Pétain

Philippe Pétain (1856-1951) est un homme dont le destin personnel fut intimement lié à celui de la France pendant près de 30 ans. Il est donc une figure du XXe siècle français, mais aussi une figure paradoxale, passée de héros national à collaborationniste de Vichy en bien peu de temps.

Introduction

Problématiques 

  • Comment expliquer le revirement dans la carrière de Pétain et les divisions qu’il a pu créer au sein des Français ? 
  • Comment expliquer la trajectoire politique de Pétain et le choix paradoxal de la collaboration pour un nationaliste convaincu et un partisan d’une France forte ? 

 

Ce plan détaillé te permettra d’y voir plus clair sur la vie de cette figure historique. Les informations qui suivent sont des éléments éclairants de sa vie à utiliser dans un plan pour illustrer des idées qui s’articulent entre elles, en vue de répondre à la problématique.

La figure de héros national se construit grâce à la Première Guerre mondiale

Alors même que sa carrière militaire (qui touchait à sa fin) avait été relativement modeste, Pétain a su se construire une image de héros national, grâce à son rôle durant la Première Guerre mondiale :

  • Le parcours classique de ce militaire à la progression lente et exprimant peu ses opinions politiques ne laisse pas présager une suite de carrière brillante.
  • Mais la Première Guerre mondiale est l’occasion d’une révélation : Pétain fait ses armes à Verdun, où il s’illustre par son esprit de stratège et son pragmatisme.
  • Il acquiert alors une popularité forte auprès des combattants qui le suivront (grâce à l’augmentation des rations, des permissions et son fameux : « On les aura ! »).

La période de l’entre-deux-guerres voit l’avènement de l’homme politique

Pétain, durant l’entre-deux-guerres, se pose progressivement comme une alternative viable au pouvoir en place :

  • Son prestige grandit encore après-guerre (élu Académicien, victoires lors de la guerre du Rif au Maroc).
  • À la faveur de son aura militaire, il entre progressivement dans le jeu politique (il est ambassadeur en Espagne, il est mêlé à l’affaire de la Cagoule).
  • C’est donc progressivement qu’il se pose en alternative au pouvoir en place, dans la période politique mouvementée qu’est l’entre-deux-guerres française (« C’est Pétain qu’il nous faut », 1935, Gustave Hervé).

La débâcle précipite son arrivée au pouvoir

Ce contexte trouble favorise la mise en place d’un régime personnaliste et le lancement de la « Révolution nationale » :

  • Pétain est propulsé au pouvoir par la défaite et bouleverse alors rapidement les structures du pouvoir en mettant en place un régime dans lequel se dévoilent ses idées conservatrices, patriarcales et réactionnaires.
  • Il se compromet aux yeux des Français en s’engageant toujours davantage sur la voie de la collaboration, alors même que ces derniers étaient prêts à lui faire confiance.
  • Il est condamné après-guerre, mais l’opinion reste longtemps divisée à son sujet (vol de son cercueil, personnalités qui vont fleurir sa tombe, ce qui est controversé).

Les informations éclairantes pour nourrir ce plan détaillé

Enfance et carrière militaire

  • Orphelin de mère, délaissé par sa belle-mère, Philippe Pétain ne parle pas avant ses 3 ans et garde un caractère peu expansif tout au long de sa vie.
  • C’est marqué par la défaite de 1870 qu’il choisit d’entrer dans l’armée. Sa progression dans la hiérarchie y est assez lente, car l’armée est encore très aristocratique. Il est promu pendant la période de « Républicanisation » de l’armée sous Waldeck-Rousseau.
  • Il est longtemps discret sur ses opinions, dans l’esprit de la « grande muette » (l’armée).
  • Il s’est démarqué à l’École de guerre de la doctrine dominante de l’offensive à outrance.
  • Peu avant la guerre, le ministre de la Guerre refuse qu’il soit promu général. Ce manque de reconnaissance est considéré par certains comme un des éléments structurant la personnalité de Pétain (c’est ce que soutient de Gaulle dans un discours où il donne son explication sur la trajectoire de Pétain).

Première Guerre mondiale

  • Pétain est le grand vainqueur de la bataille de Verdun (notamment, car il comprend la valeur de l’aviation et fait preuve d’un pragmatisme plus adapté à la situation que ses prédécesseurs).
  • Les hommes qu’il a commandés soulignent certains traits chez lui : caractère secret, manque d’humour, froideur, apparence marmoréenne.
  • Avec Georges Clemenceau, il est vu comme l’artisan du redressement du moral des troupes après les mutineries de 1917 (il octroie plus de permissions et plus de rations).

Entre-deux-guerres

  • Pétain commande les forces françaises combattant aux côtés de l’Espagne dans la guerre du Rif, remplaçant le maréchal Lyautey (1925-26). Il y remporte des victoires, mais Abdelkrim dénoncera l’usage de gaz moutarde sur la population civile.
  • Il est élu Académicien en 1929, succédant à Foch.
  • Ambassadeur en Espagne en 1939, il est placé à ce poste pour améliorer l’image de la République française aux yeux de Franco en atténuant le souvenir du soutien hexagonal aux républicains espagnols pendant la guerre civile.

Seconde Guerre mondiale

  • Par le fameux discours du 17 juin 1940 (« Je fais à la France le don de ma personne pour atténuer son malheur »), Pétain prend le commandement de la France et, en s’octroyant très rapidement un pouvoir total, met en place un régime réactionnaire sous les ordres de Hitler.
  • Si, avant d’accéder au pouvoir, Pétain n’était pas ouvertement antisémite, il appliqua avec zèle les lois de Nuremberg et instaura dès 1940 les lois sur le statut des Juifs. Il est responsable de la déportation de milliers de femmes, d’enfants et d’hommes de confession juive. Lorsque, fin juin 1942, Laval informe le Conseil des ministres de la prochaine mise en œuvre de la rafle du Vélodrome d’Hiver, le procès-verbal témoigne que Pétain agrée comme « juste » la livraison de milliers de Juifs aux nazis. En tout, 76 000 Juifs, parmi lesquels 11 000 enfants, non réclamés au départ par les Allemands, ont été déportés de France sous l’Occupation, dont 80 % ont été arrêtés par la police française. Un tiers avait la nationalité française ; seuls 3 % survivront aux déportations dans les camps de concentration et d’extermination.
  • Le 12 août 1941 est un tournant important avec le discours du vent mauvais : Pétain prend conscience de l’érosion de son appui : « Je sens se lever depuis quelques semaines un vent mauvais. L’inquiétude gagne les esprits, le doute s’empare des âmes. L’autorité de mon gouvernement est discutée. »
  • La distinction de Stanley Hoffmann entre « maréchalistes » et « pétainistes » permet de comprendre les revirements dans sa popularité qu’a connus Pétain entre 1940 et 1944. Les « maréchalistes » font confiance à Pétain comme bouclier des Français. Beaucoup plus minoritaires, les « pétainistes » approuvent en plus son idéologie réactionnaire et sa politique intérieure, voire la collaboration d’État.

La fin de Pétain

  • Quand vient le temps de rendre des comptes en 1945, Pétain est frappé d’indignité nationale et condamné à mort (peine commuée en emprisonnement à perpétuité par le général de Gaulle en raison de son grand âge).
  • Sa tombe est volée en 1972 par le politique d’extrême droite Tixier-Vignancour pour la rapporter à Verdun et mettre à l’honneur le Pétain héros de la Première Guerre mondiale.

Conclusion

Pétain est une figure du programme autour de laquelle des débats persistent (quelle était sa marge d’autonomie réelle vis-à-vis de Hitler et donc dans quelle mesure faut-il lui imputer l’entière responsabilité de la politique de livraison de Juifs qu’il a bel et bien menée ?).

S’il peut être pertinent de mentionner ces débats, la neutralité est de mise dans ce type d’exercice : l’oral d’histoire n’est pas destiné à rentrer dans le registre de l’opinion et s’aventurer en terrain clivant ne pourrait que desservir ta prestation.