui selon toi constitue une erreur, ce que tu ne voudrais pas reproduire dans tes propres compositions. Cela peut être un mot de transition qui te semble désuet ou bien une manière de décortiquer les termes du sujet qui est trop mécanique.
Revoir son cours d’une manière originale
Si apprendre les cours d’HGGMC peut s’avérer fastidieux et redondant, le fait de se confronter à des éléments du cours qui sont mis en forme et utilisés sous un angle particulier permet de faire des liens entre les choses et de mieux comprendre les enjeux des problématiques traitées.
La dissertation
« Les enjeux géopolitiques de l’émergence du tiers-monde »
Introduction
En 1945, le cinquième Congrès panafricain réunit à Manchester des intellectuels et notables des pays concernés qui demandent l’autonomie des peuples africains et expriment leur soutien aux nations asiatiques alors engagées dans le combat pour l’indépendance. Cet événement, loin d’être isolé à ce moment-là, s’inscrit dans la mouvance idéologique, née au début du XXe siècle, qui défend le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et galvanise les mouvements indépendantistes de plus en plus contestataires dans les colonies jusqu’au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Au prix d’âpres négociations, allant jusqu’aux conflits sanglants, de nouveaux États, libérés de la domination coloniale, émergent alors sur la scène internationale. Ils veulent, durant la guerre froide, exercer leur souveraineté et cherchent pour cela à s’unifier en une seule voix. Ils se rassemblent, dialoguent, passent des accords. C’est la naissance du tiers-monde. Expression née en 1952 sous la plume d’A. Sauvy dans la revue L’Observateur, qui publie son article « Trois mondes, une planète », le tiers-monde désigne un ensemble de pays du continent africain, de l’Asie du Sud-Est, et plus largement de l’Amérique latine. Ces espaces sont associés tout d’abord par leur expérience coloniale commune, mais aussi car ils ont des similarités économiques, c’est-à-dire un retard de développement et d’industrialisation par rapport aux puissances industrialisées, sociales, avec un bas niveau de vie et une difficulté à subvenir aux besoins d’une population en forte croissance démographique. En référence au tiers-État, l’idée de tiers-monde met en lumière le fait que ce nouvel espace ne s’inscrit pas dans la logique bipolaire, mais se développe perpendiculairement aux deux Grands. Il incarne un nouveau pôle des relations internationales, un concurrent potentiel ou bien un allié. Il constitue une voix indépendante, nombreuse, qui dispose de larges atouts stratégiques et vient briser les dynamiques établies. À ce titre, le tiers-monde est au centre des enjeux de la guerre froide. Il en est le théâtre, le point d’appui et il est convoité par les deux partis qui cherchent à étendre leur influence sur les gouvernements nouveaux. Le tiers-monde est au cœur des préoccupations lorsqu’il émerge. Toutefois, cet espace reste une véritable poudrière, en proie à de fortes instabilités dues à son caractère nouveau, et les États qui le constituent ne sont pas profondément unifiés, ils divergent politiquement et culturellement. En réalité, à défaut de tirer pleinement profit des intérêts qui lui sont portés, le tiers-monde semble constituer un fer de lance pour les puissances dominantes, deux Grands qui veulent asseoir leur suprématie sur un espace qu’ils pilotent indirectement et dont ils ont surtout planté les racines.
Problématique
Alors, le tiers-monde crée-t-il réellement un troisième pôle géopolitique entre 1950 et 1980, ou bien ne fait-il qu’accentuer la bipolarisation du monde ?
Plan
Si la naissance du tiers-monde est l’émergence d’un nouveau pôle géopolitique, qui remet en cause les dynamiques contemporaines (I), et ce, car il tient un rôle majeur dans les mutations du monde de la guerre froide (II), ce nouvel acteur contribue pourtant surtout à prolonger et accentuer la logique bipolaire (III).
Transition
Le tiers-monde constitue un troisième pôle, qui émerge au sortir de la Seconde Guerre mondiale et engage une certaine modification de l’édifice géopolitique mondial.
Partie 1
Tout d’abord, le tiers-monde naît en tant que véritable acteur géopolitique qui se construit sur des institutions fortes pour légitimer son existence. Dès les années 1920, les mouvements indépendantistes et anticoloniaux ont la volonté de se rassembler pour accroître leur écho à l’échelle mondiale. À ce titre, de nombreuses conférences sont organisées, favorisant le dialogue entre les pays en phase d’accession à l’indépendance. La Conférence des États indépendants d’Afrique se réunit au Ghana en 1958 pour appeler à la décolonisation totale du continent. Cette volonté de faire raisonner leurs aspirations est parachevée par la Conférence de Bandung tenue en avril 1955 et réunissant 29 pays qui débattent de leur souveraineté nouvelle et cherchent des solutions communes au développement économique. Selon L. S. Senghor, cette conférence est un « coup de tonnerre » pour la géopolitique mondiale. Bien qu’elle n’aboutisse pas directement à des mesures concrètes, cette réunion marque symboliquement l’union de nations qui émergent sur la scène internationale et veulent faire valoir leurs droits d’autonomie et de détermination. La coopération se concrétise rapidement, notamment au niveau économique, avec la création de la CNUCED en 1964 qui a pour but, selon P.-A. Sallier dans Le Temps, de « faire changer les règles du commerce international » pour inclure les pays du tiers-monde dans les dynamiques de la mondialisation et rechercher des solutions au développement économique. Parallèlement, les pays du tiers-monde vont s’imposer au sein des institutions internationales déjà mises en place, et surtout à l’ONU au sein de laquelle ils ont un poids diplomatique important puisqu’ils constituent la majorité des voix de l’Assemblée générale. L’ONU est d’ailleurs un appui pour le tiers-monde. Dès 1945, la question coloniale est mise à l’ordre du jour de la session ordinaire pour encourager les États à marcher vers la décolonisation. Enfin, les leaders du tiers-monde se dressent en force d’opposition et de résistance face à la bipolarisation du monde, ce qui est inédit. Portée principalement par Nehru, Nasser et Tito lors de la Conférence de Belgrade en 1961, l’ambition du tiers-monde est de ne pas céder à l’alignement aux côtés de l’une ou l’autre des deux puissances, comme l’ont fait la majeure partie des pays à cette époque. Le but est d’affirmer la souveraineté des États en refusant l’ingérence et la domination des deux Grands.
Le tiers-monde cherche donc à faire entendre sa voix au sein des relations internationales et il peut prétendre à le faire, car il a la capacité d’exercer un poids diplomatique et politique important. En effet, le tiers-mondisme témoigne d’un sentiment de destin commun des pays qui y adhèrent, leur volonté d’émancipation est mue par le même sentiment qu’ils ont été expropriés de leurs droits et marginalisés. Le remous intellectuel qui s’opère dans la première moitié du XXe siècle transcende les frontières, les leaders de la révolution se font entendre de toutes parts, Che Guevara en Argentine, Gandhi en Inde, le Néo-Destour tunisien d’H. Bourghiba, tant d’idéaux qui prennent vie et s’illustrent dans les revendications nationales des pays. À l’échelle régionale, le panarabisme impulsé par Nasser, prônant l’unification des peuples de culture arabe, est celui qui amène plusieurs nations du Moyen-Orient comme l’Irak ou l’Égypte à s’engager en Afghanistan après 1979. Le tiers-monde est donc uni autour des mêmes aspirations, et ce, grâce surtout aux leaders des partis indépendantistes, qui font figure de guides. Ils sont souvent charismatiques et cristallisent les aspirations de la population. En 1930, la Marche du Sel organisée par Gandhi mobilise toute une partie de la population qui marche symboliquement vers les marais salants en refusant de payer les taxes de l’État. D’autant plus que les États du tiers-monde, soudés, disposent d’atouts stratégiques dont ils arrivent à tirer profit. Ils rassemblent 50 % de la population mondiale et constituent des zones militairement et économiquement intéressantes. Par exemple, les États-Unis installent des missiles en Turquie, qui est un de leurs alliés, pour les diriger vers et les rapprocher de l’URSS. De la même façon, de précieuses ressources minières ou encore en hydrocarbures se situent dans les régions du tiers-monde. La Gold Coast d’Afrique et le Golfe persique sont des espaces convoités par les deux superpuissances, et cela permet aux pays du tiers-monde d’en tirer profit. Par exemple, l’Arabie saoudite perçoit les royalties, qui sont des rémunérations en échange de la mainmise britannique sur les exploitations pétrolières de la zone.
Enfin, l’émergence de ce nouvel acteur au potentiel important bouleverse réellement les rapports de force établis jusqu’alors. Selon L. S. Senghor, la naissance du tiers-monde constitue « la mort du complexe d’infériorité » des pays les plus pauvres. En effet, le symbole de leur naissance est puissant, ce ne sont plus deux, mais bien trois pôles d’influence qui existent dans le monde. Un monde qui voit d’ailleurs une profonde mutation de sa hiérarchie. L’hégémonie européenne s’effondre. Non seulement sous le joug des deux Grands qui se « partagent » le monde, mais aussi par le processus de décolonisation. En 1941, Churchill proclame « Tout ce que nous avons, nous le gardons », en réponse à la montée des revendications en Inde britannique. Six ans plus tard, l’indépendance de l’Union indienne et du Pakistan est officiellement actée. C’est fondamentalement le discrédit des puissances coloniales qui s’opère alors. Elles perdent leur influence sur les colonies et donc une partie de leur puissance géopolitique : les colonies étaient non seulement un symbole de supériorité, notamment pour la France, humiliée selon le Général de Gaulle par sa position en sortie de guerre, mais aussi un point d’appui important notamment durant la dépression des années 1930. Les discours des colonisateurs, comme celui de J. Ferry en 1885, ne semblent plus d’actualité, et les puissances européennes perdent même le soutien de leur population métropolitaine. Par exemple, la guerre d’Algérie entraîne une scission importante de l’opinion publique française dont une grande partie ne soutient plus la politique coloniale. Le référendum pour l’autodétermination algérienne proposé en 1961 obtient 75 % de « oui ».
Transition
L’émergence du tiers-monde constitue donc un tournant pour la géopolitique mondiale, et cela se traduit surtout par le rôle qu’il exerce dans l’évolution de la guerre froide.
Partie 2
Le tiers-monde a une place déterminante et centrale dans le déroulement de la guerre froide. Ces espaces sont convoités par les deux superpuissances qui veulent avoir la mainmise dessus et cherchent donc à s’en rapprocher. La détente, qui intervient dans la seconde moitié des années 1960, voit une tendance aux alliances pour les deux grands au Moyen-Orient. En effet, après le retrait imposé des puissances européennes dans la zone, ils veulent élargir leur zone d’influence. C’est ainsi que l’URSS intervient notamment lors de la guerre du Kippour, opposant les Israéliens aux Égyptiens et Syriens pour l’obtention du Mont Sinaï, ce qui mène S. Hussein à signer un pacte d’alliance avec l’URSS en 1972. Ces États font l’objet des attentions, notamment car ils sont jeunes et en pleine construction, les deux Grands y voient un moyen d’avancer leurs pions dans les zones concernées. Plus largement, les territoires du tiers-monde servent d’exutoire aux rivalités entre les blocs, car ils sont le théâtre de nombreux conflits liés à la guerre froide. Selon P. Grosser, dans L’Histoire du monde se fait en Asie (2019), la guerre froide commence en Asie, avec la guerre de Corée (1950-1953) et meurt là-bas aussi lorsque D. Xiaoping décide de se lancer sur la voie de la libéralisation de l’économie chinoise, donnant la primauté à l’économie par rapport à l’idéologie. Les territoires du tiers-monde abritent en effet les conflits majeurs qui représentent les différentes étapes de la guerre froide. La crise des missiles de Cuba fait trembler le monde à l’idée d’un possible déclenchement de guerre et marque en 1962 la nécessité d’armistice nucléaire et de détente dans les rapports soviéto-américains.
Plus largement, les deux Grands instrumentalisent les pays du tiers-monde en tant qu’États tampons pour réaliser leurs ambitions ou bien s’affronter de façon indirecte. Les pays périphériques à l’URSS comme la Corée du Sud servent d’appui politique et militaire aux États-Unis dans le cadre de la tactique du containment qui vise à éviter la propagation du communisme dans les pays voisins des États communistes. Corée du Sud qui naît d’ailleurs de la partition mise en place à la fin de la guerre, séparant le gouvernement communiste de Kim Il-sung au Nord, et soutenu militairement par les Soviétiques, et la dictature de droite au Sud soutenue par les États-Unis. Durant cette guerre, les États-Unis interviennent en faveur du Sud pour contrer les ambitions d’expansion communistes.
Finalement, les enjeux de guerre froide liés au tiers-monde bouleversent le déroulement de celle-ci et influent sur l’après. Les États-Unis, lors de la guerre du Vietnam, s’enlisent dans le conflit en bafouant leurs principes de liberté, de démocratie et de paix, ce qui marque un tournant dans la guerre froide. Les bombardements de civils au napalm par les armées américaines sont meurtriers, comme le montre la photographie de la petite fille brûlée Kim Phuc, et choquent l’opinion publique qui plaide largement contre la poursuite de la guerre. La défaite américaine au Vietnam constitue un discrédit à l’échelle internationale de la puissance du pays qui se rend compte qu’il ne peut intervenir partout et tout le temps. J. Carter, élu en 1976, amorce alors une politique de désengagement du containment et des ambitions universalistes. C’est le rapport des États-Unis au monde qui change. La France, de son côté, voit la IVe République s’effondrer au moment de la guerre d’Algérie, qui n’en est pas l’unique facteur, mais donne le coup de grâce à une puissance coloniale qui ne parvient plus à s’imposer dans la guerre et perd le soutien de sa population. Ce n’est donc pas seulement dans le tiers-monde que se joue la guerre froide, c’est aussi là-bas que se nouent les dynamiques futures, constitutives du monde à l’aube des années 1990.
Transition
Le tiers-monde joue donc un rôle central dans le déroulement de la guerre froide. Toutefois, ce rôle est bien particulier et ne lui donne une autonomie complète qu’en façade. En effet, le tiers-monde reste bien un enjeu de la guerre froide, s’inscrivant dans sa logique, et non pas un acteur majeur qui s’en détache complètement.
Partie 3
Le tiers-monde semble en un sens contribuer au prolongement de la logique bipolaire. Déjà, le tiers-monde naît entre instabilités et divergences. Au moment des indépendances, les puissances colonisatrices laissent derrière elles des États livrés à eux-mêmes, mais jusqu’alors sous domination. Ces pays sont nouveaux, leurs gouvernements aussi, et surtout fragiles car ils sont en proie à une forte instabilité politique et sociale. Ce phénomène est principalement lié au manque d’institutions politiques et administratives dans ces pays. En effet, ils étaient auparavant inclus dans les métropoles et ne possédaient pas réellement de structures politiques solides ni n’avaient de représentativité politique. Particulièrement dans les États africains, il y a peu de partis politiques solides et qui concrétisent une véritable vie politique. Par exemple, en Guinée, seulement 130 habitants sont diplômés de l’enseignement supérieur en métropole au moment de l’indépendance, pour 13 millions d’habitants au total dans le pays. Selon M. Michel, seules les décolonisations britanniques et néerlandaises ont mieux favorisé l’autogouvernement des colonies en formant des élites amenées par la suite au pouvoir. Cette instabilité rend les bases des nouveaux États fragiles, favorise l’émergence de guérillas, la bascule dans la guerre des gangs, mais aussi la montée des extrêmes au pouvoir. De plus, les États du tiers-monde ne sont pas pleinement unifiés. Les divergences politiques et culturelles sont grandes, au-delà des frontières mais aussi à l’échelle nationale. Par exemple, le conflit israélo-palestinien génère d’importantes tensions communautaires et des problèmes de représentation. La Palestine ne reconnaît pas l’État d’Israël, tandis qu’Israël n’accepte pas le statut international de Jérusalem. En outre, ces divisions ont pu être attisées par les puissances coloniales qui « divisent pour mieux régner ». En 1906, les Britanniques aident à la création de la Ligue musulmane pour accentuer les tensions entre la majorité hindouiste et la minorité musulmane en Inde. Ce climat de tensions et d’instabilité laisse ainsi des États divisés et meurtris au moment de l’indépendance, et dont les conflits s’aggravent encore par la suite. Le tiers-monde est donc un espace divisé pour lequel il est très difficile de construire des bases solides et de s’accorder pour exercer un réel poids sur la scène internationale.
Cette situation implique que malgré la volonté qu’a le tiers-monde de se détacher de la logique d’alignement, il reste quand même sous l’emprise des deux Grands. Tout d’abord, tous les États du tiers-monde ne sont pas idéologiquement unanimes. Certains pays, notamment ceux qui sont limitrophes avec l’URSS comme le Vietnam du Sud, sont profondément antisoviétiques car ils ont peur pour leur sécurité. Ceci facilite l’intervention des États-Unis sur ces territoires pour prendre des positions stratégiques. De la même façon, les deux Grands influent en sous-main sur les pays du tiers-monde. Les deux superpuissances participent notamment à certaines guerres civiles en apportant leur soutien à un des partis, pour mener le dénouement de celles-ci en leur faveur. Par exemple, alors que l’URSS intervient en Angola pour aider les révolutionnaires communistes, les États-Unis mettent en place la stratégie du rollback qui consiste à agir officiellement ou officieusement pour la victoire de ceux qui mènent les guérillas anticommunistes dans le pays, par l’envoi d’armes notamment. Évidemment, les puissances impérialistes conservent aussi des liens de coopération économique et militaire avec les pays décolonisés, ce qui leur octroie certains avantages. De cette façon, la « Françafrique » du Général de Gaulle permet à la France de garder un lien solide avec ses colonies et de s’ingérer durant le conflit au Rwanda, par exemple.
Enfin, au-delà du fait que les puissances industrialisées gardent un certain contrôle sur les pays du tiers-monde, celui-ci est en réalité un produit du Nord, qui lui a donné les bases et l’impulsion de se développer. En effet, les premiers rayons de l’anticolonialisme ont été formés par la position des deux superpuissances. Avant même la fin de la Première Guerre mondiale, le président américain Wilson parle du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » dans son discours des Quatorze points en janvier 1918 et approfondit la position anticolonialiste de sa nation. À l’Est, Lénine publie en 1917 son ouvrage L’Impérialisme, stade suprême du capitalisme, et évoque l’idée que le concept marxiste de lutte des classes, dans lequel le prolétariat est exploité par la bourgeoisie, peut s’appliquer au rapport colonisateur-colonisé, ce qui signifie que la décolonisation pourrait participer à la diffusion de la révolution bolchevique. D’ailleurs, si les idéaux d’indépendance naissent en Occident, ils s’y concrétisent aussi. Beaucoup de leaders indépendantistes sont formés en métropoles et sont issus de l’élite de leur pays. À titre d’exemple, Gandhi a fait du droit à Londres, et L. S. Senghor est agrégé de grammaire. Ce sont des notables très occidentalisés, soutenus par des intellectuels occidentaux comme A. Gide qui publie en 1927 le roman Voyage au Congo pour dénoncer les conditions de travail des ouvriers dans le cadre de la création du chemin de fer Congo-Océan, qui guident leurs peuples vers la rébellion. A fortiori, au moment des indépendances, ce sont les puissances impérialistes qui dessinent le tiers-monde. La France, en obtenant la Syrie et le mont Liban après les Accords Sykes-Picot, décide de la création de deux États, la Syrie et le Liban, sans le consentement des populations. De la même manière, lorsque C. Attlee annonce le retrait des troupes britanniques d’Inde en 1947, le vice roi des Indes, Britannique, propose la partition du territoire en deux États : le Pakistan et l’Inde, pour éviter le bain de sang. Le tiers-monde est donc modelé par les puissances qui l’ont dominé. On pourra ajouter enfin que l’appellation même de « tiers-monde » est occidentale, et sa définition s’appuie sur une vision occidentalisée du développement économique et de l’avancement d’un pays vers la prospérité.
Conclusion
En conclusion, l’émergence du tiers-monde modifie les rapports de force sur la scène internationale et constitue une avancée géopolitique majeure pour des pays marginalisés jusqu’alors qui font finalement entendre leur voix. Cet espace est un théâtre important de la guerre froide, prisé par les deux Grands qui cherchent à y étendre leur influence et à jouir de son potentiel. Néanmoins, le poids des puissances qui ont dominé ces pays reste en réalité grand, et le tiers-monde semble constituer, à défaut d’un nouvel acteur géopolitique, une entité dont les bases sont fragiles et qui devient un enjeu, un outil pour les deux blocs, prolongeant la logique bipolaire. Toutefois, la situation des pays du tiers-monde évolue rapidement à partir des années 1980 et les disparités grandissent entre des États comme la Corée du Sud, qui connaît une industrialisation brillante et rapide, et d’autres, pour lesquels les difficultés persistent : les PMA telles que certaines nations africaines. Ces logiques différenciées entraîneront rapidement l’obsolescence du terme même de « tiers-monde », qui, à peine né, est déjà remis en question par des pays dont la singularité ne peut être négligée.
Les éléments qui font la différence
L’introduction
- Une accroche originale, un exemple précis.
- Une accroche qui permet, en l’approfondissant, d’élargir une perspective en lien avec le sujet.
- Une définition exhaustive des termes du sujet.
- Le plan commence par si, puis une virgule montre la deuxième partie, et le terme introductif pourtant indique la troisième partie. Cela permet de ne pas alourdir l’annonce du plan.
Le corpus
- Réaliser des transitions visuellement distinctes des paragraphes.
- Revenir à la ligne pour chaque sous-partie, sans sauter de ligne.
- Détailler les exemples et ne pas hésiter à en prendre plusieurs par sous-partie.
- Proposer une analyse personnelle montrant que tu as de l’esprit critique et la capacité de dépasser le sujet.
La conclusion
- Concise mais riche.
- Une ouverture indispensable. Ici, il s’agit d’un sujet historique, donc j’ai ouvert sur ce qui allait se produire dans l’avenir (car on le sait déjà, donc ce n’est aucunement une forme de prospective qui serait plus risquée).
Tu peux retrouver ici tous nos articles de géopolitique !