L’immigration est une problématique complexe et très débattue. Alors que les débats sur les migrations sont exacerbés, certains affirment qu’elles représentent une menace, alors que d’autres parlent d’opportunité. Faisons le point sur ce sujet très actuel et jamais tombé au concours !
Les migrations : un marqueur d’instabilité
Les causes des migrations sont complexes, multiples et surtout interconnectées. En premier lieu, la faible croissance économique, qui offre peu de perspective stable pour l’avenir, incite de nombreux individus à chercher des horizons plus prometteurs ailleurs. Cette situation est exacerbée par la pauvreté, la répartition inégale des revenus, les taux de chômage élevés, les conflits internes qui perdurent et les violations de droits de l’homme, qui poussent des populations à fuir.
Aujourd’hui, la mauvaise gouvernance et la dégradation de l’environnement due aux changements climatiques viennent alimenter à nouveau les flux migratoires. Ainsi, les migrations internationales témoignent des inégalités structurelles et de l’instabilité qui prévalent dans les pays d’origine. Par conséquent, seul le développement, qui améliorerait les conditions de vie, peut atténuer ces flux.
Pour connaître les origines historiques des migrations, n’hésite pas à jeter un coup d’œil à cet article. Il te permettra de poser les bases du sujet et de mieux appréhender l’évolution de ce phénomène au cours du temps.
Les migrations peuvent être déstabilisatrices
En 2021, 10 ans après le début du conflit syrien, on compte 13 millions d’habitants contraints de quitter leur domicile. Soit plus de 60 % de la population du pays. Sur ces 13 millions, 6,6 millions ont franchi les frontières nationales à la recherche de sécurité. La grande majorité d’entre eux ont trouvé refuge dans des pays voisins tels que la Turquie, la Jordanie ou le Liban.
Toutefois, ces migrations massives peuvent s’avérer déstabilisatrices pour les pays d’accueil. Et ce, particulièrement lorsqu’elles sont soudaines et imprévues, car ces nations ne sont souvent pas préparées à absorber un tel flux de réfugiés.
Le cas du Liban illustre ce problème
Ce pays de 4,5 millions d’habitants a accueilli 1,5 million de réfugiés syriens depuis 2011. Soit une personne sur quatre qui est réfugiée. Ces réfugiés vivent dans des camps informels, où les conditions de vie sont extrêmement précaires (situation sécuritaire instable, mauvaise isolation des tentes ou cabanes…). Le Liban peine à faire face à cette vague migratoire et l’opinion publique est de plus en plus réticente à l’accueil des réfugiés. Les Syriens doivent faire face à une certaine hostilité, voire au racisme, d’une partie de la population libanaise à leur égard.
Aujourd’hui, le gouvernement libanais complique volontairement les démarches pour obtenir un permis de résidence. Espérant ainsi convaincre les Syriens de rentrer dans leur pays. En conséquence, de nombreux réfugiés vivent au Liban sans statut légal, limitant considérablement leur mobilité par crainte de contrôles et d’arrestations.
La « fuite des cerveaux » : une menace pour le pays de départ
Dans de nombreux pays en voie de développement, une proportion significative de la main-d’œuvre hautement qualifiée a choisi de s’établir à l’étranger. Privant ainsi ces pays de leurs talents les plus dynamiques et compétents. Ce phénomène est couramment désigné sous le nom de « fuite des cerveaux » (brain drain). Il est d’autant plus redouté par les pays d’origine que les pays développés multiplient leurs efforts pour attirer les immigrants qualifiés grâce à des politiques d’immigration plus favorables.
En effet, les États se livrent une compétition effrénée pour attirer des migrants qualifiés, dont une majeure partie provient d’Asie. Ils sont considérés comme des acteurs clés dans la bataille technologique actuelle. On compte une dizaine de pays africains où plus de 40 % de la population qualifiée vit à l’étranger. Cela est illustré par la déclaration de l’ancien ministre malien de l’Énergie et de l’eau, Habib Ouane, lorsqu’il a affirmé que « l’Île-de-France comptait plus de médecins béninois que le Bénin ». Cette réalité reflète une situation où la diaspora qualifiée est devenue une ressource cruciale à l’étranger. Laissant un vide de compétences pour les pays d’origine et posant des défis importants en matière de développement.
Les migrations internationales : une chance pour le pays récepteur et le pays émetteur
Alors que, dans le débat public, les immigrés sont souvent perçus comme une menace, les migrations internationales peuvent avoir un effet économique positif pour les pays riches. En effet, les politiques d’immigration, visant à attirer de la main-d’œuvre qualifiée, encouragent l’innovation.
Dans le domaine de la recherche, les immigrés sont à l’origine de 24 % des brevets déposés aux États-Unis sur la période 1940-2000. Un accroissement de 1 % du nombre de scientifiques et d’ingénieurs immigrés augmente de 9 à 18 % le nombre de brevets par tête déposé (J. Hunt et M. Gauthier-Loiselle, How Much Does Immigration Boost Innovation? [2010]).
En 2011, 56 % des doctorats en sciences de l’ingénieur, 51 % en informatique et 44 % en physique ont été délivrés à des immigrés aux États-Unis. De plus, dans un contexte de déclin démographique dans les pays du Nord, les immigrés peuvent combler un besoin de main-d’œuvre. Emmanuel Todd affirmait d’ailleurs que « l’installation d’étrangers en Europe est l’une des conditions de sa survie ».
Le cas des remises
Nous avons vu que le déplacement de migrants qualifiés pouvait représenter une menace pour le pays de départ. Cependant, ces migrants sont mieux rémunérés et peuvent donc envoyer davantage de fonds. Ce qu’on appelle les remises : des transferts d’argent que les émigrés envoient à leurs proches restés dans leur pays d’origine. Ces remises représentent parfois une ressource vitale et peuvent même être supérieures à l’APD (aide publique au développement). C’est le cas d’Haïti, où elles représentent 37 % du PIB.
Selon la Banque mondiale, en 2022, le montant des envois de fonds vers des pays à revenus faibles et intermédiaires s’élève à 626 milliards de dollars. Ces remises sont donc une source vitale de revenus contribuant à réduire la pauvreté, à améliorer la situation nutritionnelle, le niveau d’éducation… (Banque mondiale). De plus, il se peut que des migrants retournent dans leur pays d’origine après avoir acquis de nouvelles compétences à l’étranger. C’est ce qu’on appelle le « reverse brain drain ».
Les migrations reflètent la complexité du monde, car les bénéfices et les inconvénients tirés par les pays de départ et d’accueil sont bien souvent déséquilibrés. Les migrants ont différents rôles pour les pays émetteurs et récepteurs. Ils peuvent représenter une menace pour l’un, tout en représentant une opportunité pour l’autre.
Nous venons d’étudier les migrations en tant que menace et opportunité. Désormais, si tu souhaites étudier le sujet des migrations plus en profondeur et comprendre le parallèle que l’on établit avec la mondialisation, clique sur ce lien.
Sources
« Réfugiés syriens au Liban » – Vision du Monde
L’Invention de l’Europe – Emmanuel Todd
L’Immigration qualifiée : un visa pour la croissance – Emmanuelle Auriol, Hillel Rapoport
« Migrations et transferts de fonds. Impact sur les pays d’origine », Revue d’économie du développement (2007)
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