Major Prépa > Ressource > Podcast > La France est-elle une puissance en déclin ? (La colle géopo #3)

Alors que l’Europe entière va connaître une crise énergétique sans précédent, la France, avec le 2ème parc nucléaire au monde aurait pu être en mesure de produire suffisamment d’électricité pour elle-même, voire aurait pu en exporter. Cependant, à cause de perte de compétences, de décisions politiques et d’un manque de rénovation, sur ses 56 réacteurs, 31 sont à l’arrêt.
Cet exemple montre ici deux facettes d’un éventuel déclin français : un déclin endogène lié à des défaillances industrielles, et un déclin exogène qui en découle : une perte de puissance s’expliquant par cette nouvelle dépendance énergétique.
Toutefois, cette perte de puissance peut certes s’expliquer par des facteurs endogènes, mais ce sont surtout des raisons extérieures qui laissent penser au déclin de la France : pour parler comme Fareed Zakaria, c’est plus la « montée des autres » que la décadence française, qui serait responsable de son déclin. C’est finalement l’histoire d’un vieux pays industriel qui tente de se maintenir dans un monde où la moitié de l’humanité accomplit depuis une génération un stupéfiant rattrapage.
Dès lors, les mutations auxquelles la France fait face depuis 40 ans et qui peuvent être interprétées sous l’angle du déclin ne sont-elles pas autant signes d’adaptations à monde changeant qu’expression d’une transformation du rôle et de la place d’une puissance historique ?
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I. Certes, face aux mutations auxquelles elle fait face depuis 40 ans, la puissance française apparaît comme doublement en déclin (relatif et absolu)
Le déclin français est d’abord relatif, à cause, de l’émergence de nouveaux pays industrialisés qui viennent diluer sa propre puissance : ce sont les quatre dragons asiatiques, les cinq bébés tigres ou les BRICS. La France ne décline pas en soi, ce sont les autres qui montent. Pourtant, sur certains critères, la France est décadente, c’est-à-dire qu’elle régresse vis-à-vis d’elle-même. Il y a en effet une décadence économique et commerciale ainsi qu’une décadence de son modèle social et politique.
II. Toutefois, l’idée d’un déclin français doit être nuancée
Il faut d’abord relativiser le déclin de la France, car elle n’est pas la seule puissance établie frappée par le déclin ; c’est tout l’Occident qui en est frappé. Il faut également relativiser son déclin, car la France reste une grande puissance sous tous ses aspects : économique, diplomatique et militaire. Enfin, notons que la notion du déclin est subjective. La perception qu’on peut avoir du déclin peut donc s’éloigner de la réalité, notamment lorsqu’elle est utilisée à des fins politiques.
III. Finalement et au demeurant, si la France à tout de même su tirer profit des mutations qui l’ont affecté, elle doit encore relever certains défis et enjeux pour ne plus être considérée comme une « grande puissance moyenne » (VGE)
Tout d’abord, La France dispose d’une véritable capacité de rebond qui lui a permis d’utiliser les mutations pour valoriser certains atouts. En effet, les mutations récentes semblent avoir monétisé certains atouts qui avaient moins de valeur et d’intérêt il y a 40 ans. Par exemple, la diversité du territoire français (métropole, Guyane, Caraïbes, etc.) est un atout qui s’est monétisé avec l’explosion du tourisme international. Forte de cette capacité de résilience, la France doit encore relever une multitude de défis et d’enjeux : réforme du système social, relever le système éducatif, baisser le chômage des jeunes, contrôler les flux migratoires, réduire les inégalités et la précarisation des emplois, endiguer la baisse de la diffusion de la culture et du modèle français, régler le problème du terrorisme djihadiste, se défendre des puissances non-coopératives et agressives comme la Chine, la Russie, la Turquie ou même les Etats-Unis, retrouver une Europe forte et enfin retrouver un tandem franco-allemand équilibré.
Conclusion
En définitive, parler d’une « banalisation » de la puissance française est sans doute plus juste que de parler de son déclin. En effet, la France a montré être à même de s’adapter à des contextes nouveaux parce qu’elle satisfait des critères de puissance invariables et toujours opératoires au 21ème siècle.
Si vous souhaitez préparer en avance le sujet de khôlle de la semaine prochaine, le voici : Que recouvre aujourd’hui la notion de guerre ?
NB : Je remercie mes différents professeurs Frédéric BESSET, Benoit JOULIA et Lionel POURTY dont les cours et les intuitions m’ont permis de construire cet article, ce podcast et cette fiche.