Major Prépa > Intégrer une prépa > Le parcours atypique d’Amélie, devenue prof de maths en prépa

École d’ingénieur, école de commerce, prof de maths, … Découvre l’interview exclusive du parcours atypique d’Amélie, prof de maths en prépa B/L au lycée Stanislas de Cannes !
Bonjour Amélie, peux-tu te présenter en quelques mots ?
Bonjour ! J’ai 40 ans tout pile, maman de deux enfants (8 et 13 ans). Originaire de Saint-Etienne (j’y tiens ;-)), j’habite depuis une quinzaine d’années dans le sud de la France. Je suis actuellement prof de maths en prépa B/L au lycée Stanislas de Cannes.
Tu as eu un parcours pour le moins… atypique ! Peux-tu le détailler ?
En effet, mon parcours est atypique, même si dans l’Education nationale on rencontre de plus en plus de gens qui se sont reconvertis.
Après un bac S obtenu en 1997, j’ai fait une prépa scientifique puis j’ai intégré l’ENSEEIHT. J’ai eu la chance de pouvoir faire ma dernière année d’école d’ingénieur en Australie, à l’université de Sydney. De retour en France, je n’avais pas envie de faire un métier trop « technique », du coup j’ai enchaîné sur un mastère spécialisé en marketing management et communication à TBS en anglais et en cours du soir, ce qui me permettait d’être en stage pendant la journée. J’ai tout de suite trouvé du boulot comme prestataire pour Amadeus, à Sophia-Antipolis, où j’étais « product analyst » pour la réservation aérienne. Ensuite j’ai été recrutée par SAP à un poste de « support consultant ». A la naissance de mon fils, j’ai eu des problèmes de santé qui ont fait que j’ai eu envie / besoin de faire un métier qui avait du sens pour moi. J’ai rapidement pensé à l’enseignement, mais je me suis heurtée à une contrainte géographique : je ne pouvais à l’époque pas quitter le sud. Le CAPES et l’agrégation externe étant des concours nationaux, j’ai préféré passer le CRPE (concours académique de recrutement des professeurs des écoles) en candidate libre en 2009, avec mon fils sous le bras.
Qu’est-ce qui t’a finalement poussée à devenir prof de maths ?
N’ayant pas assez d’ancienneté pour obtenir un poste fixe de professeure des écoles, j’ai été affectée en quatre ans dans 24 écoles, quatre circonscriptions, dans tous les niveaux de classe de la petite section de maternelle au CM2, même dans des classes spécialisées avec des groupes d’enfants non francophones ou d’enfants du voyage à qui j’ai appris à lire. Ça a été extrêmement formateur et j’ai rencontré des gens (élèves et collègues) très chouettes, mais je ne faisais pas assez de maths à mon goût. J’avais envie aussi de travailler auprès d’un public plus âgé. J’ai alors monté un dossier de détachement pour devenir prof de maths dans le secondaire, mon diplôme d’ingénieur m’exonérant de passer le CAPES.
L’année suivante, j’ai préparé l’agreg, ce qui était un peu tendu parce que je n’avais pas fait de maths à haut niveau depuis la prépa. Mais en fait c’est comme le vélo ! Par contre j’ai eu l’impression de revivre la charge de travail d’une année de prépa en 100 fois pire : j’avais deux enfants petits (ma fille avait 2 ans et se réveillait 5 fois par nuit), un poste en collège à temps plein, et je venais d’être élue adjointe au maire dans mon village. J’ai adopté un rythme quasi militaire, genre « j’ai x semaines et y chapitres, c’est parti !! » L’avantage quand on vit une année comme ça, c’est qu’on est trèèèès déterminé pour ne pas en faire une deuxième. Et effectivement j’ai réussi. Dans la foulée (c’est trop cool quand les planètes s’alignent !), j’ai eu un poste au lycée international de Valbonne où j’ai passé plusieurs très belles années dans un environnement cosmopolite. J’y ai enseigné les maths et l’informatique, j’y ai fait pas mal de khôlles en MPSI et PCSI, et j’en garde de très bons souvenirs.
En 2017, j’ai obtenu un poste en CPGE au lycée Stanislas de Cannes, mais surtout j’ai eu la chance de participer, avec une équipe de collègues ultra-motivés, à la création de la seule prépa B/L de l’académie de Nice.
… et contributeur pour Major-Prépa ?
J’ai connu Major-Prépa par mes étudiants en fait, qui en avaient fait leur bible au moment de la procédure Sigem 😉 Je me suis intéressée à votre joyeuse équipe et j’ai vraiment trouvé ça top que vous mettiez votre expérience d’anciens préparationnaires au service des générations suivantes. Un des aspects que j’adore dans mon job, c’est la partie « coaching » et « orientation » des étudiants. En plus, j’aime beaucoup écrire (à mes heures perdues, j’écris à quatre mains avec une copine des romans policiers humoristiques), du coup quand j’ai vu que Major-Prépa recherchait des rédacteurs, ça m’a tout de suite tentée. Je n’ai pas du tout la prétention de tout savoir sur la prépa B/L, mais si je peux transmettre quelques bons tuyaux et motiver les troupes, c’est déjà ça.
Comment vis-tu ton métier à l’aune de la pandémie que nous traversons aujourd’hui ?
C’est sûr que cette histoire de Covid, ça a changé beaucoup de choses dans le métier de prof. Il a fallu s’adapter très rapidement et apprendre à faire cours à des élèves… sans élèves en face de soi. Surtout qu’en maths, un cours ne peut pas se faire en podcast. Pour les cours en ligne l’an dernier, j’utilisais Teams, ainsi que Canvas pour la correction des devoirs. Il fallait mettre par écrit et en amont tout ce que j’aurais pu écrire au tableau « en live » si j’avais été en classe. J’avais aussi installé dans mon bureau et face à la webcam le tableau Smoby de ma fille (système D ;-)) pour écrire les démos dessus. Mais en plus des maths, il y a eu tout un accompagnement « psychologique » des étudiants, et en particulier de ceux de khâgne pour qu’ils tiennent jusqu’aux concours. Entre le confinement du 15 mars où ils ont eu 24 heures pour plier leurs affaires de l’internat et trouver un point de chute, la nouvelle de l’annulation des oraux, la longue attente des dates des écrits, les révisions qui durent 3 mois, jusqu’aux résultats en août, ça a été très dur pour eux.
Cette année, heureusement, les cours sont pour la plupart restés en « présentiel » (vive 2020 avec ses nouveaux mots), et le métier est redevenu plus « classique ». En revanche il faut prendre en compte les impacts du confinement de l’an dernier sur les étudiants de cette année, notamment ceux qui sont maintenant en hypokhâgne : tous n’ont pas vu les mêmes choses au même rythme, tous n’ont pas réussi à travailler « en autonomie » de la même façon…
Par contre, il faut le reconnaitre, j’ai aussi trouvé des côtés positifs aux visios : c’est la première année où j’ai pu assister à la réunion du jury de l’ENS et où j’ai pu suivre autant de présentation d’écoles (TBS, ENSAE, Audencia, Neoma…).
Enfin, est-ce que tu peux présenter en quelques mots la prépa B/L ? C’est une filière plutôt méconnue !
Avec grand plaisir ! En effet, la prépa B/L (lettres et sciences sociales), est méconnue, pourtant c’est le cursus qu’ont suivi par exemple Emmanuel Macron et Edouard Philippe.
C’est une filière vraiment géniale, à différents points de vue : déjà pour la diversité des profils d’étudiants, qui venaient jusqu’à présent des trois filières S, ES et L. Ensuite pour la richesse des débouchés offerts à la sortie : des ENS aux écoles de statistiques, en passant par les grandes écoles de management, quelques écoles d’ingénieurs, Sciences Po Paris, sans oublier de prestigieux cursus universitaires… Et surtout pour l’apport intellectuel que cela représente pour les étudiants : pendant deux voire trois ans, ils étudient de nombreuses matières comme les lettres, les SES, la philo, l’Histoire, les langues vivantes (parfois 2), les maths (indispensables pour certains débouchés, très utiles pour poursuivre des études d’économie par exemple), pour certains aussi les langues anciennes (latin ou grec) ou la géographie… Je suis convaincue que cette prépa, outre les compétences d’organisation et la capacité de travail communes aux autres filières, apporte aux étudiants une pluridisciplinarité et une ouverture culturelle qui resteront leur marque de fabrique dans leurs parcours futurs.