« Le traité de Versailles, ce mal-aimé » est l’intitulé d’un ancien oral de HEC. On te propose ici de revenir avec précision sur le contenu et les conséquences du traité de Versailles. Il s’agit d’un traité de paix signé à la fin de la Première Guerre mondiale, le 28 juin 1919, et qui fut élaboré au cours de la Conférence de la paix à Paris. Il établit la création de la Société des Nations (SDN) et détermine les principales sanctions prises à l’encontre de l’Allemagne.
Le déroulement de la Conférence de la paix
Déroulement et premiers désaccords
Lors de la Conférence de la paix à Paris, ouverte le 18 janvier 1919, les États victorieux de la Première Guerre mondiale invitent les représentants des pays du monde entier, à l’exception notable des États vaincus. L’Allemagne ne prend donc pas part aux discussions.
Dans le camp des pays vainqueurs, des divergences majeures naissent rapidement. Les États-Unis de Woodrow Wilson souhaitent mettre en place une nouvelle diplomatie internationale, dont les principes sont détaillés dans ses quatorze points. Ils souhaitent également éviter de sanctionner économiquement l’Allemagne pour ne pas l’affaiblir et éviter de générer une certaine rancune.
Si le Royaume-Uni de Lloyd George veut d’abord affaiblir au maximum l’Allemagne, sa position change en mars 1919, plus favorable à un équilibre des puissances. Mais pour la France de Georges Clemenceau, les volontés sont totalement différentes. La France souhaite imposer de lourdes sanctions économiques à l’Allemagne et récupérer l’Alsace-Lorraine perdue lors de la guerre franco-allemande de 1870-1871. De son côté, l’Italie souhaite récupérer quelques terres.
Conditions du traité et notion de Diktat
Les détails de la Conférence constituant le futur traité de Versailles sont partagés à l’Allemagne le 7 mai 1919. Le contenu du projet de traité suscite de vives réactions au sein de la population allemande et des contre-propositions sont envoyées le 29 mai. De très légères modifications sont apportées et le projet définitif est remis le 16 juin à l’Allemagne.
Un délai de cinq jours pour signer le traité est imposé à l’Allemagne, au-delà duquel l’armée française pourrait envahir le pays. Le texte est accepté et adopté par l’Assemblée allemande, à l’exception des articles 227 à 231. En effet, l’article 227 affirme la volonté de traduire devant la justice internationale l’ancien empereur Guillaume II, et l’article 231 déclare l’Allemagne et ses alliés seuls responsables des pertes et des dommages liés à la Première Guerre mondiale.
Du côté allemand, le traité de Versailles est alors perçu comme un Diktat. Cependant, Georges Clemenceau exige la « signature inconditionnelle dans les 24 heures » du traité, ce que l’Allemagne fera.
Contenu du traité
Dans le fond, le traité est divisé en plusieurs parties. La première met en place une charte pour la Société des Nations en reprenant les volontés de Woodrow Wilson. Une autre partie vise à construire et à diffuser la paix sur le continent européen. Mais une grande partie du traité de Versailles est consacrée aux sanctions à l’encontre de l’Allemagne.
D’abord, les sanctions sont territoriales : l’Allemagne est amputée de 13 % de son territoire et de 10 % de sa population. Des départements, cantons et territoires sont restitués à la France, à la Belgique, au Danemark ou encore à la Pologne. On peut penser à la restitution à la France de la Lorraine. L’Allemagne perd également toutes ses colonies et renonce définitivement à son Empire colonial.
Sur le plan militaire, le réarmement de l’Allemagne est limité, tout comme son armée. De plus, quelques territoires allemands sont démilitarisés. Enfin, sur le plan économique et financier, l’Allemagne doit payer d’importantes réparations aux Alliés (132 milliards de marks-or). L’Allemagne perd également la propriété de tous ses brevets. On le voit, les sanctions territoriales, militaires et économiques sont très importantes.
Signature du traité
Le 28 juin 1919, le traité de Versailles est alors signé dans la galerie des Glaces du château de Versailles. Il est important de noter que c’est dans cette même galerie que le Prussien Otto von Bismarck avait proclamé l’Empire allemand en 1871 (à la suite de la guerre franco-allemande de 1870-1871).
Cette proclamation à Versailles avait alors été vécue par la France comme une véritable humiliation. Le fait de signer le traité qui sanctionne l’Allemagne dans cette même salle permet dans une certaine mesure d’effacer cette humiliation. Le traité est aussi symboliquement signé le 28 juin 1919, soit cinq ans, jour pour jour, après l’attentat de Sarajevo, considéré comme l’élément déclencheur de la Première Guerre mondiale.
Une paix d’abord visible dans les années 1920
Tentative de reconstruction économique
Entre 1921 et 1924, l’Allemagne fait face à une crise de l’hyperinflation. Toutefois, la République de Weimar (nom donné au régime politique allemand entre 1918 et 1933) crée une nouvelle monnaie, le Rentenmark, visant à stabiliser la situation économique. Cette stratégie fonctionne et entre 1924 et 1929, l’économie allemande se stabilise.
Par ailleurs, le plan Dawes mis en place en 1924, permet d’instaurer un cercle vertueux entre les États-Unis, l’Allemagne et les Alliés. Les États-Unis prêtent de l’argent à l’Allemagne, l’Allemagne paye ses réparations aux Alliés et les Alliés remboursent leurs dettes de guerre aux États-Unis.
Tentative de reconstruction politique et diplomatique
Après avoir mis en place le Rentenmark, Gustav Stresemann, alors ministre allemand des Affaires étrangères, souhaite ramener l’Allemagne dans le concert des nations. Par conséquent, Gustav Stresemann et Aristide Briand (ministre français des Affaires étrangères) se rapprochent.
En 1925, la politique de réconciliation franco-allemande est symbolisée par la signature du traité de Locarno. L’Allemagne reconnaît officiellement ses frontières avec la France et la Belgique. Un an après, en septembre 1926, l’Allemagne entre à la Société des Nations. À ce titre, Gustav Stresemann et Aristide Briand reçoivent conjointement le prix Nobel de la Paix.
Enfin, en 1928, le pacte Briand-Kellogg déclare la guerre hors-la-loi et est signé par 63 pays, dont l’Allemagne.
Mais la crise de 1929 remet tout en cause
Alors que le ministre français Aristide Briand proposait en septembre 1929, devant la Société des Nations, l’établissement d’un lien fédéral entre les pays européens, une crise économique majeure éclate un mois plus tard. En effet, le krach boursier du 24 octobre 1929 plonge les États-Unis dans la grande dépression. Les conséquences se diffusent dans le monde entier et en particulier en Allemagne (très liée aux États-Unis avec le plan Dawes de 1924).
La production industrielle chute et l’activité économique est très affectée. Pour faire face à la crise, une politique d’austérité est mise en place. Les impôts augmentent et les dépenses publiques diminuent. Le mécontentement de la population est grandissant, alors que les réparations de guerre sont loin d’avoir été entièrement payées aux Alliés.
Si tu veux en savoir plus sur la crise économique de 1929, n’hésite pas à lire cet article.
Le retour à la guerre du côté allemand
Émergence d’Adolf Hitler et montée en puissance du nazisme
Suite à un putsch raté en 1923, Adolf Hitler est emprisonné. C’est en détention qu’il commence l’écriture de son livre Mein Kampf, qui lui permet de se faire connaître. Il devient alors chef du parti national-socialiste (NSDAP), aussi appelé parti nazi. Il n’obtient que 2 % des voix en 1928.
Toutefois, à la suite du mécontentement grandissant de la population allemande après la crise de 1929, son parti fait un score spectaculaire en 1930, avec 18 % des voix. En 1932, le NDSAP réalise un score de 38 % et prend le pouvoir. En 1933, Adolf Hitler est nommé chancelier allemand.
Marche à la guerre
Alors à la tête du gouvernement allemand en 1933, Hitler annonce clairement son ambition : reconstituer la grande Allemagne. Il veut abroger le traité de Versailles perçu comme un Diktat. Le traité de Versailles, qui demande des réparations trop importantes, est également source de rancune au sein de la population allemande.
Alors que le service militaire et la militarisation de la Rhénanie sont interdits par le traité de Versailles, Hitler décide la réintroduction du service militaire en 1935 et la remilitarisation de la Rhénanie en 1936. Au prétexte de réunir tous les germanophones sous le Reich, Hitler annexe l’Autriche et les Sudètes en 1938. Le 1er septembre 1939, l’Allemagne envahit la Pologne et les démocraties réagissent : c’est le début de la Seconde Guerre mondiale.
Conclusion
En définitive, le traité de Versailles a conclu officiellement et définitivement la Première Guerre mondiale. La volonté américaine de construire une nouvelle diplomatie internationale est respectée par la création de la Société des Nations. Mais dans le même temps, les lourdes sanctions, en particulier économiques, imposées à l’Allemagne génèrent de la rancune contre les Alliés au sein de la population allemande.
Si l’Allemagne était parvenue à se stabiliser économiquement et diplomatiquement, la crise de 1929 remet tout en cause et ses conséquences favorisent l’émergence du parti nazi. Hitler devient chancelier allemand en 1933 et met en place sa politique de marche à la guerre, aboutissant en 1939 au début de la Seconde Guerre mondiale. Censé assurer la paix, le traité de Versailles semble ainsi avoir jeté les bases de la Seconde Guerre mondiale.
J’espère que cet article t’a permis de mieux comprendre pourquoi le traité de Versailles est si controversé. Retrouve ici toutes nos ressources en géopolitique !