Indo-Pacifique

L’Indo-Pacifique est en ce moment une région du monde au cœur de toutes les interrogations géopolitiques (on t’invite à aller jeter un œil à l’article de Major-Prépa sur la crise des sous-marins). Des sujets à l’oral de géopolitique de HEC pourraient porter sur ce thème et certains sujets d’écrit pourraient également s’y référer. Major-Prépa t’aide à faire le point !

Définition géographique

La définition géographique de cette zone varie, sa dimension n’est pas la même selon les acteurs. Toutefois, beaucoup d’experts s’accordent pour dire que l’Indo-Pacifique s’étend globalement de l’Afrique de l’Est à la côte ouest des États-Unis. On peut aussi retenir que l’Indo-Pacifique résulte de la jonction de l’océan Indien et de l’océan Pacifique et de tous les pays qui les jouxtent. Ce qui représente 50 % des océans et qui regroupe un tiers de la population mondiale.

Il faut aussi noter que le concept d’Indo-Pacifique n’apparaît nulle part dans les dossiers chinois, alors que toutes les démocraties adoptent leur stratégie indo-pacifique (certes différentes), indice de la volonté de contrecarrer la puissance chinoise. Cela traduit donc la rivalité sino-américaine, mais aussi le basculement du centre de gravité de l’Atlantique vers le Pacifique, appelé stratégie du pivot ou orientalisation (Gideon Rachman – easternalisation).

Contrer les ambitions chinoises

Si cette zone géographique a pris beaucoup d’importance ces dernières années, c’est parce que la Chine étend inéluctablement son influence dans les pays d’Asie de l’Est, et dans les États insulaires du Pacifique et de l’océan Indien. Le terme d’Indo-Pacifique n’est donc pas neutre.

La Chine a considérablement développé ses forces militaires dans la zone et les dépenses qui s’ensuivent. Avec des chiffres inédits depuis 2019, le géant asiatique affiche un budget en hausse de 7,2 %, soit 225 milliards de dollars. Enfin, la majeure partie des routes de la soie chinoises s’étendent dans l’Indo-Pacifique, d’où l’importance de la zone aux yeux de Pékin.

Toutefois, le leader chinois Xi Jinping sait qu’il doit mettre en place des stratégies efficaces pour rentabiliser ses investissements colossaux. Premier adversaire de la Chine au niveau régional : l’Inde. À cet effet, Xi emploie les grands moyens pour encercler l’Inde et bloquer les flux. Il projette la Chine et ses ambitions dans tout l’océan Indien avec le projet BRI et en utilisant la stratégie du collier de perles. Il dynamise aussi les échanges avec le Pakistan, ennemi de l’Inde, en ouvrant le corridor économique sino-pakistanais aboutissant à Gwadar, porte sur l’océan Indien. 

La Chine planifie aussi l’ouverture d’une seconde base militaire à l’extérieur de son territoire dans les îles Salomon, faisant alors de l’ombre ou constituant peut-être une menace pour les États-Unis. Ces derniers étant très implantés militairement dans les îles du Pacifique. La Chine adopte aussi une position agressive envers ses voisins. Celle-ci s’approprie des micro-îlots dans les eaux territoriales étrangères comme celles des Philippines et essaye d’agrandir sa ZEE. Cette stratégie de la pieuvre entraîne de nombreux conflits entre les pays de la zone et renforce leur crainte envers la Chine.

Face aux appétits chinois, les autres acteurs de la zone cherchent à s’allier pour poser une dissuasion crédible à la Chine

Telle est l’idée du Quad, une alliance entre le Japon, l’Inde, l’Australie et les États-Unis. Même si l’alliance reste encore informelle, les membres paraissent réunis autour d’une même préoccupation : la stabilité de la région et la montée en puissance de la Chine.

Un autre partenariat des démocraties occidentales a vu le jour en 2023 : AUKUS. Cet accord entre les États-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni vient dynamiser les coopérations économiques, militaires et géopolitiques. La signature à San Diego en mars dernier concrétise les « blocs » dans la zone, signe d’un affrontement pour l’instant idéologique entre un espace libre et ouvert contre une mainmise chinoise.

L’importance de l’Indo-Pacifique pour les États-Unis

En 2019, le Congrès des États-Unis définit une « stratégie indo-pacifique ». Une grande partie de la stratégie militaire américaine se concentre sur l’Indo-Pacifique : 60 % de la capacité nucléaire des États-Unis est déployée dans le Pacifique par exemple. Le pays a également mis en place depuis plusieurs années la politique du « pivot Pacifique » et la base de Kitsap dans l’État de Washington est entièrement dédiée aux exercices militaires dans cette région.

Les ambitions américaines dans l’Indo-Pacifique sont claires : « Les États-Unis sont une puissance du Pacifique », a dit Barack Obama. L’administration Biden se concentre aussi sérieusement sur cette région du monde, dans l’espoir de contrecarrer les ambitions chinoises. En effet, lors de la réunion du Quad en mars 2021, Antony Blinken a affirmé : « La Chine est le plus grand défi du XXIᵉ siècle. » Déjà en 1890, dans The Influence of Sea Power Upon History, l’Amiral Alfred Mahan montrait qu’il était crucial pour les États-Unis de redéployer leur stratégie militaire vers le Pacifique.

Cet intérêt pour la zone et la menace chinoise se renouvelle avec la formation de l’alliance AUKUS, mais aussi par le biais d’accords bilatéraux avec les Philippines par exemple. En février 2023, les Philippines autorisent les États-Unis à accéder à quatre de leurs bases. Si pour l’archipel, cet accord est gage de protection, paradoxalement celui-ci pousse la Chine à faire des démonstrations de force, notamment au-dessus de Taïwan, à l’instar du paradoxe de stabilité-instabilité de Glenn Snyder.

Les autres acteurs de la zone à connaître en prépa ECG

D’autres acteurs cherchent à étendre leur influence dans la zone. C’est par exemple le cas du Royaume-Uni. Dans un rapport publié en mars 2021 intitulé « Global Britain in a Competitive Age », le gouvernement britannique indique que le maintien et le développement des relations avec les pays de l’Indo-Pacifique sont au cœur de l’agenda diplomatique du pays pour les prochaines années.

Le Royaume-Uni aimerait accroître son influence dans cette nouvelle région stratégique, mais aussi modérer l’expansion chinoise. Bien implanté militairement, le Royaume-Uni possède une base navale à Singapour, plusieurs au Népal et au Brunei proche des Spratleys. Il est également question de l’ouverture d’une nouvelle base à Singapour. Toutefois, il est important de rappeler que l’intérêt premier pour les Britanniques est de veiller à la sécurité des routes maritimes, car ils comptent développer le commerce avec la région.

L’Australie cherche également à affermir ses positions en Indo-Pacifique, après avoir été trop longtemps spectatrice du jeu pékinois. Si l’Australie a récemment mis fin au « contrat du siècle » avec la France, c’est parce que le pays préférait se doter de sous-marins à propulsion nucléaire et non de sous-marins conventionnels. Cela permet en effet à Canberra d’être un acteur plus imposant dans la zone indo-pacifique. La signature de l’AUKUS confirme cette position d’acteur et non plus de spectateur pour le pays d’Oz.

La France, une future puissance indo-pacifique ?

La France se veut elle aussi une « puissance du Pacifique », grâce à ses trois collectivités que sont la Polynésie française, Wallis et Futuna, et ses bases militaires dans la région (en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française). Malgré les contestations et les instabilités à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie, la France possède de grands espaces, notamment avec l’archipel polynésien de 108 îles. Dès lors, la métropole s’implique pour redynamiser les liens, qu’ils soient politiques ou économiques. 

En 2023, la France souhaite asseoir sa place dans la zone indo-pacifique. Elle adopte une diplomatie proactive en organisant un sommet entre l’Europe et les puissances de l’Indo-Pacifique, sans y inclure la Chine ou même les États-Unis. Grâce à ses territoires, la France parvient à participer à des sommets tels que l’APEC avec la présence de M. Lecornu, représentant de l’armée. La France parvient aussi à participer à l’ASEAN dans le paquet défense.

La France, grâce à sa diplomatie dynamique et multimodale, conserve sa place dans les puissances du Pacifique. Elle entend valoriser son narratif indo-pacifique, s’appuyer sur ses atouts commerciaux (notamment les armes qui suscitent l’intérêt de l’Indonésie) et souligner les particularités de ses territoires comme la Polynésie pour ses vagues et ses athlètes pour les Jeux 2024. La France fait partie des puissances les plus engagées militairement et contribue donc à la stabilité de la zone, sa mission : se rendre indispensable. 

J’espère que cet article a pu t’aider à enrichir ta réflexion sur l’Indo-Pacifique ! N’hésite pas à regarder les synthèses d’actualité de Major-Prépa pour être au fait de ce qu’il se passe dans cette région du monde.