OMS

Pendant la crise de la Covid-19, l’OMS (Organisation mondiale de la santé) a été mise à rude épreuve. Accusée d’inefficacité et de complaisance vis-à-vis de la Chine, l’action de cette institution a été remise en cause. Je te propose dans cet article de revenir sur le rôle et les évolutions de l’OMS.

N’hésite pas à consulter nos différents articles de géopolitique en cliquant ici !

Les prémices de l’OMS

La gouvernance sanitaire mondiale se développe au XIXᵉ siècle. En 1851, la première Conférence sanitaire internationale se déroule à Paris, rassemblant 11 États européens et la Turquie. L’objectif n’est pas de lutter contre les épidémies comme le choléra ou la peste, mais d’uniformiser les règlements de la quarantaine pour faciliter les échanges commerciaux. Néanmoins, la science se heurte aux réticences du pouvoir politique qui tente de limiter les durées des quarantaines pour préserver le commerce international. En 1907, l’Office international de l’hygiène publique est créé. Il s’agit de l’ancêtre de l’OMS.

Cependant, les structures existantes au début du XXᵉ siècle visent seulement à endiguer la propagation des maladies, afin de protéger les relations internationales et les échanges commerciaux. De plus, les politiques sont caractérisées par l’importance accordée à la protection des populations européennes. Les maladies tropicales sont ignorées.

À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, l’ONU décide de créer une nouvelle institution internationale consacrée à la santé

En 1948, la Constitution de l’Organisation mondiale de la santé est signée et ratifiée. Son objectif est d’« amener tous les peuples au niveau de santé le plus élevé possible ». Ce qui marque un changement de perspective par rapport aux institutions précédentes. Le « droit à la santé » est inscrit dans sa Constitution.

Ses principales actions sont la mise en place de normes et d’accords internationaux en matière de santé, l’aide à la recherche et à la formation, une assistance technique et un partage des données statistiques mondiales. Des priorités sanitaires sont également fixées, comme la lutte contre le paludisme et la tuberculose, et la protection de la santé de la mère et de l’enfant.

Aujourd’hui, l’OMS compte 194 membres et siège à Genève. Elle est dirigée par Tedros Ghebreyesus depuis 2017. Il est le premier Africain à devenir directeur général d’une des institutions majeures des Nations unies. Et c’est aussi le premier directeur de l’OMS à ne pas être médecin.

Les évolutions de l’OMS

On observe deux grandes périodes d’évolution de l’OMS jusqu’au début des années 1990.

De 1948 à 1977, les stratégies médicales sont dirigées vers les maladies causant le plus de ravages dans le monde. Dès 1950, l’OMS met en place une campagne internationale de vaccination contre la tuberculose.  Néanmoins, certains programmes mis en œuvre dans les pays en développement, notamment le programme de lutte contre le paludisme lancé en 1955, échouent à cause du manque de ressources de ces pays.

À partir de 1977, on assiste alors à une nette réorientation des activités de l’OMS à travers le nouveau concept de « Santé pour tous d’ici l’an 2000 ». Les actions de l’OMS sont désormais axées sur la réduction des inégalités sanitaires dans le monde et des réformes des politiques de santé. Parfois au détriment de ses activités d’expertise épidémiologique.

L’OMS a ainsi deux modalités d’action. D’une part, elle peut mettre en place des mesures verticales, qui sont des programmes destinés à éradiquer des maladies, comme la variole. D’autre part, les mesures horizontales visent un renforcement des structures sanitaires nationales, à travers par exemple la formation de médecins.

L’un des principaux succès de l’OMS est l’éradication de la variole en 1979, grâce à un vaste programme de vaccination lancé en 1974. Aujourd’hui, la poliomyélite et la dracunculose sont également en voie d’éradication.

Si tu veux en savoir plus sur les défis sanitaires dans le monde, je te conseille cet article.

Les différentes fonctions de l’OMS

L’OMS dispose de quatre fonctions principales.

L’OMS dispose d’abord d’un rôle normatif. Elle vote des accords et des conventions. Avant 1996, elle s’intéressait exclusivement aux sujets administratifs. Depuis, elle traite aussi de questions de santé publique, comme le contrôle du tabagisme.

Elle exerce également un pouvoir réglementaire direct. Elle édicte des règlements sanitaires internationaux pour créer une législation internationale dans des domaines divers (quarantaine, hygiène alimentaire, statistiques sanitaires…).

L’OMS dispose aussi d’un rôle opérationnel d’assistance technique et parfois d’aide médicale. Elle peut apporter un soutien à des programmes ciblés sur des problématiques sanitaires, comme la vaccination ou l’approvisionnement en eau. Ce rôle est de plus en plus financé par des fonds extrabudgétaires avec, par exemple, l’aide du PNUD. L’OMS fait néanmoins face à d’importantes difficultés à cause du manque d’infrastructures des PED, d’un sous-financement et d’une coopération inefficace avec le PNUD ou des organismes locaux.

Enfin, l’OMS a un rôle de coordination de la recherche. Elle se charge de diffuser l’information médicale à l’échelle mondiale.

Pour mieux comprendre précisément le rôle de l’OMS en cas de crise sanitaire mondiale, je te conseille ce reportage.

Les failles de l’OMS : que retenir en prépa ECG ?

Des retards. Lors de la pandémie de grippe de 2009, l’OMS a été accusée d’avoir surréagi et de privilégier les intérêts des laboratoires pharmaceutiques. Ces critiques ont conduit à une diminution des financements consacrés à la gestion des crises sanitaires. Face à l’épidémie d’Ebola et à la Covid-19, l’OMS a alors été accusée de réagir trop lentement.

L’OMS n’a pas l’autorité pour faire appliquer ses recommandations. Elle n’a pas la capacité d’édicter des lois. Elle ne peut pas non plus recommander fortement l’utilisation d’un outil si celui-ci n’est pas disponible partout. Au début de la pandémie de Covid-19, l’OMS ne pouvait ainsi pas recommander fortement le port du masque, car de nombreux pays ne possédaient pas de stocks.

L’OMS est accusée d’être devenue une organisation plus politique que scientifique. Au début de la pandémie de Covid-19, l’OMS a été accusée d’être trop conciliante avec la Chine et de tarder à déclarer l’état d’urgence sanitaire international. Le président de l’OMS, l’Éthiopien Tedros Ghebreyesus, a été pointé du doigt pour sa complaisance. Certains y voyant un moyen pour l’Éthiopie de préserver ses liens avec la Chine. Dans un contexte de tensions sinoaméricaines, en avril 2020, le président américain Donald Trump annonce suspendre la contribution des États-Unis au budget de l’OMS. Cette dernière devient ainsi une sorte de balle disputée entre deux États, au détriment des questions sanitaires.

Enfin, l’OMS souffre de sous-effectifs. Son département de préparation mondiale aux risques épidémiques ne compte ainsi que 12 personnes. Alors que les centres pour le contrôle et la prévention des maladies aux États-Unis rassemblent 800 personnes.

La réforme du financement de l’OMS

En mai 2022, l’Assemblée mondiale de la santé a adopté une réforme historique de son financement. Jusqu’alors, le budget de l’OMS était financé par deux fonds. Les contributions obligatoires des États membres, qui étaient fixées chaque année en fonction des ressources de chacun, représentaient 16 % du budget total en 2022. La plus grande partie du budget était financée par les contributions volontaires des États et des organismes privés. Cette répartition était l’objet de nombreuses critiques, car les organismes privés étaient accusés d’orienter politiquement les actions de l’OMS en acceptant de financer uniquement certains programmes.

Par exemple, si les fonds apportés par la fondation Bill et Melinda Gates contribuaient à 15 % du budget total, ils étaient en grande partie destinés à lutter contre la poliomyélite. Cette privatisation de l’OMS remonte aux années 1990, lorsque la directrice générale de l’OMS, Gro Harlem Brundtland, décida de faire appel au secteur privé pour augmenter le budget. L’OMS est ainsi accusée de manque de transparence et de privilégier les pays développés. La réforme de 2022 prévoit que d’ici 2028, la part des contributions obligatoires devra être portée à 50 % du budget total. L’objectif est de permettre à l’OMS de retrouver son indépendance.

Tu l’as maintenant compris, l’OMS est une institution en crise, souvent critiquée, qui tente de se réformer pour contribuer à l’amélioration de la santé mondiale. Depuis l’élection de Tedros Ghebreyesus, plusieurs grands programmes ont été lancés afin de redynamiser l’organisation et lui redonner de la légitimité. En octobre 2022, l’OMS a par exemple lancé le Collectif pour le sevrage tabagique, qui vise à lutter contre le tabagisme en développant les techniques de sevrage à l’échelle mondiale.

Enfin, si tu veux comprendre l’impact géopolitique d’une pandémie, je te conseille cet article sur les pandémies comme fléau géopolitique.