Somaliland

Le Somaliland est un État situé dans la Corne de l’Afrique, dont la capitale est Hargeisa. Il partage des frontières avec le Djibouti, l’Éthiopie et, comme son nom le laisse deviner, la Somalie. Il dispose également d’une ouverture maritime sur la mer Rouge, avec une côte de 800 km.

Introduction

Le Somaliland n’est pas reconnu internationalement comme un État indépendant, malgré la déclaration de son indépendance en 1991. Il est revendiqué par la Somalie et reconnu par la communauté internationale comme un État fédéré de la République fédérale de Somalie. Sa population s’élève à six millions d’habitants.

Il est souvent référé comme le « pays qui n’existe pas »… Ironiquement, il est, dans la Corne de l’Afrique, le seul pays non reconnu officiellement et pourtant le seul avec des institutions véritablement démocratiques. Il est aussi l’un des pays les plus sûrs et les plus pacifiques du continent.

Histoire

Colonisation

Le Somaliland est un protectorat britannique depuis 1888, dont l’utilité pour les Britanniques était surtout de contrôler le très stratégique détroit Bab el-Mandeb. Les colons ne s’intéressaient guère à l’intérieur du pays, ne s’ingérant pas et laissant les indigènes nomades vivre comme bon leur semblait, dans le respect de leurs us et coutumes. Les Britanniques créèrent ainsi quelques écoles permettant à une poignée d’élites de poursuivre leurs études en Angleterre.

La Somalie italienne (actuelle Somalie) connut quant à elle un sort bien différent, plus brutal, devant se plier aux exigences politiques et économiques de l’Italie qui, notamment dans les années 1920, considérait les indigènes comme des peuples inférieurs, à civiliser et à soumettre. Plusieurs affrontements eurent ainsi lieu. En parallèle, les autorités italiennes mirent en place une politique de scolarisation de masse, mais de bas niveau.

Indépendance

Le Somaliland obtient son indépendance en 1960 et fusionne avec la Somalie italienne qui prend son indépendance quatre jours plus tard. Si l’enthousiasme est de mise face à cette unité, l’héritage de la colonisation fait que les deux territoires sont quand même très différents. Par exemple, les uns parlaient anglais, les autres italien, tandis que le somali n’était pas encore une langue écrite.

Les choses se compliquent en 1978, lorsque le dictateur somalien Syaad Barre, au pouvoir depuis son coup d’État de 1969, perd sa guerre contre l’Éthiopie et fait porter la responsabilité de cette défaite à l’ex-Somaliland. À partir 1981 s’ensuivent des années de guerre civile très meurtrières, jusqu’à la chute du régime de Syaad Barre en janvier 1991. Le 18 mai 1991, le Somaliland déclare son indépendance, optant ainsi pour un retour aux frontières coloniales. Les indépendantistes furent d’ailleurs confortés par rapport à leur décision de sécession vu le chaos, l’anarchie et la vacance politique qui continuèrent de régner au sud en Somalie.

Si les choses ne furent pas faciles au Somaliland après 1991, la notion d’État étant totalement inconnue des Somalis avant la colonisation, le pays se stabilise à partir de 1996, avec un État incontesté et deux assemblées élues. La Constitution est approuvée en 1997.

Diplomatie

Pour un jeune pays dans une telle situation, la priorité diplomatique est bien sûr d’obtenir une reconnaissance internationale, essentielle afin d’exister en tant qu’État. Sur ce point, un long chemin reste à faire, comme le montre le fait que le pays ne dispose quasiment d’aucune aide internationale, ni humanitaire ni financière, contrairement à ses voisins. Étant un État à la démographie modeste et majoritairement pauvre, le Somaliland a du mal à se créer un récit fédérateur à l’international et n’a donc d’autre choix que de tenter de mobiliser un maximum de leviers économiques, afin d’obtenir une reconnaissance de sa souveraineté. Et des atouts économiques, le Somaliland en a !

Quant à l’aide internationale, le Somaliland n’en bénéficie pas et ne s’en plaint pas beaucoup d’ailleurs, beaucoup jugeant que la communauté internationale n’a apporté que des guerres et des divisions aux peuples africains, notamment aux Somaliens du Sud. L’ONU tenta en effet d’intervenir dans le pays en 1993, proposant un nouveau plan de partage territorial fondé sur les clans et sans une véritable réalité sur le terrain. Le président élu du Somaliland, jugeant ce plan totalement absurde, pria le représentant onusien M. Kapungu de remonter tranquillement dans son avion. Cet épisode, qui rappela à beaucoup la conférence de Berlin de 1815, engendra dans le pays une méfiance vis-à-vis de l’ONU et de la communauté internationale.

Économie

Le port de Berbera donnant sur la mer Rouge est l’un des principaux leviers économiques du Somaliland, lui octroyant un rôle stratégique au sein de la Corne de l’Afrique. Il constitue surtout, dans une zone criblée de conflits, une alternative intéressante aux ports de Djibouti et de l’Érythrée.

L’Éthiopie est ainsi l’un des pays les plus intéressés par le port de Berbera, car il lui permet de se passer de l’ouverture maritime de Djibouti notamment. Rappelons que l’Éthiopie est un pays aride et enclavé, sans façade maritime, étant bloqué par l’Érythrée, le Djibouti et la Somalie. Le port relie en effet l’Europe et l’Asie, tout en étant un port en eaux profondes. La nature de l’actionnaire principal de ce port illustre très bien cet aspect stratégique : il s’agit de DP World, groupe émirati et troisième exploitant portuaire mondial.

Au-delà des activités portuaires, l’économie du Somaliland repose beaucoup sur des activités agraires, notamment l’exportation du bétail qui demeure la première source de revenus du pays, mais qui se veut de plus en plus irrégulière, du fait des conditions climatiques changeantes. Les transferts de fonds provenant de la diaspora sont aussi un levier économique important pour ce petit pays, comme c’est le cas pour de nombreux pays africains.

Relations avec la Somalie

Le divorce avec la Somalie a laissé un goût très amer du côté de Mogadiscio. En plus des différends politiques, la Somalie dénonce tous les accords économiques ainsi que les relations bilatérales entre Hargeisa et d’autres capitales.

Par exemple, la Somalie a vivement critiqué l’installation de DP World, évoquant même une violation de sa souveraineté. Elle ne voit pas d’un très bon œil non plus les relations accentuées entre le Somaliland et l’Éthiopie, rival historique. Un mémorandum d’entente est signé en 2024 entre les deux pays, avec l’installation d’une base militaire éthiopienne au Somaliland, permettant à l’Éthiopie d’accéder à la mer Rouge.

Démocratie et stabilité

Si la Corne de l’Afrique est tristement connue pour son instabilité politique et ses guerres civiles, le Somaliland est une exception régionale. Les principales fonctions régaliennes sont exercées de manière exemplaire, permettant ainsi une stabilité pérenne. De plus, le pays connaît des élections qui ont lieu de manière régulière et démocratique, avec des alternances politiques qui se font de manière pacifique et sans heurts.

Certains qualifient même le Somaliland de modèle pour le continent. La différence avec son voisin somalien est en tout cas incontestable. Il se passe rarement une journée en Somalie sans que ne soit commis un attentat ou un enlèvement, notamment de la part des terroristes d’Al-Chabab.

Conclusion

Le Somaliland est certes pauvre et isolé, mais il demeure une expérience particulière et originale en Afrique, alliant démocratie et traditions. Disposant de peu d’atouts, mais d’une grande maturité politique, le pays tente d’avancer, pas à pas, préférant ne pas brûler les étapes.

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