Qui sont-ils ? Qu’attendent-ils des admissibles ? Que disent-ils des candidats une fois la porte refermée ? Les jurys face auxquels tu vas défendre ton admission pendant tes entretiens de motivation sont des figures souvent redoutées. Pour savoir face à qui tu auras bientôt à t’exprimer, on te donne dans cet article un aperçu de leur profil, de leurs liens avec les écoles et de la manière dont ils attribuent les notes !

De la joie de faire passer des entretiens

« Je fais passer des entretiens pour la troisième fois cette année et je suis impatiente, car c’est toujours un très bon moment ! » Diplômée d’ICN en 2007, Séverine Pellerin confirme que la pointe de stress ressentie par de nombreux candidats au moment de passer la porte de leur salle d’examen n’est visiblement pas partagée par les examinateurs. Il n’est en revanche pas impossible que la nostalgie gagne certains des alumnis devenus jurys au souvenir de leur propre passage en entretien, parfois pas si lointain. Les diplômés ne se font pas prier pour participer au recrutement des futurs étudiants de leur alma mater. « Je suis très attachée à mon école et c’est une façon pour moi de garder le lien », poursuit Séverine Pelle- rin, en reconversion professionnelle après une première partie de carrière en tant que consultante en stratégie des organisations

« Il y a une forme de ‘give back’ chez nos alumnis qui sont nombreux à se rendre disponibles pour ce rendez-vous et toujours heureux de nous retrouver à cette occasion pour participer à la vie de la communauté ESCP », souligne Cécile Kharoubi, directrice académique du Master in Management de la business school.

Des jurys impliqués…

Aux côtés des diplômés, à ESCP et l’ICN comme dans l’ensemble des autres écoles, des membres du corps professoral (ou des équipes académiques) assurent la présidence des jurys en qualité d’« internes ». Ils peuvent aussi être accompagnés par des « externes », en général des professionnels en activité au sein des entreprises partenaires. Il est plutôt rare qu’un candidat se trouve face à 3 examina- teurs, mais cela peut arriver, selon les écoles et les disponibilités des membres du jury. Quelle incidence sur la manière dont tu seras évalué(e) ? « Le traitement du candidat est le même, rassure Sophie Gay, directrice générale adjointe en charge des programmes et de l’international de NEOMA BS. Que vous passiez face à 2 ou 3 jurys, à 10h30, à 14h ou à 17h ! Les jurys sont des professionnels, ils sont parfaitement briefés et disposent d’un support de notation à partir duquel ils évaluent de manière formelle la performance du candidat. Ils ne prennent pas cette activité à la légère et ont conscience que les admissibles jouent leur classement et leur admission à ce stade du concours. »

… Et parfaitement briefés !

La bienveillance est au cœur des briefings. « On ne casse jamais un candidat ! À une admissible affectée par sa performance en oral d’espagnol, j’ai proposé de s’isoler quelques minutes pour se reprendre avant de se lancer », se souvient Séverine Pellerin. « On demande au jury de ne pas mettre les candidats mal à l’aise, mais de leur tendre des perches pour qu’ils puissent briller », confirme Cécile Kharoubi. Si tu avais encore des doutes : pas de question piège en entretien. Certaines écoles font même signer des chartes de « bonne conduite de l’entretien » au jury. Celle de NEOMA précise que si aucun sujet n’est considéré comme tabou, les questions pouvant être perçues comme discriminantes ou celles relatives à la sphère privée ne doivent pas être posées. « Nous luttons contre toutes les formes de discrimination ou de jugement de valeur. La grille fournie à nos jurys est précise : quatre domaines sont chacun évalués sur 5 points », indique Catherine Teinturier, directrice qualité et RSE du groupe ESIEA que nous avons interrogée alors qu’elle venait de piloter une session de recrutement à distance. L’admission au sein de cette école d’ingénieurs spécialisée dans l’informatique et le numérique est conditionnée par la performance orale des candidats, également notés sur leur dossier. « Nous vérifions leur aptitude au dialogue, leurs capacités d’écoute, la qualité de leur expression, leur connaissance de l’école, leur esprit d’initiative, leur aptitude à se projeter... » Rien de très dif- férent des attendus dans les écoles de management.

La notation discriminante

« Nous ne faisons pas mystère de la grille d’évaluation que les jurys ont sous les yeux pendant l’entretien, indique Sophie Gay. Qualité de l’expression, profondeur de la réflexion, capacités à s’engager font partie des critères évalués. » En entretien à NEOMA, le candidat obtient une note de 0 à 20 qui est le fruit du consensus entre les membres du jury. Le zéro tombe rarement, sauf si l’admissible a buté sur toutes les questions. À l’inverse, un candidat qui convainc le jury peut décrocher un 19 ou un 20. Une majorité des écoles demande au jury d’attribuer des notes discriminantes. « On a tous envie de donner un 12 ou un 13/20 à un(e) candidat(e) à propos duquel/de laquelle on hésite, reconnait Cécile Kharoubi. Mais en réalité, si l’on voit qu’il/elle ne sera pas heureux/ se dans l’école, il faut que la note le traduise. À l’inverse, si le jury est ébloui, il est invité à mettre une excellente note ». De fait, les cartes sont rebattues au moment des oraux à ESCP. Dans un sens, comme dans l’autre. « Statistiquement parlant, nos admissibles ont fait le plus dur. Ils étaient autour de 6 000 avant les écrits, ils ne sont plus que 1 300 environ à passer les oraux et peu d’entre eux sont totalement éliminés. »

Le fond plus que la forme

Si la forme n’est pas un critère essentiel pour le jury (« Le sweat à capuche passe mal pour moi… », prévient tout de même Catherine Teinturier) le fait de ne rien connaître à l’école où tu passes ton entretien est l’erreur qui affectera ta note à coup sûr. « Venir les mains dans les poches, sans avoir rien préparé, c’est accorder peu d’estime au jury qui prend sur son temps pour venir faire passer des oraux, et c’est aussi trahir le peu de respect porté à l’image que l’on renvoie de soi », avertit Séverine Pellerin. « Montrez-vous un minimum intéressé(e) par l’école, confirme Cécile Kharoubi. Parler d’un double diplôme proposé dans une autre école n’est pas du meilleur effet… »

Sois toi-même

Le hack pour te mettre le jury dans la poche ? Mise sur l’authenticité ! Le jury t’attend préparé(e), mais pas programmé(e), il veut distinguer les aspérités de ta personnalité, pas entendre un discours lisse et formaté. Ne mentionne pas ta summer school à Columbia si tu ne peux parler ni des cours suivis sur place, ni de ce que New York t’a inspiré ; ne parle pas de ton voyage en Afrique comme d’un tournant de ta vie si tu peux à peine citer des noms de villes ou partager tes rencontres sur place ; n’évoque pas de mission humanitaire si tu es parti(e) en bus avec quinze autres prépas de ta classe donner des cours de soutien scolaire à une heure de chez toi… « Rien ne remplace le candidat qui dissèque sa passion pour les séries sud-coréennes ou celle qui nous bluffe en analysant son intérêt pour l’astrologie, thème qu’elle aurait eu des raisons de ne pas oser aborder », se souvient Cécile Khaboubi. On ne sait pas si ces deux candidats étudient aujourd’hui à ESCP, mais on te l’assure : ceux qui restent superficiels en entretien n’ont pas les meilleures chances d’intégrer, une Parisienne ou une autre !