Dans cette tribune exclusivement publiée sur Major Prépa, Herbert Castéran, Directeur Général d’IMT Business School, revient sur la publication fin décembre des données publiées par le Ministère de l’Enseignement Supérieur sur l’insertion des diplômés des Grandes Écoles de management françaises, et sur la faible corrélation entre ces derniers et le choix des étudiants.

La publication, par la Sous-direction des Systèmes d’Information et des Études Statistiques du MESR (le SIES), de quatre « notes flash » relatives aux taux d’emploi salarié en France des diplômés de niveau Bac+5 en management, ne semble pas avoir suscité un grand nombre de réactions, tout du moins officiellement. Pourtant, tout y est, jusqu’aux données en open data pour les plus curieux. Ces données sont elles-mêmes issues non de sondages – avec les inévitables marges d’erreur et les biais liés aux déclaratifs qu’on peut en attendre, mais de l’analyse de fichiers, notamment ceux de la Déclaration Sociale Nominative, tout à fait incontestables quant à la réalité des situations salariées.

Certes, la date de publication, un 19 décembre juste avant les vacances, ne favorise pas la visibilité de ces informations. Et pourtant… Que devrait-il y avoir de plus important pour des étudiants ou leurs parents que de se poser la question de la réalité des débouchés offerts par les différents diplômes ? 

Obtenir un diplôme représente un investissement en temps conséquent (plusieurs années de sa vie), une perte d’opportunités (d’autres parcours que l’on aurait pu suivre) et un investissement financier important (droits de scolarité comme frais de vie). Il est donc légitime, comme tout investissement, de s’interroger sur le retour de cet investissement en termes professionnels et d’arbitrer ses choix en conséquence. Que dirait-on d’un investisseur investissant dans des actifs faiblement rentables, alors qu’il a la connaissance d’autres actifs plus rentables ?

Le faible intérêt manifesté autour de ces notes du SIES semble être révélateur d’une logique plus profonde

Que l’on me permette de prendre le cas d’IMT-BS (Institut Mines-Télécom Business School), cas d’espèce mais néanmoins transposable à d’autres établissements. IMT-BS se caractérise par une insertion professionnelle très largement reconnue. Première école de management française en « value for money » dans le classement du Financial Times depuis des années, école qui place en proportion le plus de diplômés dans les entreprises du CAC 40 (LinkedIn – Business Cool, 2023), école qui suscite dans le même temps un taux record de créateurs d’entreprises parmi ses diplômés (2ème en France, classement 2023 des grandes écoles de commerce de l’Etudiant) : ses titres de gloire en matière d’employabilité sont nombreux. Le dernier en date vient de cette étude publiée par le SIES, classant IMT-BS, suivant les cohortes, entre la 2ème et la 5ème place nationale en termes de taux d’emploi salarié en France ! IMT-BS devrait donc logiquement susciter une appétence maximale notamment de la part des étudiants en classes préparatoires, fins connaisseurs du monde des Grandes Ecoles. Et pourtant, dans le classement SIGEM, qui reflète les préférences des étudiants des classes prépas, IMT-BS n’est classée qu’à la 14e place. 

Cette dissonance entre perspectives réellement offertes et choix effectués interroge. Ses causes peuvent être nombreuses : méconnaissance in fine des débouchés réellement offerts, représentation plus ou moins fantasmée de certaines écoles, méfiance par rapport aux classements (pas toujours injustifiée d’ailleurs), etc. Le résultat en est toutefois une perte de chance pour certains étudiants opérant leur choix dans un cadre de rationalité limitée : les représentations semblent plus fortes que les faits, faisant de l’enseignement supérieur un marché fortement guidé par la marque.

En ce sens, la publication de statistiques d’insertion par un tiers de confiance comme le SIES va dans la bonne direction. Même si elle ne concerne, pour l’heure, que la dimension salariée et en France, elle permettra, peut-être, d’introduire une transparence informationnelle, pour un choix éclairé des étudiants et de leur famille.