À moins de deux semaines des concours, il est temps de faire le point sur l’actualité géopolitique ! Nourrir sa copie d’éléments pertinents de l’actualité montre au correcteur un vif intérêt de l’étudiant pour la géopolitique, ce qui sera valorisé. Ci-dessous l’analyse de six enjeux majeurs, à mobiliser pour les différentes épreuves de géopolitique des concours.
L’unilatéralisme américain, l’ultime moyen de puissance ?
Lors d’une conférence de presse le 29 mai dernier, Donald Trump a officiellement annoncé le retrait des Etats-Unis de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’agence de de l’ONU pour la santé publique. Le président américain dénonce la complicité de l’OMS avec la Chine dans la rétention d’informations sanitaires sur la pandémie du Covid-19. La suspension des contributions américaines à l’OMS pose la question du positionnement des Etats-Unis par rapport au multilatéralisme et à la coopération internationale.
Quelques jours plus tôt, les Etats-Unis se sont également retirés officiellement de l’accord de partenariat transpacifique, cette zone de libre-échange visant à intégrer les régions américaines et asiatiques du Pacifique au sein d’un même ensemble économique.
Le traité « ciel ouvert », qui exigeait des pays de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) qu’ils ouvrent leur espace aérien afin de pouvoir contrôler mutuellement l’armement de chaque pays, compte désormais un pays de moins depuis le retrait des Etats-Unis, Donald Trump considérant que la Russie violait ces accords en empêchant les contrôles notamment dans l’Oblast de Kaliningrad en Pologne.
Ce retour en force de l’unilatéralisme américain en pleine crise mondiale est l’occasion d’une réflexion sur la puissance américaine. Si cette politique de refus de coopération est dommageable économiquement et politiquement pour de nombreux Etats et organisations internationales, elle constitue pour la puissance américaine une condition nécessaire pour limiter l’expansionnisme de la Russie et de la Chine que les instances internationales (ONU) ne parviennent à contenir.
On peut se demander si une telle politique n’est pas un aveu de faiblesse pour un pays qui a contribué à promouvoir un système mondial basé sur la coopération, mais aujourd’hui contesté par la Chine et la Russie. Cependant, cette posture géopolitique états-unienne actuelle que beaucoup considèrent comme l’expression d’une défense aveugle de leurs intérêts constitue également un signal, une alerte envoyée à la communauté internationale face aux menaces chinoise et russe, deux pays qui violent le droit international dans un objectif de puissance.
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Space X, le renouveau spatial américain ou une nouvelle course à l’espace ?
Le 30 mai dernier, l’entreprise aérospatiale Space X, a envoyé à bord d’une capsule Crew Dragon lancée par une fusée Falcon 9, deux astronautes américains jusqu’à la station spatiale internationale. Ce vol spatial, reporté de trois jours à cause de mauvaises conditions météorologiques, est la première mission américaine depuis l’arrêt du programme spatial en 2011.
Le succès de la mission de l’entreprise d’Elon Musk met un terme à la domination russe dans le secteur du lancement de fusées. En effet, depuis la fin de la navette spatiale américaine, les vaisseaux russes Soyouz étaient les seuls capables d’envoyer un homme dans l’espace. Le porte-parole de Roscomos, l’entreprise russe pour les activités spatiales a immédiatement réagi au succès de Space X : « Nous n’avons pas l’intention de rester inactifs. Cette année, nous allons tester deux nouvelles fusées et l’an prochain, nous reprendrons notre programme lunaire ».
La réussite d’Elon Musk réside dans la création d’un business model privé et adapté à l’aérospatial, un secteur auparavant dominé par les agences d’Etat. Le coût exorbitant des programmes spatiaux était un frein pour le gouvernement américain après la crise économique qui s’était alors recentré sur d’autres préoccupations, diminuant ainsi les contributions à la NASA.
Une nouvelle compétition, aux implications géopolitiques et scientifiques importantes, semble ainsi s’amorcer entre le nouvel acteur américain Space X et l’Agence spatiale russe. Ce terrain de jeu est aussi contesté par l’Agence spatiale européenne (ESA) qui finalise ses tests sur le lanceur Ariane 6, et même par des acteurs émergents comme la Chine et les Emirats Arabes Unis qui prévoient chacun de lancer leur première sonde vers la planète Mars en juillet prochain.
Hong Kong, une autonomie menacée ?
Alors que le projet de loi sur l’extradition des opposants politiques en Chine avait provoqué de violentes manifestations de millions de hongkongais à l’été 2019, un an plus tard, en mai dernier, le gouvernement de la République Populaire de Chine déclare soumettre au Parlement chinois une loi sur la sécurité interdisant toute opposition sécessionniste. Hong-Kong et la communauté internationale ont dénoncé cet acte comme une nouvelle tentative d’emprise sur la région sous administration spéciale (RAS), remettant en cause le principe décrété par Deng Xiaoping « un pays, deux systèmes » et l’autonomie de Hong-Kong.
Un rappel historique permet de comprendre la situation actuelle. En 1898, l’Empire britannique, qui cherche à agrandir sa colonie hongkongaise, signe avec la Chine un bail emphytéotique de 99 ans lui permettant de disposer de zones appelées Nouveaux Territoires autour de l’île. L’aménagement territorial de Hong-Kong ayant complètement intégré ces Nouveaux Territoires au bout d’un centenaire de développement, il était impossible pour le Royaume-Uni de ne restituer que ces Nouveaux Territoires. Ainsi, en 1997, le Royaume-Uni restitue la totalité de sa colonie hongkongaise, en échange de la promesse chinoise d’appliquer à la nouvelle RAS le principe de « un pays, deux systèmes » pendant 50 ans, lui garantissant une autonomie politique et économique.
Cependant, la pression du pouvoir central chinois sur Hong-Kong s’est accrue depuis les années 2010, accentuant la fracture entre les pro-Pékin et les pro-démocrates sur l’île, comme l’a montré le mouvement des Parapluies en 2014. L’échec de projet de loi d’extradition en 2019, suivi de la victoire écrasante du camp pro-démocrate aux élections locales ont montré à Pékin que ses ambitions expansionnistes ne pourraient se réaliser au travers de l’exécutif hongkongais dirigé par Carrie Lam. C’est dans ce contexte que la Chine, profitant de l’inactivité des opposants politiques hongkongais pendant la crise du coronavirus, tente de faire passer cette loi sur la sécurité pour ancrer sa mainmise sur Hong-Kong. Le Royaume-Uni, en réaction, envisage déjà de proposer la nationalité britannique aux hongkongais disposant du statut de britannique d’outre-mer.
A lire : Hong Kong, figure emblématique de la Greater Bay chinoise
Afghanistan, des négociations au point mort
En février dernier, les Etats-Unis avaient signé un accord de paix historique à Doha avec les Talibans en, prévoyant le retrait de la totalité des troupes américaines et celles de l’OTAN en échange de la promesse des Talibans de rompre définitivement avec l’organisation terroriste d’Al-Qaïda. Cependant, quelques mois après seulement, la violence a repris en Afghanistan avec notamment un attentat-suicide visant un hôpital à Kaboul faisant une vingtaine de morts.
L’intervention de la coalition militaire ISAF (Force internationale d’assistance et de sécurité) pilotée par l’OTAN en 2001 avait le double-objectif de faire tomber le régime des Talibans du Mollah Omar et d’assurer ensuite une stabilité politique en Afghanistan. Si le régime tombe quelques mois plus tard, obligeant les Talibans à se réfugier dans les provinces tribales montagneuses du Pakistan, la stabilité politique en 2020 n’est toujours pas acquise. L’OTAN se retire en 2014, constatant son échec et le maintien des tensions entre l’armée afghane régulière et les talibans, et livre ainsi l’armée afghane à elle-même.
Les Etats-Unis, seule nation encore sur place depuis 2014 pour contenir les violences politiques, se désengage progressivement. L’accord de paix signé en février dernier est un trompe-l’œil. En effet, le mouvement des talibans est devenu extrêmement hétéroclite depuis 2001, prenant plus ou moins ses distances avec Al-Qaïda. Ainsi, cet accord concerne seulement la branche des talibans s’étant dissociée de l’organisation terroriste. En outre, cet accord bilatéral n’a pas intégré le gouvernement afghan d’Ashraf Ghani qui continue de procéder à des échanges de prisonniers pour tenter de créer une union nationale, mais qui en réalité alimente les tensions en renforçant les forces militaires talibanes. Un dialogue inter-afghan étant toujours exclu, il paraît difficile aujourd’hui d’envisager un véritable cessez-le-feu dans le pays.
La Libye, une guerre interminable
Alors que le contexte de pandémie aurait pu accélérer le processus de négociations pour un cessez-le-feu entre les deux hommes forts libyens – le maréchal Khalifa Haftar et Fayez-el-Sarraj -, il semble que l’implication croissante de la Turquie et de la Russie en Libye ait réalimenté le conflit.
En 2011, les révoltes du Printemps arabe en Libye et l’intervention militaire de l’OTAN ont fait tomber le régime de Kadhafi, rompant les équilibres politiques et économiques qui existaient entre les différentes tribus et factions locales. La transition démocratique espérée avec la création du CGN (Congrès Général National) en 2012 a finalement conduit à l’implosion de la Libye. En effet, les partis islamistes s’estimant sous-représentés dans la nouvelle assemblée de la Chambre des Représentants élue en 2014 et devant remplacer le CGN, décident de remettre en place l’ancien CGN à Tripoli. Dès lors, la Chambre des Représentants fuit à Tobrouk dans l’Est de la Libye.
C’est au milieu de ce chaos politique, marqué également par les avancées de l’Etat Islamique et les revendications indépendantistes, que le maréchal Haftar devient l’homme fort de l’Est Libyen et Fayez-el-Sarraj celui de la région de Tripoli. Le GNA de Sarraj (gouvernement d’union nationale) reconnu par la communauté internationale contrôle la région de Tripoli tandis que l’ANL (Armée nationale libyenne) contrôle 80% du territoire, comprenant les régions de Cyrénaïque et du Fezzan.
En avril 2019, le maréchal Haftar lance une offensive sur Tripoli mais malgré de nombreux succès militaires, l’ANL semble marquer le pas aujourd’hui face aux contre-offensives de Tripoli, soutenu militairement par la Turquie. La prise de Watiya, la base militaire stratégique située à la frontière avec la Tunisie, par le GNA en avril dernier est un symbole fort marquant sa volonté de reconquête du territoire libyen.
Ce conflit s’est en effet internationalisé : les Emirats Arabes Unis, l’Egypte et l’Arabie Saoudite soutiennent Haftar dans la lutte contre les Frères musulmans et les milices islamistes avec lesquels le GNA s’est allié. La Russie, les Etats-Unis et la France (accusée de double-jeu) partagent avec le maréchal la cause de la lutte contre le terrorisme. De l’autre côté, le Qatar et surtout la Turquie, qui s’implique militairement malgré l’embargo, soutiennent le GNA en défenseurs de l’islam politique. Malgré les exhortations de la communauté internationale à trouver un cessez-le-feu, le conflit militaire continue et l’équation politique paraît insoluble.
Crise économique, l’Argentine au bord du gouffre
Le « Corallito » résonne comme un souvenir douloureux pour les Argentins ayant vécu cette période. Ce terme désigne en effet, les mesures économiques prises par le gouvernement argentin en 2001 pour limiter la fuite des capitaux, lors de la terrible crise économique provoquée par l’éclatement de la bulle internet.
Alors que le pays se trouve toujours dans des démêlés judiciaires avec des fonds vautours américains qui avaient profité de la cessation de paiement et de la conversion de la dette de l’Argentine en 2001, la crise économique liée à l’épidémie du coronavirus semble précipiter l’Argentine une nouvelle fois au bord du gouffre. En mai dernier, l’Argentine est entrée une fois de plus en défaut, ne pouvant honorer une dette de 500 millions de dollars.
Alberto Fernandez, président argentin de centre-gauche, tente de négocier une restructuration de 66 milliards de dette avec ses créanciers. La première proposition du ministre de l’économie Martin Guzman, qui consistait en un échange des obligations argentines contre de nouveaux titres avec un délai de grâce de trois ans sans paiement et une réduction de 62% sur les intérêts et 5,4% sur le capital, a été rejetée. Alors que l’inflation grimpe, et le chômage explose en Argentine, le FMI, très impopulaire pour avoir imposé des mesures drastiques en 2001 pourrait avoir un rôle à jouer pour sortir le pays d’une nouvelle crise.
A lire : Le retour du péronisme en Argentine, une solution face à la crise économique ?
N’hésitez pas à suivre l’actualité internationale pour être au point le jour de l’épreuve de géopolitique. Bonnes révisions !