Dans cet article, nous te proposons une analyse du sujet sur lequel ont planché les candidats de la BCE en géopolitique ESSEC 2025.
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L’analyse du sujet de géopolitique ESSEC 2025
Tu trouveras le sujet de cette épreuve à ce lien.
Sujet : Les arcs de crise dans le monde depuis le début de la guerre froide
Actualité et lien avec le sujet
En 2025, la multiplication des foyers de conflit rappelle la centralité des arcs de crise dans la géopolitique mondiale. Du Sahel en recomposition, à l’Ukraine ravagée par la guerre, en passant par les tensions en mer de Chine méridionale ou au Proche-Orient, les zones d’instabilité s’alignent selon des logiques territoriales structurantes. Ces arcs, loin d’être de simples lieux de désordre, sont aussi des lignes de fracture entre puissances et des espaces clés de recomposition géopolitique, à mesure que les rivalités stratégiques se recomposent dans un monde de plus en plus multipolaire.
Définitions et analyse des termes
Le sujet ne portait ici que sur un terme, les arcs de crise (les autres termes étant plus reliés aux bornes historiques et géographiques du sujet, à ne pas négliger pour autant).
Arc de crise : Espace géographique continu ou semi-continu marqué par une instabilité chronique, où s’accumulent des conflits armés, des tensions (identitaires ou religieuses), une défaillance de l’Etat en place ainsi que des difficultés économiques, et très régulièrement une forte implication d’acteurs extérieurs, comme des Etats. Il s’agit alors d’une géopolitique des failles, qui apparaissent en périphérie des grandes puissances, mais dont les enjeux sont centraux dans la sécurité mondiale. On doit ce concept à la politique américaine, et notamment au conseiller à la sécurité nationale américain Zbigniew Brzeziński
Bornes historiques et géographiques
Depuis le début de la guerre froide : ce marqueur temporel (1947 avec la doctrine Truman par exemple) reste classique pour un sujet sur les conflits mondiaux, pour les envisager à partir de la recomposition bipolaire de l’ordre mondial au sortir de la Seconde Guerre mondiale, jusqu’à aujourd’hui, époque laissant place à de nombreux conflits armés dans plusieurs zones mondiales.
Dans le monde : la borne géographique très large permet de traiter l’entièreté des conflits à l’échelle mondiale, même si le candidat va être amené à identifier les grands arcs de conflits, qui comme le mentionnait la définition ci-dessus, sont localisés en périphérie des grandes puissances. On peut par exemple identifier pour n’en citer que deux l’arc du Moyen-Orient ainsi que l’arc eurasiatique, où des conflits armés sont actuellement en cours.
Problématiques possibles
Comment les arcs de crise traduisent-ils les grandes transformations de l’ordre géopolitique mondial depuis 1947 ?
Dans quelle mesure les arcs de crise sont-ils devenus les nouveaux centres de la rivalité entre puissances ?
Les arcs de crise sont-ils seulement des zones de chaos ou des espaces stratégiques majeurs pour les équilibres mondiaux ?
Proposition de plan
I – Les arcs de crise, héritage et produit de logiques de la guerre froide
II – Une multiplication des arcs de crise dans un monde post-bipolaire fragmenté
III – Les arcs de crise aujourd’hui : reflets d’un monde multipolaire et contesté
Concepts à mobiliser
- Géopolitique des périphéries (développée par Bertrand Badie) : zones où les normes internationales sont fragiles, voire absentes, et où les conflits peuvent s’ancrer plus rapidement et plus longtemps
- Concept de “faille civilisationnelle” (développée par Huntington) : crises peuvent être situées à la jonction entre des civilisations aux valeurs ou religions différentes (entre l’islam et l’Occident par exemple)
- Concept de “faille géopolitique” désignant la zone de rencontre entre les systèmes d’alliances ou des puissances rivales, conduisant à une instabilité structurelle (exemple avec la frontière de l’OTAN et la Russie, et la position de l’Ukraine dans les discussions de son entrée dans l’UE)
- Etat failli : Etat incapable d’assurer les fonctions régaliennes, c’est-à-dire la sécurité de ses citoyens et de son territoire, la justice, ainsi que le contrôle du territoire. Ces Etats peuvent alors devenir des noeuds de crise (comme en Somalie ou en Libye).
- La dualité entre les puissances périphériques et centrales, et l’idée que les conflits se jouent souvent en marge
- Proxy war (guerre par procuration) : conflit local dans lequel des puissances extérieures soutiennent indirectement les belligérants, en illustrant leur rivalité (comme cela a toujours été le cas au Proche et Moyen Orient)
- Conflit asymétrique : Conflit opposant un acteur étatique à un acteur non-étatique (notamment des groupes armés ou terroristes), souvent caractérisés par des moyens militaires disproportionnés et une logique de guérilla ou d’attentas (exemple d’Israël et du Hamas)
- Guerre hybride : stratégie mêlant guerre conventionnelle (avec des moyens armés lourds), cyberattaques, désinformation, guerre économique (utilisée par exemple par la Russie par rapport au conflit en Ukraine)
- Zones grises : territoires partiellement contrôlés, hors d’une souveraineté claire et partagés entre plusieurs acteurs (comme les mafias, les groupes terroristes, les milices locales ou les puissances étrangères par exemple)
- Rimland (de Spykman) : zone de contact entre la puissance maritime et la puissance continentale, autour de l’Eurasie, là où les tensions sont fréquentes. Plusieurs arcs de crise y sont localisés (comme celui du Moyen-Orient)
- Heartland (de Mackinder) : coeur géographique du pouvoir terrestre mondial (Europe de l’Est et Asie centrale), qui attire historiquement les ambitions stratégiques
- “Croissant de crises” (concept mobilisé par Pierre Biarnais au début des années 2000) : notion utilisée pour décrire une zone géopolitique instable en forme de croissant, qui s’étend de l’Afrique de l’Ouest à l’Asie du Sud-Est
- Idée du djihadisme globalisé
- Géopolitique des ressources : concept à mobiliser pour comprendre les enjeux des puissances prenant part aux conflits mondiaux, souvent localisés dans des zones riches en hydrocarbures, minerais stratégiques ou eau
- Interventions périphériques (d’après Gérard Dorel) : les arcs de crises sont le terrain privilégié d’interventions militaires indirectes des puissances (avec des guerres par procuration comme en Syrie)
- Le “syndrome de Suez” créé par l’échec de l’intervention franco-britannique à Suez en 1956, ayant pour conséquence une réticence des anciennes puissances coloniales à intervenir directement dans les conflits, en laissant la place aux autres grands acteurs comme les Etats-Unis, la Russie, la Chine ou encore la Turquie
- “Effet domino” craint lors de l’effondrement d’un Etat ou avec le début d’une guerre, pouvant alors provoquer un enchainement régional de crises (comme lors du Printemps arabe)
- Zone tampon : territoire servant de zone de séparation entre des puissances rivales (comme l’Ukraine peut l’être entre l’OTAN et la Russie, ou la zone du Cachemire entre l’Inde et le Pakistan)
- Concept de “guerre civile internationale” (développée par Mary Kaldor) : les conflits sont localisés mais intégrés dans des dynamiques globales et mondiales, avec des financements étrangers, la participation d’ONG, ou encore des trafics
- Stratégie du chaos : hypothèse selon laquelle certaines puissances alimentent volontairement le désordre pour affaiblir les Etats rivaux ou remodeler des régions (exemple avec l’intervention américaine en Irak en 2003)
- Moyen-Orient : conflit israélo-palestinien hérité depuis 1948, en évoquant l’occupation, la colonisation, les intifadas, et bien sur Gaza aujourd’hui, la guerre civile en Syrie, la guerre en Irak et celle au Yemen
- Afrique : RDC (Kivu) avec les conflits ethniques, les minerais stratégiques et l’intervention des pays voisins, le Mali et le Sahel avec le jihadisme, Barkhane, Wagner, une crise de gouvernanceet des coups d’État, le Soudan et le Sud-Soudan avec la guerre civile, la question du pétrole, la séparation (en 2011), le Darfour et enfin le Nigeria avec Boko Haram, les conflits Nord/Sud, la religion et encore une fois le pétrole
- Asie : Afghanistan (1979–2021) avec l’URSS, les Talibans, l’intervention des Etats-Unis puis le retour des Talibans, le Cachemire marqueur du conflit Inde/Pakistan, les tensions nucléaires ainsi que celles liés aux identités religieuses, Myanmar (Rohingyas) et son nettoyage ethnique, l’exode massif vers le Bangladesh, et enfin le Sri Lanka (Tigres Tamouls) avec son conflit ethno-religieux et la guérilla indépendantiste (fin en 2009)
- Europe : Ex-Yougoslavie (1991–2001) avec les guerres de sécession, la Bosnie et le Kosovo ainsi que le nettoyage ethnique, l’Ukraine avec tout d’abord Crimée (2014), le Donbass, puis la guerre totale avec la Russie (2022) et le Caucase (Arménie / Azerbaïdjan) dans la zone du Haut-Karabagh, avec une guerre éclair en 2020 et 2023
- Amériques : la Colombie (FARC) avec la guérilla marxiste, le narcotrafic, puis la paix en 2016, Haiti et l’effondrement de l’État, les gangs, puis les interventions étrangères ou encore le Mexique avec la guerre contre les cartels de la drogue et la militarisation de la sécurité
- Autres zones stratégiques : la Mer de Chine méridionale, l’Arctique et le Golfe de Guinée / détroit de Malacca
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